Intervention de Jacques Creyssel

Réunion du 4 juillet 2012 à 16h15
Commission des affaires économiques

Jacques Creyssel, délégué général de la Fédération du commerce et de la distribution :

La FCD rassemble, je le rappelle, la majeure partie des enseignes dites « alimentaires » ainsi que d'autres enseignes spécialisées : cela représente dix millions de clients par jour, 750 000 emplois, 30 000 points de vente et 50 000 jeunes recrutés chaque année, souvent avec de faibles qualifications, et ce partout en France.

Notre constat, c'est que la consommation est très largement liée à l'activité économique ; elles se renforcent mutuellement. Aujourd'hui, le poids des dépenses contraintes augmente, et celui de l'alimentation a donc tendance à diminuer – sans que l'on sache d'ailleurs s'il faut y voir un changement générationnel ou le simple remplacement d'un type de dépense par un autre. Nous constatons, depuis quelques mois, une forte diminution de la consommation non alimentaire et même, depuis trois mois, une baisse de la consommation alimentaire.

Comment faire pour inverser cette tendance ? Nous sommes des optimistes et nous pensons que notre secteur peut être un vecteur puissant de croissance de la consommation : notre métier, c'est d'abord d'offrir des produits et par ailleurs nous exerçons, de par notre poids, une forte influence sur l'ensemble de l'activité économique, ne serait-ce que par les très nombreux emplois que je soulignais à l'instant.

J'évoquerai trois sujets : le développement de l'offre ; la maîtrise des prix ; l'amélioration de la qualité.

Le développement de l'offre renvoie à plusieurs questions. Comment, d'abord, continuer à développer les magasins ? De ce point de vue, l'annonce, faite pendant la campagne électorale, d'une stabilité de la législation sur l'urbanisme commercial au cours des prochaines années nous paraît une bonne chose. Une deuxième question porte sur l'ouverture des magasins, notamment le dimanche ou le soir. Cela correspond à un besoin des consommateurs, et cela a des conséquences sur le chiffre d'affaires et le niveau global de la consommation. C'est un sujet délicat, mais il faut l'aborder sous l'angle de l'emploi, de la consommation, et de la satisfaction des besoins des consommateurs. Il faut également se poser la question de l'ouverture à la concurrence de nouveaux types d'activité : une organisation de consommateurs, l'UFC-Que choisir, a récemment pris position en faveur de la vente de produits parapharmaceutiques et de produits pharmaceutiques vendus sans ordonnance dans les grandes et moyennes surfaces, ce qui pourrait contribuer à faire baisser les prix. Voilà un sujet sur lequel il faut travailler et sur lequel nous pouvons avancer ensemble. Enfin, comme M. Merlière l'a dit tout à l'heure, il faut s'interroger sur le service, sur de nouveaux services : cela pose, très clairement, la question du coût du travail, et notamment du travail peu qualifié, et renvoie au sujet des allégements de charges. À l'évidence, si l'on augmente les charges, on n'aura pas ces services nouveaux. Il faut en être conscient. Vous le voyez, j'ouvre là beaucoup de débats !

Maîtriser les prix, cela veut dire pour nous qu'il ne faut absolument pas remettre en cause la négociabilité des prix et des tarifs, qui est un des acquis fondamentaux de la LME : il est tout à fait clair que cela a permis de maîtriser les prix, voire de les diminuer, et donc de redonner du pouvoir d'achat aux consommateurs – il ne faut surtout pas revenir en arrière sur ce point. Cela veut dire aussi qu'il faut essayer de travailler, tous ensemble, sur la volatilité des prix, notamment en matière agricole. C'est un sujet qui concerne tout le monde : il faut notamment avancer sur la contractualisation entre les filières agricoles, sujet difficile dont j'ai souvent l'occasion de discuter avec Xavier Beulin, président de la FNSEA. En effet, d'un côté, une augmentation du prix des céréales se traduit par une augmentation assez forte du prix des aliments ; de l'autre, cette hausse engendre des coûts supplémentaires, par exemple pour les éleveurs. Une solution au moins partielle pour éliminer ou en tout cas limiter cette volatilité consisterait à développer la contractualisation, la couverture. C'est un sujet majeur dont les pouvoirs publics doivent absolument s'emparer. Enfin, la maîtrise des prix suppose une plus grande transparence de la part de tous les acteurs : nous avons ainsi récemment publié, et cela ne s'est fait dans aucun autre pays, ni aucun autre secteur, les marges nettes qui existent par rayon sur la boucherie, sur la charcuterie, sur les fruits et légumes. Ce document infirme un certain nombre d'idées reçues, en démontrant par exemple que sur les fruits et légumes, comme sur la boucherie, nous ne gagnons en réalité pas d'argent ; en revanche, dans d'autres secteurs comme les produits laitiers ou la charcuterie, où les charges de personnel sont moindres, nous gagnons effectivement de l'argent. La marge globale est au final de 1,4 %. Cette transparence est très intéressante et, j'en suis sûr, sera très positive pour la consommation.

Sur la qualité, enfin, je rejoins ce que disait Mercedes Erra sur le « consommer mieux ». Incontestablement, nous devons agir sur de nombreuses consommations pour améliorer la qualité : ainsi, la consommation de fruits et légumes a reculé l'année dernière, et nous devons absolument repartir de l'avant. Cela veut dire que nous devons travailler en filières, en filières par produit, en filières agro-alimentaires. Nous devons être capables de nous réunir – agriculteurs, industriels, distributeurs – pour travailler ensemble en ce sens. Nous nous y essayons. C'est un enjeu gigantesque pour les années à venir. Cela suppose que nous développions nos relations commerciales avec les PME, notamment les PME françaises, qui sont géographiquement proches des magasins. Nous nous y essayons là aussi car une très grande partie des produits commercialisés sous marques de distributeurs (MDD) sont réalisés par des PME françaises. Il faut sans doute aller plus loin encore pour développer la qualité – dont les marques de distributeurs sont souvent aujourd'hui un des importants vecteurs, ce qui permettra d'augmenter la consommation, chose importante pour nous tous.

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