Intervention de Gilles Goulm

Réunion du 6 février 2013 à 10h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Gilles Goulm, secrétaire général de la Fédération syndicale Force ouvrière de la défense, des industries de l'armement et des secteurs assimilés, FO Défense :

La question du nombre de salariés syndiqués se pose dans des termes comparables à celle du nombre d'électeurs par rapport au nombre d'adhérents aux partis politiques.

Le nombre d'adhérents aux syndicats soulève le problème de leurs moyens d'existence et non de leur représentativité puisque les personnels civils du ministère de la défense participent à plus de 80 % aux élections professionnelles.

Les taux d'adhésion restent tenus secrets par les syndicats mais on peut estimer que 10 à 15 % des personnels que je représente sont syndiqués. Il existe donc d'importantes possibilités de développement pour nos organisations, y compris dans le secteur privé. Mais nous restons hostiles à toute forme d'adhésion plus ou moins obligatoire, comme cela existe dans les pays nordiques.

En tant que syndicat, nous nous interdisons généralement de nous exprimer sur la politique de défense. En outre, peu de personnels civils sont employés dans la maintenance opérationnelle. Nous savons cependant que le Famas soulève quelques problèmes : c'est un fusil vieillissant, qui rouille très facilement et dont les munitions, bleuissant sous la pluie, ne peuvent plus ensuite enter dans les chargeurs.

Le fusil d'assaut devant le remplacer, HK 416, est de fabrication allemande. Comment faire autrement ? Voilà des années qu'on détruit la capacité de notre pays à produire lui-même ses armes d'assaut et de poing. Il ne nous reste plus, dans ce secteur, qu'une seule entreprise survivant péniblement à Molsheim.

La fermeture de la manufacture du Mans s'inscrit hélas dans ce processus.

Nous sommes donc condamnés à nous approvisionner « sur étagères » à l'étranger.

La vie quotidienne des agents du ministère de la défense se dégrade pour de bon. Je n'ai rien exagéré. On peut faire les mêmes constats sur presque toutes les bases de défense et pour presque tous les régiments. Lors de chaque déplacement du ministre, son cabinet nous interroge sur les thèmes de préoccupation des personnels civils et, à chaque fois, les mêmes sujets pratiques reviennent. On manque de tout, faute de crédits. Le problème ne cesse de s'étendre, il ne faut pas le minimiser.

Le délégué général à l'armement (DGA) nous a confié qu'il restait prudent face à la mutualisation des fonctions de soutien à travers les bases de défense. Car il craint de voir se dégrader le soutien de qualité dont bénéficient aujourd'hui ses différents établissements. J'ai pu le vérifier, par exemple, au centre d'essais aéronautiques de Toulouse (CEAT).

N'ajoutons pas à la situation déjà difficile des personnels du fait des restructurations, des salaires et des régimes indemnitaires, des tracas quotidiens aussi pénibles qu'humiliants.

Les fonctions de soutien et de maintenance qu'assurent les personnels civils sont effectivement prises entre l'exigence de souplesse de gestion et le recours à des personnels contractuels. Mais c'est souvent en raison du manque d'effectifs que les commandants de base recourent, contre leur gré, à l'externalisation.

L'armée de terre vient de lancer une magnifique campagne de recrutement de 10 000 personnels militaires mais hélas mensongère. Combien d'entre eux seront affectés à des unités combattantes et combien seront employés à des tâches de secrétariat ? Regardez combien l'armée de l'air a recruté de secrétaires militaires il y a quelques mois ! Et combien de jeunes militaires des bases aériennes partiront en opérations extérieures ?

En outre, le recours à des prestataires privés ne coûte pas nécessairement moins cher que des personnels civils permanents. Si c'était vrai, le ministère de la défense ne s'apprêterait pas à racheter 18 000 véhicules après en avoir externalisé 22 000, contre l'avis des organisations syndicales et contre celui de membres du cabinet du ministre de l'époque, Mme Michèle Alliot-Marie : la décision fut imposée de Matignon. Manquent les 390 millions d'euros qui seraient nécessaires pour un nouveau marché externe, alors que nous avons aussi supprimé nos capacités de maintenance des véhicules : un bel exemple de gabegie !

Nous avons heureusement réussi, au cours des cinq dernières années, à freiner un peu le processus. Il est vrai qu'un grand défenseur de l'externalisation fut le ministre Alain Richard. Dans la fonction restauration, hébergement, loisirs (RHL), nous avons réussi à démontrer que d'importantes économies seraient réalisées par le recours – que nous appelons la régie rationalisée - aux personnels civils du ministère : 60 d'entre eux accomplissent le même travail que 100 militaires, compte tenu des disponibilités respectives eu égard à la nature des postes. Nous avons été suivis, et il en est de même pour la bureautique.

Tous les ministres successifs ont prétendu n'avoir aucun dogme sur l'externalisation : ce ne sont pas eux les plus dangereux mais ceux qui les entourent, y compris parmi les militaires, et certains grands industriels qui ont leurs entrées privilégiées…

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