Disons que ce n'était pas tout à fait le sens de mon propos !
Je ne m'arrêterai pas davantage sur les débats relatifs à l'écart de production et à l'effort structurel. Ils sont sans doute très importants du point de vue théorique, sur le plan européen, et dans leurs conséquences pratiques pour la mise en oeuvre d'une politique budgétaire, mais pour m'être plongé dans ces questions, j'ai constaté que beaucoup d'interprétations différentes coexistaient en la matière. La Commission européenne n'a pas la même approche que le ministère des finances français et, si j'en parle avec mes collègues de l'Eurogroupe, on trouve dix-neuf positions différentes autour de la table. Cela relativise un peu l'importance du sujet, même si je ne la minore pas. Sur le plan théorique, je comprends que le débat existe.
Pour ma part, je crois en une chose : les déficits diminuent, et il faut que cette tendance se poursuive dans des conditions qui ne soient pas contre-productives pour la croissance et l'activité du pays. Les politiques que nous avons menées à partir de 2014 avaient précisément cet objectif : avec l'autorisation de nos partenaires européens, nous avons emprunté une pente de réduction des déficits moins raide, ce qui a permis de retrouver une croissance supérieure à 1 %. Je propose que nous continuions dans cette voie. Lorsque l'on veut réduire les déficits, il faut toujours se préoccuper des conséquences que cela peut avoir sur la croissance. Nous pouvons toujours chercher à atteindre un objectif de 0,8 ou de 0,9 % en termes d'effort structurel ; si cela ramène la croissance à zéro, je ne crois pas que nous y aurons gagné grand-chose.
Plusieurs d'entre vous ont demandé que nous fassions des comparaisons internationales. Si l'on veut comprendre la différence entre la situation de la France et de l'Allemagne, il faut se souvenir qu'en 2011 le déficit de l'Allemagne était de zéro alors que celui de la France atteignait 5 % du PIB. Lorsqu'une économie passe d'un déficit nul à un déficit nul, cela lui laisse une capacité de financement considérable, alors que le passage d'un déficit de 5 % à un déficit inférieur à 3 % a indéniablement un effet restrictif, même si l'effort entrepris était nécessaire et incontournable. En 2013 et 2014, nous avons eu de mauvaises nouvelles, en particulier sur le front de la croissance, parce que la crise européenne perdurait, mais aussi parce que nous avions mis en oeuvre une politique dont les effets ont été restrictifs pour l'activité économique – elle comportait par exemple des prélèvements obligatoires supplémentaires.
Nous vous proposons aujourd'hui de continuer à diminuer les déficits tout en veillant à maintenir un soutien à l'activité à un niveau suffisant.
Madame la présidente Danielle Auroi a évoqué le cas du Portugal. Entre 2015 et 2016, le déficit du pays est passé de 4 à 2,3 % du PIB, et l'objectif visé pour 2017 est inférieur à 2 %. Je constate simplement que la tendance précédente s'est inversée depuis l'arrivée au pouvoir d'un gouvernement dirigé par un socialiste et issu d'une majorité composite, et je remarque qu'il a agi dans le cadre européen, avec les outils de maîtrise de la dépense publique. Ce qui s'est passé au Portugal est très intéressant. Quel que soit son bord politique, chacun devrait pouvoir s'en inspirer.
Monsieur de Courson, il n'y a aucune manipulation de la dette de notre part, il n'y a pas de « stratégie pour faire croire que la dette publique est maîtrisée » grâce à je ne sais quel instrument. En France, comme dans tous les pays d'Europe, les primes d'émission constituent un outil habituel utilisé dans le contexte très particulier des taux d'intérêt actuels. Si vous estimez que nous avons manipulé la dette, alors cela veut dire que tous les pays d'Europe ont fait de même. Ce n'est pas sérieux ! Il s'agit au contraire d'une démarche de bonne gestion des finances publiques. Il n'y a pas eu d'instructions données à nos services pour manipuler la dette – faites leur le crédit de penser qu'ils auraient refusé de les mettre en oeuvre !
Je ne traiterai pas aujourd'hui des conséquences budgétaires du Brexit, mais elles risquent de ne pas être négligeables. Je rappelle que la contribution du Royaume-Uni correspond à 10 milliards d'euros nets par an.
Nous nous fixons des trajectoires en loi de finances initiale, puis en cours d'année, et aujourd'hui encore avec le programme de stabilité, mais tout est dans l'exécution. Aujourd'hui, 8 milliards de crédits sont gelés parce que nous pensons qu'une réserve est nécessaire pour atteindre l'objectif fixé. Monsieur le président, tous les ans, vous citez les mêmes chiffres en tenant les mêmes raisonnements. L'année dernière votre raisonnement n'était sans doute pas faux lorsque vous annonciez qu'il manquerait 10 milliards, mais en exécution il s'est révélé inexact. Tous les ans, depuis 2014, nous atteignons la cible que nous nous étions fixée tout en respectant les règles européennes. Je propose que nos successeurs agissent de même dans les années qui viennent.