Je savais que vous vous montreriez particulièrement intéressés par la question du financement. Nous n'avons certes pas pu répondre à tous les problèmes, non plus qu'à toutes vos interrogations.
En préambule, il existe un vrai potentiel et je ne suis pas absolument certaine que nous en ayons pris l'exacte mesure. C'est pourquoi l'une de nos premières propositions vise à réaliser une étude macro-économique sur les questions énergétiques. Je vous rappelle qu'un euro investi dans la lutte contre la précarité énergétique fait économiser quarante-deux centimes de frais de santé. Je le répète : la deuxième source de financement, après l'efficacité énergétique, c'est la lutte contre le gaspillage, dont nous sommes loin d'avoir pris en compte l'ampleur. Il s'agit là d'un enjeu considérable, dans le secteur public comme dans le privé.
La fixation des normes dans l'industrie revêt une grande importance. À ce propos, je vous invite à lire la page de notre avis consacrée aux moteurs montrant que 70 % d'entre eux sont surdimensionnés.
Jusqu'à présent, le tiers investissement n'a pas été un succès absolu et je comprends vos doutes. Néanmoins, nous n'avons pas été au bout de ses potentialités. Les parties prenantes doivent réfléchir et innover. Des expérimentations sont en cours – vous avez parlé des SEM – mais elles sont rapidement impuissantes faute d'effet de levier. Si, demain, nous disposons d'un véritable programme d'investissement en faveur de l'efficacité énergétique, nous pourrons bénéficier de taux bonifiés et la situation sera incomparable à celle d'aujourd'hui. Il en est de même s'agissant des contrats de performance énergétique. Il n'y a aucune raison pour que de véritables contrats – où les mêmes ne vendent pas forcément à la fois la performance énergétique et l'énergie – connaissent l'échec dans notre pays alors qu'ils ont fait leurs preuves ailleurs.
Nous n'avons pas pu traiter l'ensemble de la fiscalité écologique, précieux outil auquel je souscris à titre personnel. Quoi qu'il en soit, nous avons besoin de l'éco-conditionnalité des aides publiques. Il n'est plus possible de distribuer l'argent public sans assurance de l'efficacité des résultats obtenus.
J'approuve les propos tenus sur l'opacité des CEE mais, comme M. Denis Baupin, nous ne souhaitons pas pour autant qu'ils soient purement et simplement abolis. Il faut les réviser car, s'ils restent à ce point abscons, ils ne fonctionneront pas. Les consommateurs sont perdus et constatent des effets d'aubaine incompatibles avec une réelle efficacité énergétique. Des contrôles s'imposent. Il n'est pas question d'usines à gaz mais, si éco-conditionnalité il y a, des vérifications doivent s'effectuer comme dans d'autres pays.
Aujourd'hui, les banques contrôlent la délivrance de l'éco-PTZ ; il n'est pas possible qu'elles maîtrisent les éléments techniques de ces dossiers. Chacun son métier ! C'est une faille de ce dispositif, certes, mais là encore il ne faut pas pour autant s'en débarrasser. En Allemagne, une partie du prêt est dédiée à l'intervention d'artisans formés ou d'organismes certificateurs pour évaluer l'efficacité énergétique d'un projet.
Il est difficile de prévoir l'augmentation future du coût de l'énergie, sur laquelle s'accordent tous les acteurs reçus. Néanmoins, cette perspective nous encourage à promouvoir une efficacité énergétique qui, à ce jour, n'a jamais été vraiment mise en oeuvre.
Je serais incapable de vous dire ce qu'il en est précisément de la filière bois mais il est certain que son potentiel industriel est important. Les professionnels et les consommateurs sont demandeurs de normes. Il faut que le neuf et l'ancien travaillent ensemble, celui-ci ne bénéficiant pas suffisamment des avancées technologiques de celui-là.
En matière de financement, nous devons faire preuve d'imagination. Le Grenelle de l'environnement n'a pas plus financé l'efficacité énergétique que les politiques postérieures, même si un certain nombre de choses ont été accomplies. Nous avons besoin d'innover, dans le dialogue et l'écoute, car si l'efficacité énergétique constitue bien la première source d'énergie domestique de 2020, nous devrons investir non seulement sur les économies réalisées mais sur la valeur verte ainsi créée. Je le répète : il ne s'agit pas tant de savoir combien économiser en usant de tel ou tel outil que de concevoir une vision macro-économique et sociale.
S'agissant de la précarité énergétique, précisément, renforcer le lien social est une priorité particulièrement soulignée dans notre avis. Les personnes en difficulté doivent être accompagnées mais, si les lignes budgétaires existent, nous ne disposons pas forcément du nombre idoine de salariés pour aller en ce sens. Ce n'est pas une campagne de publicité sur la lutte contre la précarité énergétique qui fera se déplacer les personnes concernées. Le guichet unique constituera sans doute une avancée mais, de même, ce ne sont pas forcément ceux qui en auront besoin qui s'y rendront. Pour parler clairement, il faut accroître les ressources humaines. Je cite notre recommandation : « Le CESE considère que cette action de repérage et d'accompagnement des populations concernées impose des ressources humaines à la hauteur des ambitions et donc les budgets correspondant ainsi qu'une meilleure coordination des acteurs. » Cela nous semble primordial pour créer ce lien social. Le programme « Habiter mieux » concerne aujourd'hui 300 000 logements, et il est très loin de répondre aux besoins. Faute de ressources humaines, l'augmentation des budgets – si elle est possible… – ne permettra pas d'accélérer la mise en oeuvre des projets.