S'agissant du seizième rapport du Haut Comité portant sur les FTM, il faut distinguer deux types de population : les personnes originaires du Maghreb et celles originaires de l'Afrique subsaharienne – qui sont moins concernées par le problème du vieillissement que par celui de la suroccupation des logements.
Pour les immigrés originaires du Maghreb, les foyers présentent l'avantage d'être économiques et d'apporter un cadre de vie collective, ce qui est fondamental pour des personnes seules. Nous avons peu d'éléments statistiques à leur sujet par comparaison avec la population du logement locatif social – nous avons d'ailleurs dû nous référer à une enquête de 1999 : cette lacune devrait être corrigée, surtout dans l'optique retenue de transformer ces foyers en résidences sociales visant à accueillir des publics en difficulté.
Ces personnes, qui ont travaillé le plus souvent dans les secteurs du bâtiment et travaux publics, de la métallurgie ou de l'automobile, disposent de faibles ressources, et ont parfois de grosses difficultés à présenter l'ensemble des documents nécessaires à la reconstitution de leur carrière afin d'obtenir une pension de vieillesse. Beaucoup continuent d'envoyer de l'argent dans leur pays d'origine.
Nous nous sommes interrogés sur les raisons de leur décision de rester en France : est-ce le fait d'une contrainte, d'un choix, ou de la nécessité de continuer à effectuer des allers retours entre la France et le pays d'origine ?
La condition de résidence pour bénéficier des minima sociaux pose problème : elle est fixée à six mois pour l'ASPA et se double d'une condition d'occupation du logement de huit mois pour l'APL. On pourrait réfléchir à une évolution de la réglementation dans ce domaine. S'il existe des expériences de chambres « navette » dans certains foyers, nous souhaitons que la location alternée, qui se pratique en marge du cadre juridique, puisse être formellement prévue pour tenir compte de ces allers retours.
À présent, les foyers, qui ont vieilli et qui n'étaient pas conçus pour loger de façon permanente les résidents qui s'y trouvaient, doivent être réhabilités.
Se pose par ailleurs le problème, pour les résidents des foyers, de l'accès aux aides relatives au maintien à domicile : il y a des résistances psychologiques de la part des résidents et une méconnaissance, par les services d'aide à domicile, de leurs conditions de vie. Il existe toutefois d'intéressantes expériences de terrain, fondées sur la nécessaire collaboration entre les gestionnaires des foyers et ces services. Nous avons donc proposé de développer les interventions de médiation pour faciliter l'accès des résidents âgés aux prestations d'aide au maintien à domicile.
Se pose également pour certains la question de l'accès aux établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) : en dehors de l'obstacle du prix, des résistances culturelles et psychologiques existent. Nous avons fait état dans le rapport d'une ou deux expériences d'EHPAD dédiés à ce public, qui n'ont guère été concluantes. Il en est ainsi de l'EHPAD de Colombes.
En ce qui concerne la restructuration des foyers, le plan de traitement des FTM a pris un retard considérable, en raison d'obstacles importants. D'abord, la réhabilitation se traduit par une augmentation significative de la surface des logements. Ensuite, se pose un problème de financement pour les gestionnaires, qui doivent rentabiliser leurs investissements. Enfin, on se heurte au montant de la redevance supportée par les résidents, du fait de la faiblesse de leurs revenus et de leur volonté de continuer à envoyer de l'argent dans leur pays d'origine. Les plafonds de redevance autorisés sont inabordables pour ces populations, aussi bien pour les personnes bénéficiant de l'APL que pour celles qui ne peuvent y prétendre au vu de leurs ressources, et dont le taux d'effort peut atteindre 40 %. Nous estimons que les loyers ne sont abordables que s'ils sont inférieurs de 20 % à ces plafonds.
Il y a donc un besoin de fonds gratuits importants. Les foyers que nous avons étudiés bénéficient d'un taux de subvention de 40 %. L'État apporte une aide dans le cadre du prêt locatif aidé d'intégration (PLAI) à hauteur de 25 %, avec parfois une subvention de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU). On note également une mobilisation de plus en plus importante des collectivités territoriales, qui ont financé 17 % du coût des restructurations au cours des dernières années.
Nous avons proposé que ce plan de traitement, qui est ancien, soit réaffirmé par voie de circulaire, soutenu au plan national et étendu à l'ensemble des foyers nécessitant une adaptation. Il ne doit plus être limité à ceux qui se trouvent dans les situations les plus critiques.
À cet égard, l'inscription des foyers dans les territoires constitue un enjeu important. Historiquement, ces foyers ont été imposés aux collectivités territoriales – en tout cas, cela a été souvent vécu ainsi – et relégués aux frontières des villes, même si l'urbanisme s'est ensuite étendu. Mais les collectivités se sont plus fortement engagées en faveur des politiques de l'habitat et prennent globalement en compte ces questions. En tout état de cause, leur soutien est indispensable.
En outre, il y a lieu d'intégrer les besoins de ces populations dans les plans gérontologiques et l'ensemble des interventions sanitaires et sociales locales.