Monsieur Marleix, il y a déjà eu un changement à Marseille. Cela étant, je vous parle de Paris puisque M. Larrivé qui, sur ce point, connaissait, lui, le texte, m'a interpellé sur Paris.
La jurisprudence du Conseil constitutionnel quant au respect du principe d'égalité est très claire : depuis sa décision du 7 juillet 1987 sur la loi modifiant l'organisation administrative et le régime électoral de la ville de Marseille, le Conseil constitutionnel réaffirme régulièrement que l'organe délibérant d'une commune de la République doit être élu sur des bases essentiellement démographiques résultant d'un recensement récent.
C'est ce principe que le Gouvernement s'emploie à respecter en procédant à une nouvelle répartition des sièges entre les arrondissements parisiens.
Le tableau qui est annexé au projet de loi que vous allez examiner a ainsi tenu compte du dernier recensement de la population parisienne disponible lors de l'élaboration du projet de loi, comme l'exige le Conseil constitutionnel dans la décision que je viens de citer.
Ainsi, les 7e, 16e et 17e arrondissements, qui ont respectivement perdu 14,9 %, 5,6 % et 0,6 % de leur population entre 1982 et 2012, perdent un siège. À l'inverse, les 10e, 19e et 20e arrondissements, qui ont respectivement connu une augmentation de leur population de 10,3 %, 13,6 % et 14,6 %, se voient attribuer un siège de plus.
Ainsi, dans les arrondissements comptant plus de trois sièges de conseillers de Paris, le Gouvernement a amélioré les écarts de représentativité entre les sièges. Par exemple, avec les chiffres du dernier recensement – publiés au 1er janvier 2013 par l'INSEE –, dans les arrondissements comptant plus de trois sièges de conseillers de Paris, le Gouvernement a amélioré les écarts de représentativité entre les sièges. Par exemple, dans le 7e arrondissement, l'écart à la moyenne passe de - 16 % à +5 %. Il passe de + 15 % à -1 % dans le 10e arrondissement, de - 4 % à + 4 % dans le 16e arrondissement, - 5 % à + 3 % dans le 17e arrondissement, de 13 % à 4 % dans le 19e arrondissement, enfin de 10 % à 2 %, dans le 20e arrondissement.
Or c'est notamment l'amélioration des écarts de représentativité que le Conseil constitutionnel et le Conseil d'État prennent en compte dans l'appréciation des redécoupages législatifs ou cantonaux. Ils acceptent par ailleurs des exceptions au principe d'égalité démographique si elles sont justifiées par un principe d'intérêt général.
Certes, il demeure des écarts de représentativité puisque le Gouvernement a souhaité reprendre la méthode de répartition qui avait été retenue par le législateur en 1982. Mécaniquement, les arrondissements disposant du nombre plancher de conseillers de Paris – c'est-à-dire trois sièges de conseillers – présentent un écart de représentativité plus important.
Conscient de ces écarts, le Gouvernement a toutefois estimé qu'il était nécessaire de conserver cette méthode qui est la seule à même de maintenir un mode de scrutin uniforme au sein du Conseil de Paris. Une répartition proportionnelle sur deux sièges n'aurait aucun sens. Sur ce point, le Gouvernement a noté que, dans sa décision du 7 juillet 1987 sur la répartition des sièges à Marseille, monsieur Marleix, le Conseil constitutionnel avait indiqué qu'il validait la répartition marseillaise, entre autres, puisque demeurait applicable à l'élection des conseillers municipaux un même mode de scrutin.
Par ailleurs, l'attribution d'un plancher de deux sièges ne permettrait pas non plus de respecter les limites de plus ou moins 20 % dans les arrondissements parisiens, sauf à fusionner des arrondissements entre eux, ce que le Gouvernement s'est refusé à faire, d'autant qu'il est tenu par la loi du 7 décembre 1990 qui interdit de redécouper des circonscriptions électorales moins d'un an avant une élection.
Au total, le Gouvernement a donc préservé l'unité du mode de scrutin parisien, tout en améliorant, dans l'ensemble des arrondissements concernés, les écarts de représentativité entre les conseillers de Paris. Le seul débat qu'il pourrait y avoir entre nous, mesdames et messieurs de l'opposition, c'est pourquoi vous ne l'avez pas fait.
Le redécoupage de la carte cantonale, « à la main du Gouvernement », pour reprendre l'expression employée à l'occasion du projet de loi, semble inquiéter profondément la droite.
L'opposition semblait pourtant plus sereine, en s'apprêtant, à l'issue du vote de la loi de réforme des collectivités territoriales le 16 décembre 2010, à refondre également la carte cantonale. Il ne me semble d'ailleurs pas que le gouvernement de l'époque ait jugé utile de s'entourer de la commission indépendante aujourd'hui réclamée.
Alors que vous réclamez une « commission indépendante composée de personnalités éminentes» – votre référence étant la commission indépendante présidée par M. Guéna au moment du découpage législatif –, vous mettez en doute, avec le recours du Gouvernement au Conseil d'État, l'indépendance et l'impartialité d'une institution qui n'a jamais fait défaut. Venant de vous, cela peut paraître étrange. Le Conseil d'État a été conduit à donner son avis sur les critères qui devaient guider le redécoupage et il sera amené à examiner chacun des projets de décrets pour chaque département remodelé. Il pourra enfin être amené à les examiner au contentieux. Son rôle dans le découpage est donc très significatif.
Par ailleurs, le Gouvernement a pris la peine, dans le projet de loi qui vous est soumis, de préciser les critères selon lesquels les opérations de redécoupage seront conduites. Ces critères découlent de la jurisprudence du Conseil constitutionnel et du Conseil d'État, confirmée par l'avis que le Gouvernement a demandé au Conseil d'État.
Ces critères ne sont donc ni surprenants, ni « brutaux » comme l'a écrit M. Larrivé dans son intervention. Ils résultent des principes constitutionnels d'égalité devant la loi posés par l'article 1er de la Constitution et d'égalité devant le suffrage qui figure à l'article 3 de notre texte fondamental et qui ont conduit de façon constante le Conseil constitutionnel à juger que les organes délibérants des collectivités territoriales devaient être élus sur des bases essentiellement démographiques, selon une répartition des sièges et une délimitation des circonscriptions respectant au mieux l'égalité devant le suffrage.
Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs eu l'occasion de le rappeler en 2011 lorsqu'il a examiné la loi fixant le nombre des conseillers territoriaux de chaque département et de chaque région.