Intervention de Claude de Ganay

Réunion du 14 mars 2017 à 16h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaClaude de Ganay, député, membre de l'OPECST, rapporteur :

–Je vais vous parler quant à moi des caractéristiques et des enjeux de la recherche en l'intelligence artificielle.

La recherche privée tient une place prépondérante, y compris sur le plan de la recherche fondamentale. Cette recherche est dominée aujourd'hui par les entreprises américaines et peut-être, demain, par les entreprises chinoises. Des enseignants-chercheurs parmi les plus brillants ont été recrutés par ces grandes entreprises : Yann LeCun (Facebook), Andrew Ng (Baidu, après Google), Geoffrey Hinton (Google), Fei Fei Li (Google), Rob Fergus (Facebook), Nando de Freitas (Google)...

Les entreprises américaines dominent donc, mais la recherche et les entreprises chinoises montent en puissance. La Chine a ainsi pris la tête des publications en deep learning depuis trois ans. L'entreprise Baidu a développé le principal moteur de recherche chinois, site le plus consulté en Chine et le cinquième plus consulté au niveau mondial : indexant près d'un milliard de pages, l'entreprise dispose d'un flux de données permettant d'envisager des applications dans de nombreux domaines. Ses résultats algorithmiques sont impressionnants, malgré son existence récente. Le système de reconnaissance d'image de Baidu a ainsi battu celui de Google depuis 2015. Le recrutement du chercheur de Stanford, Andrew Ng, par Baidu en 2014 en tant que responsable de l'intelligence artificielle alors qu'il en était le responsable chez Google est emblématique. De même, en 2017, Baidu débauche Qi Lu, au poste de numéro deux, alors qu'il était auparavant vice-président chez Microsoft et directeur des projets Bing, Skype et Microsoft Office et auparavant directeur de la recherche de Yahoo.

Le 13e plan quinquennal chinois comprend une liste de quinze « grands projets » qui structurent les priorités scientifiques avec des investissements de plusieurs milliards d'euros. Ce plan vise à dynamiser la recherche chinoise en IA et à concurrencer les États-Unis. Parmi ces projets, ceux en lien avec l'IA représentent un montant de 100 milliards de yuans sur trois ans.

Autre caractéristique, l'interdisciplinarité est indispensable en intelligence artificielle, alors que la discipline demeure éclatée en une cinquantaine de sous-domaines de recherche, un tableau les décrit dans notre rapport.

Par ailleurs, la recherche en intelligence artificielle est soumise à une contrainte d'acceptabilité sociale assez forte, notamment sous l'effet de représentations catastrophistes, comme en témoignent différents sondages d'opinion, eux aussi rappelés dans le rapport.

Plusieurs interventions médiatiques et pétitions ont cherché en 2015 à interpeler l'opinion à propos des risques qui seraient inhérents à l'intelligence artificielle. L'existence d'une association française contre l'intelligence artificielle (AFCIA) est révélatrice d'un certain climat d'angoisse puisque la France serait le seul pays où une telle association existerait. L'AFCIA juge « illégitime et dangereuse la recherche scientifique visant à créer des organismes à intelligence artificielle supra-humaine » et considère que le seul moyen « d'éviter un avenir funeste pour l'humanité est d'obtenir l'interdiction légale de la recherche en intelligence artificielle à l'échelle mondiale ». Se définissant comme association de lobbying, elle vise à obtenir cette interdiction auprès des pouvoirs publics. Jacques Attali s'est, à la fin de l'année 2016, prononcé pour un moratoire sur les technologies d'intelligence artificielle, ce qui nous a beaucoup surpris.

Dernière caractéristique : la multiplication des initiatives visant la prise en compte de principes éthiques dans la recherche et les usages de l'intelligence artificielle. Cela vaut pour la recherche publique, comme pour la recherche privée, en Europe comme en Amérique.

Concernant la recherche française en IA, notre pays dispose d'importants atouts à faire valoir, même si la communauté française de l'intelligence artificielle est encore insuffisamment organisée, connue et visible. La reconnaissance internationale des travaux des chercheurs français doit beaucoup à des organismes comme Inria, le CNRS, le CEA, différentes universités et grandes écoles, par exemple l'ENS et Mines-Télécom, qui produisent des travaux à visibilité internationale. Nous décrivons dans le détail ces structures et leurs laboratoires, à l'excellence reconnue.

La France dispose d'un réseau de chercheurs très compétents et d'un tissu de start-up très dynamiques : 240 d'entre elles sont spécialisées en intelligence artificielle. Ce tissu de start-up, encouragé par l'initiative French Tech, est très riche. Selon l'investisseur en IA Paul Strachman, « La France est l'un des écosystèmes les plus vibrants en ce qui concerne l'intelligence artificielle. Malheureusement, cela n'est pas très su en dehors de la France. Et parfois même en dedans ».

Pour Mark Zuckerberg, le président de Facebook, « la France dispose de l'une des communautés de chercheurs en intelligence artificielle la plus forte du monde ». De même Mike Schroepfer, le directeur technique de Facebook, estimait en 2015 que Paris avait « la plus grande concentration de toute l'Europe en matière d'intelligence artificielle ». Facebook a préféré Paris à Londres pour ouvrir en juin 2015 un laboratoire de recherche consacré à l'intelligence artificielle ; ces recherches sont pilotées par Yann LeCun au niveau mondial.

Le bon niveau de nos étudiants a également souvent été cité. Mais nous nous inquiétons d'un phénomène de rachat de start-up et de fuite des cerveaux, voire de pillage de nos talents, lié aux conditions attractives offertes à l'étranger. Lors de son audition, Stéphane Mallat a fait valoir que depuis plusieurs années la totalité des étudiants issus des masters spécialisés de l'ENS quittaient la France aussitôt leur formation achevée. Il faut permettre à ces jeunes génies, qui sont autant de chercheurs et d'entrepreneurs en devenir, de disposer d'opportunités en France et permettre aux start-up de se développer sans être rachetées par les géants américains, chinois ou japonais dès qu'elles présentent un profil viable.

Par ailleurs, nous relevons que la communauté française de l'intelligence artificielle se constitue surtout en dehors des institutions, à travers les meetups. Le principal d'entre eux, le Paris machine learning meetup regroupe 5 205 membres. Quant à l'AFIA, comprenant environ 300 membres, elle semble assez fermée sur elle-même. Elle aurait tout intérêt à transcender ses propres limites pour relever le défi d'une intelligence artificielle française ouverte, visible et conquérante.

Au total, on voit une sous-estimation des atouts considérables de la France, mais il existe un risque de « décrochage » par rapport à la recherche internationale la plus avancée en intelligence artificielle.

Sur les impacts sociaux et économiques potentiels de l'IA, et les enjeux liés à ces questions, nous avons perçu les signes avant-coureurs de l'évolution vers une économie globalisée de « plateformes ».

On parle des « GAFA », parfois des « GAFAMI », mais il serait plus juste de parler des « GAFAMITIS » (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft, IBM, Twitter, Intel et Salesforce), des « NATU » (Netflix, Airbnb, Tesla et Uber) et des « BATX » (l'expression désignant les géants chinois du numérique, Baidu, Alibaba, Tencent et Xiaomi). Ces exemples emblématiques des bouleversements en cours sont les prémices de la place dominante et monopolistique occupée par quelques entreprises dans ce futur contexte général. Chacune de ces entreprises est entrée, selon un modèle « the winner takes it all » (« le vainqueur prend tout »), dans une course pour acquérir une position de pointe dans les technologies d'intelligence artificielle afin de tirer profit de la position dominante qui en résultera : l'accroissement significatif des investissements dans la recherche en intelligence artificielle pourrait bien conduire à une concentration horizontale progressive des grandes entreprises, voire au monopole de ces plateformes dominant une économie globalisée. On assiste à une montée en puissance significative dans les acquisitions, un tableau les décrivant figure dans le rapport.

S'agissant des bouleversements annoncés dans le marché du travail, les pronostics sont très contrastés, allant de 9 % à 47 % de disparition d'emplois. Pour le Conseil d'orientation pour l'emploi, moins de 10 % des emplois existants français apparaissent menacés par l'automatisation et la numérisation et la moitié des emplois existants est susceptible d'évoluer de façon significative. Nous pensons, quant à nous, que les études sous-estiment les évolutions de contenu des métiers et les créations d'emplois. Le solde global reste inconnu mais nous avons la conviction d'une future coopération homme-machine heureuse.

L'éducation peut être le levier et le bénéficiaire des avancées en intelligence artificielle. La relation émetteur-récepteur est transformée et modifie tant la pédagogie que les principes d'évaluation. Les moyens de prédire la réussite des élèves et d'optimiser les enseignements seront précisés par les systèmes d'intelligence artificielle qui permettront la différenciation des méthodes et des contenus enseignés, la personnalisation devant être adaptée à la diversité des élèves. Les nouvelles technologies ne seront pas en compétition avec les enseignants, elles leur seront complémentaires. Les cours en ligne ouverts et massifs, ou MOOC (massive open online courses), seront, de ce point de vue, des ressources utilisables pour appliquer ces nouvelles méthodes pédagogiques innovantes et permettre aux jeunes générations d'accéder dans des conditions optimales à la connaissance.

Nous sommes convaincus de la possibilité imminente d'une révolution bénéfique de notre cadre de vie et de l'aide aux personnes. Des changements profonds sont à venir dans la connaissance et dans le contrôle de notre environnement et de la santé des populations. Les smart grids, systèmes d'économie d'énergie par une consommation optimisée, et les smart cities (villes intelligentes) seront les expressions des bénéfices que nous pouvons tirer de l'intelligence artificielle. Et cela se traduira évidemment en matière de transports, de sécurité, de santé, de dépendance et de handicap. Notre cadre de vie, la qualité de nos vies seront améliorés par l'usage massif de technologies d'intelligence artificielle.

J'ai été étonné par les propos d'un de mes concitoyens, grand-maître de la confrérie « bérouettes et traditions » de Cernoy-en-Berry, qui m'a expliqué tous les bienfaits que les robots et les systèmes d'intelligence artificielle pourraient avoir pour la ruralité, en particulier pour les personnes âgées, isolées ou dépendantes. Le cas des voitures autonomes a été évoqué mais d'autres applications utiles vont émerger.

En matière de handicap, nous allons vers des progrès majeurs, avec les prothèses intelligentes, des exosquelettes robotisés ou avec des systèmes capables de voir des images et d'en décrire le contenu pour des malvoyants.

Les agents conversationnels ou bots, les robots de service, les agents d'assistance, d'aide à la mobilité vont progressivement cohabiter avec nous. Cela nécessitera une grande vigilance. L'éducation et la prévention sont indispensables dans ce contexte de cohabitation croissante. Et il convient d'apporter une grande attention aux logiques d'empathie et aux aspects émotionnels.

J'en viens aux questions éthiques et juridiques posées par les progrès en intelligence artificielle. Nous avons dressé le bilan des initiatives existantes et présenté toutes les propositions qui sont mises sur la table et je renvoie sur ce point à notre rapport. Il y a aussi les deux rapports issus des institutions de l'Union européenne, Parlement européen et Comité économique et social européen (CESE), les trois rapports de la Maison blanche, le rapport de la Chambre des communes du Royaume-Uni, le groupe de travail de la Royal Society, les initiatives chinoises et japonaises qui accordent une place contrastée aux questions éthiques… La stratégie du Gouvernement pour l'intelligence artificielle arrive, hélas !, un peu tard pour être intégrée dans les stratégies nationales destinées au monde de la recherche. Les éléments seront communiqués d'ici au 29 mars par le Gouvernement, nous enrichirons notre rapport en conséquence.

Nous invitons à dépasser les « lois d'Asimov » pour faire un point sur le droit de la robotique. Reconnaître une personnalité juridique des robots est une des pistes innovantes qui parcourent le débat public sur la robotique, mais nous ne sommes pas convaincus de l'intérêt de reconnaître une personnalité juridique aux robots, ce sujet n'est pas une question qui mérite d'être posée à ce stade.

S'agissant des autres aspects juridiques de l'intelligence artificielle et de la robotique, il sera loisible de conduire une réflexion et de faire de la prospective concernant la conception, la propriété intellectuelle et l'autorisation de commercialisation. Pour différents spécialistes, il n'y a pas d'urgence à combler un vide juridique béant… car il n'y a pas de vide juridique béant. Les rapports parus sur le sujet, notamment dans le monde anglo-saxon, vont dans le même sens et ne recommandent pas de mesures législatives. La protection des données personnelles et de la vie privée méritera peut-être, en revanche, d'être renforcée dans l'avenir, en s'adaptant aux nouvelles innovations. À ce stade, le droit est suffisamment protecteur.

S'agissant des voitures autonomes nous avons conduit des analyses présentées dans le rapport, le laboratoire « Moral machine » du MIT que nous avons visité travaille notamment sur les dilemmes éthiques. Les résultats provisoires des tests conduisent à identifier différents facteurs de choix : le nombre de tués (on préfère la solution qui réduit le nombre de morts), le fait de sacrifier en priorité des personnes qui transgressent les règles (exemple du voleur), le fait de sacrifier en priorité un animal contre un humain, le fait de sacrifier en priorité une personne plus âgée face à une personne plus jeune et a fortiori un enfant, le fait de sacrifier en priorité un homme face à une femme… Ce dernier point, soit dit en passant, mériterait un débat !

Sur les régimes de responsabilité, nous notons que quatre régimes pourraient trouver à s'appliquer aux accidents causés par des robots : le régime de responsabilité du fait des produits défectueux, celui de la responsabilité du fait des animaux, celui de la responsabilité du fait d'autrui, ou, encore, celui, traditionnel, de la responsabilité du fait des choses, mais qui ne s'applique que de façon résiduelle par rapport au régime de responsabilité du fait des produits défectueux.

On pourrait envisager de mettre en place une « chaîne de responsabilité », ou responsabilité en cascade. Dans la mesure où trois ou quatre acteurs sont en présence (le producteur de la partie physique du robot, le concepteur de l'intelligence artificielle, l'utilisateur et, s'il est distinct de ce dernier, le propriétaire), il est possible d'imaginer que chacun puisse supporter une part de responsabilité selon les circonstances dans lesquelles est survenu le dommage. Il sera en tout cas important d'identifier des pistes d'avenir qui ne fassent pas courir le risque de déresponsabiliser les acteurs du secteur, à commencer par les industriels de la robotique.

En outre, il conviendrait de réfléchir à la possibilité d'instituer des systèmes d'assurance spécifiques. Mais la Fédération française de l'assurance estime qu'il est encore trop tôt pour répondre à la question.

Le rapport présente le cadre national de la réflexion sur les enjeux éthiques de l'intelligence artificielle, avec la CERNA par exemple, qui joue en la matière un rôle majeur, elle a d'ailleurs produit deux rapports, dont nous rendons compte.

Comme déjà signalé dans le rapport, le positionnement de la CERNA, qui étudie les questions éthiques du point de vue de la recherche et de la technologie, est à mettre en synergie avec celui récemment dévolu à la CNIL en matière d'instruction des questions éthiques dans leur dimension plus sociétale.

Aux termes de la loi pour une République numérique, la CNIL, notre autorité de contrôle en matière de protection des données personnelles, est en effet chargée de conduire une réflexion sur les questions d'éthique liées au numérique et aux algorithmes. La CNIL a choisi d'y répondre par l'organisation en 2017 d'un cycle de débats intitulé « Les algorithmes en débat ». À l'automne 2017, la CNIL rendra publique la synthèse des échanges afin d'établir une « cartographie de l'état du débat public » et un « panorama des défis et enjeux ». Inria, à travers le projet « Transalgo », développe en 2017 de manière utile une plateforme d'évaluation de la transparence des algorithmes, afin de répondre aux préoccupations d'explicabilité des algorithmes. L'articulation et la complémentarité entre le travail de la CERNA, d'Inria et de la CNIL sont à rechercher.

Nous avons par ailleurs présenté dans le rapport les expériences de réflexion non gouvernementales sur les enjeux éthiques de l'intelligence artificielle, aux États-Unis et au Royaume-Uni, qui sont particulièrement nombreuses et se sont multipliées de façon impressionnante dans la période récente.

L'une des principales initiatives est l'Institut du futur de la vie ou « Future of Life Institute » (FLI), situé près du MIT et de Harvard, fondé en mars 2014. Il est à l'origine, en janvier 2015, de la lettre d'avertissement sur les dangers potentiels de l'intelligence artificielle. Le FLI, que nous avons visité en janvier 2017, se donne pour mission de « catalyser et soutenir la recherche et les initiatives visant la sauvegarde de la vie et proposant une vision optimiste de l'avenir ». Il s'agit de « tirer le meilleur profit des nouvelles technologies et de prévenir les risques potentiels pour l'humanité du développement de l'intelligence artificielle ». Lors d'un colloque à New York sur les défis posés par l'émergence de l'intelligence artificielle, organisé le 14 octobre 2015 par l'Institut de recherche sur la criminalité et la justice des Nations unies (Unicri), Max Tegmark était invité avec un autre expert à s'exprimer devant quelque 130 délégués. Tous deux ont clairement souligné les risques liés à l'intelligence artificielle et appelé à la mise en place d'une réflexion solide sur l'éthique de l'intelligence artificielle. Le second expert était Nick Bostrom, le fondateur du Future of humanity Institute (FHI) en 2005 à l'Université d'Oxford ; il a également fondé, dès 2004, un Institute for ethics and emerging technologies (IEET), proche du mouvement transhumaniste.

De manière similaire au Future of humanity Institute, ont été créées plusieurs structures qui travaillent ensemble en réseau, au sein de l'Université de Cambridge : un Centre for the Study of Existential Risks (CSER) créé en 2012, un Leverhulme Centre for the Future of Intelligence créé en 2016 et, au sein de l'Université de Berkeley, un Machine Intelligence Research Institute (MIRI).

Les anciens dirigeants de Paypal, Elon Musk (actuellement patron de Tesla et SpaceX) et Sam Altman ont fondé, le 11 décembre 2015, la fondation « Open AI » dans le but de promouvoir l'intelligence artificielle éthique et ouverte. Nous avons visité cette fondation basée dans la Silicon Valley et rencontré ses responsables. Le dernier exemple, peut-être le plus significatif, est le « Partnership on AI » formé en septembre 2016 par Google, Microsoft, Facebook, IBM et Amazon afin de réfléchir de manière collective. Vos rapporteurs se sont réjouis du fait qu'Apple a rejoint cette initiative le 26 janvier 2017.

Le rapport « L'intelligence artificielle et la vie en 2030 » publié en septembre 2016 par l'Université Stanford dévoile les résultats de l'étude « One Hundred Year Study of Artificial Intelligence », un projet universitaire débuté en 2014 et initié par Eric Horvitz, chercheur au laboratoire Microsoft Research.

Dans la foulée et puisqu'il n'existait aucun guide commun de bonnes pratiques dans le domaine de l'intelligence artificielle, plusieurs spécialistes de l'intelligence artificielle et de la robotique se sont réunis lors de la conférence « Beneficial AI 2017 » organisée par le Future of Life Institute. La conférence s'est tenue à Asilomar, en Californie du 5 au 8 janvier 2017. Les participants ont adopté vingt-trois principes baptisés « Les vingt-trois principes d'Asilomar », guide de référence pour l'encadrement éthique du développement de l'intelligence artificielle.

Nous nous interrogeons sur les objectifs précis des GAFAMI et d'Elon Musk à travers ces nombreuses initiatives, qui donnent une place trop grande au risque de l'émergence d'une IA forte qui dominerait et pourrait faire s'éteindre l'espèce humaine. La volonté de ces nouveaux géants pourrait-elle être de se dédouaner ou de créer un nuage de fumée pour ne pas parler des vrais problèmes éthiques posés à court terme par les technologies d'intelligence artificielle, telles que l'usage des données ou le respect de la vie privée ? Vos rapporteurs n'ont pas tranché et laissent aux auteurs de ces initiatives le bénéfice du doute.

Nous soulignons enfin l'important travail en cours sur les enjeux éthiques au sein de l'association mondiale des ingénieurs électriciens et électroniciens (Institute of Electrical and Electronics Engineers ou IEEE), qui regroupe plus de 400 000 membres. Son initiative mondiale pour « les considérations éthiques dans l'intelligence artificielle et les systèmes autonomes » a pour objectif de proposer un cadre éthique pour les systèmes d'intelligence artificielle et des systèmes autonomes. Une première version du document a été publiée en décembre 2016, avec l'idée d'une discussion d'ici à l'été 2017 et la diffusion d'une deuxième version consolidée à l'automne 2017.

Alors que toutes ces initiatives sur l'éthique sont menées, nous constatons une sensibilisation insuffisante du grand public aux questions posées par l'intelligence artificielle et les systèmes autonomes. Les traitements médiatiques de ces questions restent le plus souvent sensationnalistes voire alarmistes, alors qu'une information objective serait souhaitable. La vision déjà tronquée du grand public, sous l'effet des oeuvres de fiction, et en particulier du cinéma, n'est pas améliorée par la lecture de la plupart des articles disponibles sur l'intelligence artificielle dans nos journaux et magazines.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion