Intervention de Olivier Marleix

Séance en hémicycle du 18 février 2013 à 16h00
Élection des conseillers départementaux des conseillers municipaux et des délégués communautaires et modification du calendrier électoral — Motion de rejet préalable

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Marleix :

Tentation bien humaine ! D'autres s'y sont peut-être essayés avant vous, me direz-vous… Mais ce qui me gêne dans votre réforme, c'est que ce sont les territoires ruraux qui vont la payer au prix fort ; car entre l'intérêt des territoires ruraux et celui du Parti socialiste, vous choisissez toujours et sans équivoque celui du Parti socialiste.

Vous n'allez pas vous contenter de supprimer un canton sur deux avec votre article 3 : avec la règle que vous fixez à l'article 23, et notamment celle de l'écart maximum de plus ou moins 20 % par rapport à la moyenne de population, vous allez impacter en réalité 90 % des cantons dans notre pays ! Ce sont deux mille cantons ruraux sur quatre mille qui seront purement et simplement dissous dans de nouveaux ensembles qui feront au moins le double de leur taille.

Vous faites, monsieur le ministre, le choix délibéré de la brutalité. Il est vrai que les écarts, dans l'Hérault notamment, ont pris des proportions insupportables – ils peuvent aller de 1 à 45 – et que cela appelle un redécoupage. Mais vous auriez proposé de ramener cet écart de 1 à 2 que nous aurions pu nous retrouver sur cette ambition. Un à deux, cela revient à plus ou moins 50 %, monsieur le rapporteur : je vous invite donc à anticiper les amendements que nous vous soumettrons à ce sujet.

J'ai fait l'effort, monsieur le ministre, d'imaginer « le jour d'après » votre réforme et de regarder attentivement ce que sera la carte de France, notamment dans ces départements où il y a à la fois une grande ville et des zones rurales. Étonnamment, ce travail ne figure pas dans votre étude d'impact. Il ne figure pas non plus dans le rapport de M. Popelin et je comprends, parce que le résultat de ce travail est assez effroyable.

Je vais me permettre, puisque j'en ai le temps, de vous donner quelques exemples des conséquences de votre texte. Dans la quatrième circonscription de la Côte-d'Or, chez notre collègue Sauvadet, avec une population moyenne par canton de 22 798 habitants, vous n'êtes assuré de faire que quatre cantons, au maximum cinq, là où il y en a aujourd'hui dix-sept. On passe de dix-sept à quatre ou cinq !

Dans la huitième circonscription de la Haute-Garonne, chez Mme Delga, avec des cantons qui devront faire 46 061 habitants en moyenne, vous n'êtes assurés de faire que deux cantons, trois au maximum – et encore, aux dépens d'une circonscription voisine –, là où l'on en compte aujourd'hui quatorze !

Dans la cinquième circonscription du Puy-de-Dôme, chez notre collègue André Chassaigne, avec une population moyenne de 20 397 habitants par cantons, vous n'en ferez plus que six – sept au maximum – là où il y en a aujourd'hui dix-huit.

Dans la troisième circonscription de la Dordogne, chez Mme Langlade, avec des cantons qui feront en moyenne 16 566 habitants, vous n'en aurez plus que quatre – cinq éventuellement, au détriment des circonscriptions voisines –là où il y en a quinze actuellement.

Dans la cinquième circonscription de l'Hérault, chez notre collègue Kléber Mesquida, avec des cantons moyens de 41 782 habitants, vous n'êtes assurés de faire que deux cantons, trois au maximum, là ou il y en a aujourd'hui treize.

Dans la troisième circonscription des Landes, chez notre collègue le

président Emmanuelli – je ne sais pas s'il a eu les chiffres, je vais les lui communiquer –, avec des cantons moyens de 25 621 habitants, vous ne ferez plus que quatre cantons, peut-être cinq, là où il y en a aujourd'hui quatorze.

J'arrête là, mais le jeu de massacre, vous le voyez, est assez effroyable. Monsieur le ministre, la mise oeuvre de ce projet de loi en l'état, tel que le Sénat dans sa sagesse l'a rejeté, entraînerait non pas un redécoupage électoral, même pas ce qu'on appelle un « charcutage » pour reprendre l'expression généralement utilisée de manière malveillante, mais une véritable boucherie pour les territoires ruraux, dont trois cantons sur quatre, voire quatre sur cinq vont disparaître au profit de grands ensembles sans cohérence géographique ni historique. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

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