Intervention de Didier Migaud

Séance en hémicycle du 12 février 2013 à 15h00
Dépôt du rapport annuel de la cour des comptes

Didier Migaud, Premier président de la Cour des comptes :

Elle propose que le bénéfice du tarif agents – la fourniture d'électricité à très bas prix pour les agents – soit plafonné et que ses modalités d'évaluation soient conformes aux règles de droit commun applicables aux avantages en nature en matière fiscale et en matière sociale. Elle recommande également que les rémunérations des cadres dirigeants tiennent mieux compte de leur performance individuelle et collective.

L'examen par la Cour de la réforme de l'Audiovisuel extérieur de la France montre une évolution chaotique et une dérive financière, alors qu'un dispositif plus cohérent, lisible et efficient était attendu de la fusion de France 24, Radio France International, TV5 Monde et Monte-Carlo Doualiya. Au contraire, cette fusion inachevée a entraîné d'importants surcoûts. Il importe de définir une stratégie réaliste par rapport aux contraintes des finances publiques, et de mettre en oeuvre les mutualisations attendues en surmontant les blocages.

Le rapport prend aussi l'exemple des dépenses de communication de la SNCF. Il révèle des infractions aux règles de la commande publique et certaines opérations dispendieuses. Quelques illustrations figurent dans le rapport.

Vous le constatez : les possibilités d'économies concernent l'ensemble des acteurs publics. Elles tiennent parfois aux imperfections de la gestion, mais également souvent au mauvais ciblage des interventions publiques. La Cour constate très fréquemment que le territoire retenu pour une action publique n'est pas le plus pertinent, ou que les bénéficiaires d'une prestation ne sont pas uniquement ceux qui en ont le plus besoin. Pour arroser quelques parterres de fleurs, on irrigue l'ensemble du jardin. Certains chapitres du rapport mettent en évidence le besoin d'une action publique mieux centrée sur les territoires pertinents. Je citerai brièvement trois exemples tirés du rapport.

L'étude du projet de LGV Est reliant Paris à Strasbourg a entraîné une compétition entre les collectivités qui ont financé le projet, conduisant à des choix d'investissement contestables. Par exemple, la construction de la gare TGV Lorraine en un lieu inapproprié a conduit les autorités à envisager la construction, à quelques kilomètres seulement, d'une autre gare qui serait, elle, reliée au réseau ferré régional.

Le chapitre sur les restructurations hospitalières met en évidence trois exemples de difficultés à regrouper des structures hospitalières dont l'activité est trop faible. Ces projets ont pu conduire à des dérives financières, comme à Perpignan, ou à des décisions incohérentes, comme dans la vallée de la Tarentaise, ou encore dans les Deux-Sèvres où trois hôpitaux proches, de faible activité, pourraient coexister avec un quatrième hôpital conçu à l'origine pour les regrouper entièrement.

Dans le cas du Mont Saint-Michel, le désengagement de l'État au profit d'un syndicat mixte, aux faibles effectifs et ne disposant pas des compétences adéquates, a entraîné de nombreuses déficiences dans la réalisation du projet de restauration du caractère maritime du Mont, concernant notamment le transport des visiteurs entre le parking et le site.

Les défauts de ciblage ne sont pas seulement territoriaux : ils concernent souvent le versement de prestations sociales ou de subventions. Les exemples des aides à la presse ou des débitants de tabac, que j'ai déjà évoqués, l'illustrent. C'est également le cas du RSA activité, que la majorité des bénéficiaires potentiels ne sollicitent pas, faute notamment d'une bonne coordination entre le RSA et la prime pour l'emploi.

Pour améliorer la qualité et l'efficience de la gestion, il convient également de réformer des organisations administratives dont la complexité limite la performance. Le rapport cite les deux exemples de la distribution d'électricité, qui repose sur une multitude de concessions souvent de très petite taille, et de la politique de délivrance aux étrangers de visas et de titres de séjour.

Pour mener à bien les réformes nécessaires – rationalisations, reciblages et simplifications –, une action déterminée et continue est essentielle. La Cour et les chambres régionales et territoriales le constatent lorsqu'elles examinent les conséquences tirées de leurs contrôles. Elles cherchent à rendre leurs travaux aussi utiles que possible. Sans vouloir limiter leur rôle à celui d'un outil de transparence au service de l'information du citoyen, les juridictions financières se considèrent également comme des initiateurs et des accompagnateurs de réformes. Elles s'efforcent d'associer à leurs constats et critiques des recommandations formulées en des termes les plus opérationnels possible. L'objet du tome II du rapport public annuel est de rendre compte des enquêtes de suivi de ces recommandations menées en moyenne trois années après un rapport public de la Cour, conformément à la volonté exprimée par le législateur.

Sur de nombreux sujets, vous verrez que les recommandations de la Cour ont été entièrement suivies, ou presque. C'est l'objet de la première partie de ce tome, identifiée par un onglet vert. Ainsi, la Cour et les chambres régionales et territoriales ont constaté des progrès dans la gestion du service de santé des armées, du port autonome de la Guadeloupe et de la commune d'Hénin-Beaumont. Plus généralement, 71 % des recommandations des trois dernières années sont totalement ou partiellement suivies d'effet.

La Cour a identifié neuf sujets sur lesquels la prise en compte de ses recommandations était insuffisante : il en est ainsi, par exemple, de l'encadrement des rémunérations dans le secteur bancaire…

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