Compte tenu du coup très rude que constitue cette décision pour les hommes et les femmes, nous souhaitons mieux comprendre d'où viennent de telles difficultés, alors que votre entreprise, monsieur Varin, n'a procédé à aucun licenciement ou presque au cours des vingt dernières années.
Le coût du travail n'entrant – je parle sous votre contrôle – que pour 8 à 15 % dans le coût de production d'une voiture, il convient de chercher d'autres explications.
Les anticipations de votre groupe ont-elles été suffisantes après la crise de 2007-2008 ? N'aurait-il pas été possible, en particulier, de prévoir la chute des ventes en Europe du Sud, où la crise sévit depuis plusieurs années ? Toutes les anticipations ont-elles été faites, en outre, dans le cadre de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, qui constitue une obligation légale depuis 2005 ?
Par ailleurs, la prime à la casse, qui a tout de même coûté environ 2 milliards d'euros à l'État, n'a-t-elle pas eu un effet anesthésiant, en masquant les difficultés ? Le marché automobile en France est – vous l'avez d'ailleurs rappelé – saturé. Cette prime n'a-t-elle pas tout simplement conduit les consommateurs à anticiper leurs comportements d'achat ? Peut-être même a-t-elle constitué un frein dans la conquête de nouveaux marchés avec d'autres modèles : petites voitures à bas coût ou, au contraire, véhicules haut de gamme.
N'aurait-il pas mieux valu, de votre point de vue, encourager l'innovation, par exemple sur les véhicules hybrides, moins polluants, qui font l'objet d'une demande croissante depuis de nombreuses années ? N'aurait-on pas dû, également, former les hommes et les femmes à d'autres métiers en vue d'éventuelles reconversions ? N'aurait-il pas fallu, enfin, engager une reconversion de l'industrie automobile et de ses sous-traitants ? Il est ainsi possible – ce n'est qu'un exemple – de fabriquer des éoliennes avec certaines technologies proches. Ne s'agit-il pas là de pistes d'action pour le futur ?
En outre, que pensez-vous de la politique de modules de certains constructeurs allemands ?
S'agissant des relations entre les partenaires sociaux et les décideurs, ne faudrait-il pas envisager un véritable changement de culture pour établir des liens de confiance et permettre aux salariés de participer à la prise de décisions ? Cela peut sembler très novateur en France, mais se pratique avec succès dans d'autres pays, notamment en Allemagne.
Enfin, pouvez-vous préciser ce que vous entendez par « plan de réindustrialisation » ? Faudra-t-il par exemple, à Rennes, attendre 2016 pour voir émerger de nouveaux emplois ? Qu'en est-il pour les autres sites ?