Intervention de Dominique Minière

Réunion du 25 octobre 2016 à 18h00
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Dominique Minière, directeur exécutif groupe en charge du parc nucléaire et thermique d'EDF :

Vous avez parfaitement compris. Il y a bien deux sujets, l'un étant d'ordre technique, celui de la ségrégation carbone positive que vous évoquez. Mais, encore une fois, nos centrales et nos générateurs de vapeur fonctionnent. Les questions posées concernent ce qui pourrait se passer au cas où interviendraient des situations incidentelles ou accidentelles sur ces composants.

Trois éléments essentiels permettant de démontrer que la sûreté est assurée ont été rappelés par l'IRSN. Premièrement, il faut bien comprendre ce qui se passe métallurgiquement avec de telles teneurs en carbone. Nous disposons déjà d'un certain nombre d'éléments et des éléments complémentaires résulteront de l'instruction du dossier présenté le 7 octobre 2016 pour les fonds JCFC. Deuxième élément important, nous avons finalisé les études mécaniques et de transitoires sur ce qui se passerait en cas d'accident ou d'incident en présence d'un défaut. Va-t-il se propager ? Est-il dangereux ou pas ? Nous avons fait un certain nombre d'études qui montrent, compte tenu de la localisation de cette zone de ségrégation de carbone, qu'elle est relativement peu sollicitée mécaniquement. Finalement, un tel défaut ne présente pas de danger. Bien sûr, certains aspects restent à examiner, par exemple sur les transitoires, mais cela fait partie de l'instruction normale en cours aujourd'hui. Troisième élément clef, contrairement au cas de la cuve de Flamanville 3, un contrôle en fond de générateur de vapeur est possible, pour évaluer, jusqu'à une certaine épaisseur pas la totalité, la présence de défauts initiaux. En effet, pour avoir propagation de défaut, il faut un défaut initial. Jusqu'à présent, aucun défaut n'a été identifié sur les générateurs de vapeur contrôlés. C'est sur ces éléments que le dossier s'appuie. Nous avons, de nous-mêmes, proposé d'anticiper les contrôles sur les cinq autres réacteurs, car il est important de s'assurer qu'on reste dans le même cas de figure.

En fait, sur les irrégularités, nous sommes allés au bout de l'examen de la centaine de dossiers barrés, quatre-vingt-huit sur le parc en exploitation et dix-neuf sur Flamanville 3. À ce jour, mis à part celle de Fessenheim 2, pour laquelle nous devons apporter des éléments complémentaires, aucune irrégularité ne conduit à remettre en cause ou à interroger la sûreté de nos réacteurs, tout simplement parce que les industriels du secteur nucléaire prennent beaucoup de marges. Lorsqu'intervient ce genre de problème, des marges sont consommées. La question est de savoir si les marges restantes sont suffisantes, en regard de la situation. Pour les dossiers examinés, les marges sont suffisantes. Pour Fessenheim 2, ce point demande à être conforté par des éléments complémentaires.

Après, sur les irrégularités en question, comme l'a dit M. Pierre-Franck Chevet, nous contrôlons avant l'ASN. Par contre, jusqu'à présent, AREVA présentait des procès-verbaux et nous contrôlions qu'ils étaient corrects par rapport aux exigences du code. Nous contrôlions aussi le système d'organisation qualité, sans aller au-delà. Quand je disais tout à l'heure que notre système de surveillance des fabrications est améliorable, c'est là-dessus que nous travaillons. Nous avons en particulier deux pistes en vue.

Une première piste consiste à accroître l'exigence sur l'organisation du forgeron, AREVA en l'occurrence, mais cela pourrait s'étendre à d'autres fournisseurs. L'exigence pourrait porter, par exemple, sur une séparation claire des entités en charge de la fabrication et du contrôle qualité, voire la présence d'une surveillance en interne, parce que c'est la première ligne de défense. Apparemment les anomalies s'arrêtent en 2012 – mais je reste prudent car tous les dossiers n'ont pas encore été analysés au Creusot – tout simplement parce qu'à cette date le contrôle qualité a été séparé, en termes de rattachement hiérarchique, de la direction de la production. Séparer les responsabilités est essentiel, c'est ce qui se pratique dans nos centrales nucléaires où des entités sont en charge de l'exploitation, d'autres du contrôle qualité. De plus, des entités appelées mission sûreté-qualité sont en charge de réaliser des audits internes. Plusieurs couches successives de défense permettent d'assurer que si quelqu'un, à un moment donné, est défaillant, une autre organisation va rattraper et détecter cette défaillance.

Une deuxième piste consisterait à effectuer nous-mêmes, de façon aléatoire, des mesures et des prélèvements, plus ou moins nombreux, dans les processus de fabrication, pour vérifier que ces contrôles donnent les mêmes résultats que ceux réalisés par le fabricant.

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