Madame la présidente, messieurs les ministres, mes chers collègues, quelle opinion avoir de ce projet de loi sur lequel nous sommes aujourd'hui appelés à voter, sinon que ce texte n'est que l'ombre des engagements défendus par François Hollande ?
Improprement appelé « projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires », force est de constater que nous sommes aujourd'hui loin des grands discours enflammés du candidat François Hollande, qui, depuis Le Bourget, disait vouloir partir en croisade contre son véritable ennemi, la finance sans visage.
Ce projet de loi signe avant tout le renoncement du Gouvernement à tenir l'engagement n° 7 du projet présidentiel de François Hollande : « Je séparerai les activités des banques qui sont utiles à l'investissement et à l'emploi de leurs opérations spéculatives ».
L'Assemblée nationale est donc saisie d'une réforme timide, frileuse, ATTAC évoque même une « non-réforme bancaire », bien loin du Glass-Steagal Act à la française que le Gouvernement nous avait promis. La mobilisation des députés de la majorité présidentielle pour donner un peu de contenu à cette coquille vide en atteste.
Au-delà de ce nouveau reniement, les critiques du groupe UDI sur cette réforme sont doubles.
Premièrement, le Gouvernement ne semble toujours pas avoir compris qu'il ne pouvait pas se passer de ses partenaires européens pour s'attaquer à la régulation du secteur bancaire.
Vous avez choisi de ne pas attendre la directive européenne qui sera présentée avant l'été.
Vous avez choisi de ne pas mener de concertation alors même que notre principal partenaire et concurrent, l'Allemagne, travaille en ce moment même à une réforme du système bancaire.
Vous avez choisi de faire cavalier seul, condamnant par avance ce projet de loi à être revu et corrigé.
Les députés du groupe UDI ne croient pas en votre vision étriquée et franco-française ! Nous ne croyons pas plus dans l'efficacité d'une réglementation financière nationale. Votre réforme, ce sera donc la ligne Maginot contre la finance mondiale.
Nous croyons que face à une crise financière mondiale la réponse doit être globale, et que seul l'échelon européen permettra à la France de faire entendre sa voix afin que deux priorités soient enfin inscrites à l'ordre du jour international : renforcer les fonds propres des banques et la réglementation qui leur est applicable, d'une part ; renforcer l'uniformité des règles et l'unicité du contrôle afin d'assurer la stabilité du système financier et son fonctionnement, d'autre part.
Votre projet de loi ne fera donc que pénaliser les banques françaises vis-à-vis de leurs concurrentes européennes et mondiales puisque la réforme bancaire n'entrera en vigueur qu'en 2015 en Allemagne, en 2017 aux États-unis et en 2019 au Royaume-Uni.
Nous sommes également très critiques envers la faiblesse globale de ce texte, notamment en ce qui concerne le trading à haute fréquence et la spéculation sur les matières premières agricoles. Le Gouvernement s'est timidement engagé à continuer de travailler sur le sujet. Nous resterons très vigilants et nous nous inviterons dans le débat entre la gauche et la gauche.
Nous voulons également vous dire notre inquiétude quant aux dispositions qui prévoient que le fonds de garantie des dépôts, destiné à indemniser les clients en cas de défaillance de leur banque, devienne le fonds de garantie des dépôts et de résolution, outil prévu pour faire face aux défaillances ou aux risques de défaillances d'établissements bancaires importants.
Enfin, concernant le cantonnement des activités spéculatives, l'amendement de la rapporteure visant à donner au Gouvernement la possibilité de faire basculer des activités dans la filiale dès lors qu'elles dépassent un seuil fixé par arrêté est venu apporter une première réponse.
Il aurait toutefois été préférable qu'un seuil critique soit fixé par la loi, tout comme cela a été fait en Allemagne, plutôt que de laisser le ministre en décider.
En revanche, nous souhaitons saluer les avancées prévues par ce projet de loi en ce qui concerne le renforcement des droits des TPE et PME vis-à-vis des banques, alors que nombreux sont les professionnels en situation de fragilité dont la trésorerie est engloutie par les frais bancaires.
Nous saluons également les avancées en matière de protection des consommateurs, notamment en ce qui concerne le plafonnement des frais bancaires, même si nous attendions plus sur la possibilité de résiliation annuelle de l'assurance emprunteur.
Enfin, nous aurions souhaité que la création du fichier positif, indispensable pour lutter contre le surendettement, figure dans ce texte. Le Gouvernement s'est engagé à le mettre en place au printemps prochain.
Nous ne sommes certainement pas devant la réforme ambitieuse que le Gouvernement nous avait promise. Toutefois, au vu des améliorations apportées dans l'hémicycle pour la protection des TPE-PME et des consommateurs, le groupe UDI s'abstiendra, et prend aujourd'hui date pour le texte sur le surendettement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.)