Intervention de Jean-Yves le Drian

Réunion du 23 octobre 2014 à 9h10
Commission élargie : finances - défense nationale - affaires étrangères

Jean-Yves le Drian, ministre de la défense :

Rubis sur l'ongle.

Les installations prépositionnées ont toujours fait partie intégrante du budget de la défense et non de celui des OPEX, du fait qu'elles assurent une fonction de base du ministère de la défense. Lorsque la mission Licorne a achevé ses missions extérieures, j'ai estimé nécessaire la présence d'une base de soutien à Abidjan, pour soutenir l'opération Barkhane. Il s'agit d'une force prépositionnée, à l'exemple de celles de Dakar et de Libreville. En raison de la situation militaire, nous avons diminué celle de Libreville pour renforcer celle d'Abidjan.

Monsieur Nauche, Louvois coûtera 150 millions d'euros en 2014 et en coûtera probablement autant en 2015. Disons-le : c'est épouvantable. J'ai décidé de donner aux chefs de corps les moyens financiers de remédier aux délires de Louvois entraînant des insuffisances de soldes. Ce dispositif, qui a permis d'éviter un scandale d'État, se traduit par des dépenses qui devraient pouvoir être recouvertes lorsque Louvois aura été remplacé. Il n'est pas certain en revanche que nous recouvrions tous les trop-perçus que certains militaires doivent progressivement rembourser, en raison notamment des départs.

Je n'ai pas voulu polémiquer sur le sujet. En effet, si, comme vous l'avez souligné, monsieur Nauche, le dispositif Louvois a été trop rapidement mis en oeuvre, il est en revanche très difficile et savoir réellement qui a fait quoi et de dégager avec précision les responsabilités. La gestion du dispositif était contraire aux grands principes de la défense : un chef, une mission, des moyens. C'est la raison pour laquelle j'ai remis de l'ordre, y compris dans le titre II : il n'y a plus qu'une seule masse salariale, un seul patron. Chaque armée ne peut plus créer ses postes comme elle l'entend, car cette pratique entraînait une augmentation de la masse salariale en dépit de la diminution du nombre des postes.

Le plan de cyberdéfense a été lancé en février 2014 à l'école des transmissions de Rennes : il est doté d'1 milliard d'euros sur l'ensemble de la LPM, qu'il s'agisse du secteur industriel, de la recherche, du recrutement ou du réseau réserve citoyenne « cyber », initiative très originale qui connaît un grand succès. Cette réserve permet en effet de mobiliser les compétences nécessaires. La DGA Maîtrise de l'information, située à Bruz, est dotée du nouvel équipement. La LPM prévoit de recruter 400 personnels de haut niveau – c'est une de mes priorités. Les recrutements ont d'ores et déjà débuté. Nous devons être les premiers dans ce domaine – nous le sommes déjà en Europe. Cette urgence, que nous avons prise à bras-le-corps, sera un des pôles d'excellence de nos forces à la fin de la LPM.

Monsieur Myard, que les choses soient claires : à Newport, les États membres de l'OTAN se sont engagés à consacrer 2 % de leur PNB à la défense à l'échéance de dix ans : nous en sommes aujourd'hui, je vous l'assure, à 1,89 %. J'estime que, dans dix ans, nous serons passés à 2 %, d'autant que la LPM prévoit en 2016 une augmentation de 500 millions du budget de la défense.

Madame Poumirol et monsieur Delcourt, si nous révérons tous le Val-de-Grâce, il faut savoir qu'il était nécessaire d'y faire deux tranches de travaux de 260 millions d'euros pour le remettre aux normes. Or le besoin militaire en matière de santé est essentiellement assuré par les hôpitaux d'instruction des armées de Bégin et de Percy, qui répondent aux normes et où se trouvent les compétences d'excellence, alors que le Val-de-Grâce ne répond à aucun besoin militaire avéré. De plus, l'offre civile de soin publique et privée dans le quartier et alentour est suffisante. Ce n'est pas parce que des personnalités françaises et étrangères, parfois après être passées par Bégin ou Percy, viennent se faire soigner au Val-de-Grâce ou s'y reposer, qu'il convient de consacrer 500 millions d'euros de travaux à la rénovation de cet établissement. Il fallait prendre une décision douloureuse mais conforme à la bonne gestion des comptes publics : je l'ai prise. Toutefois, afin de préserver la référence défense, il sera créé au Val-de-Grâce un pôle de recherche et un pôle majeur de formation du SSA. Le sort du reste des bâtiments sera négocié avec des partenaires tels que la mairie de Paris. La fermeture du Val-de-Grâce sera progressive.

Les huit autres hôpitaux du SSA seront maintenus pour assurer deux fonctions différentes. La vocation opérationnelle des plateformes hospitalières militaires constituées, pour l'Île-de-France, par Bégin et Percy, et, pour le Midi, par Lavéran et Saint-Anne, sera prioritaire, voire exclusive, avec une capacité de projection à l'extérieur. Quant aux hôpitaux militaires de Metz, Brest, Bordeaux et Lyon, outre qu'ils compléteront les besoins opérationnels des plateformes hospitalières, ils signeront un partenariat avec les hôpitaux publics ou privés de leur territoire ; c'est ce qui s'est fait à Bordeaux, où cela fonctionne très bien. Les discussions sont engagées. Elles se révèlent fructueuses. L'objectif du projet « SSA 2020 » est de garantir la performance opérationnelle.

La défense participe par ailleurs au plan d'action mis en oeuvre par le Gouvernement pour lutter contre la propagation du virus Ébola. L'action à mener dans les trois pays les plus concernés – Sierra Leone, Liberia et République de Guinée – a été répartie entre les États-Unis, le Royaume-Uni et la France. Le ministère de la défense assure sur le territoire national l'accueil de malades avérés ou potentiels – c'est ce qu'il a fait à Bégin avec bonheur –, procède aux évacuations, participe à la mise en oeuvre et au soutien du centre de traitement Ébola de Macenta en Guinée forestière et armera un centre de formation et de soins des soignants, qui sera probablement installé à Conakry.

Monsieur Myard, il n'y aura aucun trou en matière de renseignement satellitaire, puisque le PLF pour 2015 prévoit le lancement du programme de détection électromagnétique CERES, de compétence française : alors que nous ne disposons pour l'instant que des quatre microsatellites du projet ELISA, trois satellites seront mis en service en 2020. Nous n'aurons plus besoin d'aller chercher des informations ailleurs.

Monsieur Boisserie, le loyer annuel pour Balard s'élèvera à 154 millions d'euros pour un investissement de 3,5 milliards d'euros. Ce loyer comprendra l'ensemble des dépenses liées à la redevance immobilière, aux services et à l'énergie. Ce lieu unique permettra de regrouper les compétences et de réduire les personnels affectés. Le déménagement devrait normalement avoir lieu courant juin 2015.

Madame Coutelle, j'ai mis en oeuvre une feuille de route relative à la parité et à l'égalité hommes-femmes. L'armée française est la plus féminisée d'Europe. Il convient d'assurer l'égalité entre les hommes et les femmes à l'intérieur de chaque armée, qu'il s'agisse de l'accès aux grades ou du déroulement de carrière. L'Observatoire de la parité hommes-femmes de la défense, que j'ai mis en place, s'est réuni avant-hier sous ma présidence. Nous assistons à l'émergence d'une véritable culture de l'égalité.

J'ai également mis en place la cellule Thémis, qui est une cellule d'appels, de veille et de prévention des violences faites aux femmes, que j'ai visitée au mois de décembre dernier : elle donne des résultats. Je veux que le ministère de la défense soit exemplaire en la matière. Je suis frappé de la détermination des chefs d'état-major et de l'encadrement à mettre en oeuvre cette feuille de route.

Monsieur Vitel, le report de charges est une de mes préoccupations majeures. Il passera probablement de 3,4 milliards en 2013 à 3,1 en 2014, si je suis suivi – je donne ce chiffre avant l'arbitrage de fin de gestion. Lorsque je suis entré à la Commission de la défense de l'Assemblée nationale, en 1978, cette bosse existait déjà… Je vous confirme par ailleurs que 250 millions ont déjà été versés et que les 250 millions restants le seront dans le cadre de la loi de finances rectificative.

Je vous remercie de votre soutien dans les négociations de fin de gestion.

Monsieur de Rugy, s'agissant du dépyramidage, la défense est au rendez-vous : nous sommes bien passés de 16,75 % à 16 % d'encadrement. La règle ne peut pas être d'application stricte, du fait que le pourcentage d'officiers est différent selon les armées. Aussi les situations doivent-elles être appréhendées de manière très précise. La DGA et le SSA ont besoin d'un nombre d'officiers bien supérieur à celui de l'armée de terre. Il convient de conserver les compétences. Si, en 2014, il n'y a eu que 850 suppressions au lieu des 1 000 prévus dans la LPM, ce fut en raison de la mise en place des outils d'aides au départ : il faut savoir que le dégagement n'est pas autoritaire mais repose sur le volontariat. Et il faut faire en sorte que ce ne soient pas seulement les meilleurs qui partent…

Monsieur Martin-Lalande, l'avenir de la base aérienne 273 de Prunay-en-Sologne, qui profite de regroupements, ne doit vous donner aucun sujet d'inquiétude. La fermeture du site de Salbris, quant à elle, répond à notre volonté de concentrer les sites de services en conformité avec le plan de stationnement des forces. Le dépôt de munitions devrait être dissous dans les années 2017 et 2018. Les personnels qui ne seront pas partis à la retraite d'ici là bénéficieront des dispositifs d'accompagnement prévus. Chacun doit savoir que l'accompagnement social est très sérieux : il y a les aides à la mobilité géographique, qui vont de 1 300 à 32 000 euros, les indemnités volontaires de départ, qui peuvent atteindre quelque 100 000 euros, les aides pour l'acquisition d'un nouveau logement ou le maintien de la rémunération garanti sur sept ans avec une indemnité complémentaire d'accompagnement lorsque le déplacement conduit à occuper un emploi nettement moins bien rémunéré que le précédent. Les personnels de Salbris profiteront de cet arsenal de mesures très performant, que les organisations syndicales nous demandent de maintenir et d'améliorer encore. Pour avoir été maire d'une ville qui a connu la suppression de 4 000 emplois de la défense, je connais les difficultés et les souffrances qu'une restructuration entraîne. C'est pourquoi la parcimonie et la vigilance président à mes choix.

Monsieur Chrétien, depuis que je suis ministre, quatre CRSD ont été engagés à la suite des mesures que j'ai annoncées en 2013 pour 2014 : ils concernent Luxeuil, Châteaudun, Varennes-sur-Allier et Orange. Mais le CRSD pour Orange est désormais caduc puisque, comme vous le savez, le transfert de la formation des commandos de l'air de Dijon à Orange compense le départ du 1er régiment étranger de cavalerie pour Carpiagne.

Les comités de site ont été mis en place. Je n'ai pas avec moi le déroulé des mobilisations financières engagées ; sachez seulement que, dans le cadre de la LPM, 150 millions d'euros peuvent être mobilisés au profit des CRSD.

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