Mais les faits sont têtus et chacun peut constater l'échec de la politique conduite sous le précédent quinquennat ainsi que la responsabilité qui est celle de l'UMP.
L'opposition ne propose aujourd'hui comme réponse à la violence scolaire qu'une seule mesure, toujours la même : la suspension du versement des allocations familiales aux parents d'enfants auteurs de violences. Ce sujet est désormais derrière nous et vous manquez singulièrement d'imagination !
Par-delà les griefs de principe que nous pouvons opposer à cette proposition, force est de constater que sa mise en oeuvre sous la précédente mandature n'a pas été couronnée de succès. Les violences ont crû de 11 % entre 2011 et 2012. Il est assez déplorable de constater que vous en êtes réduits, par pure démagogie, à proposer l'adoption de mesures dont vous savez, comme nous, qu'elles sont aussi injustes qu'inefficaces.
Le bilan de l'action sous le précédent quinquennat n'est pas glorieux. La droite a aggravé les problèmes dans des proportions considérables. En effet, l'UMP a pris tout au long de cette période des mesures profondément régressives. Je n'en citerai que quelques-unes : la réduction de l'éducation prioritaire à l'identification des « élèves à risque » ; le sabordage de la formation des enseignants ; la dérégulation de la carte scolaire et, bien évidemment, les suppressions massives de postes d'encadrement.
Entre 2003 et 2012, le nombre de personnels non enseignants a été divisé par 5 ! Vous avez ainsi mis les enseignants et les équipes éducatives dans l'impossibilité matérielle de faire face aux situations de violences en milieu scolaire. Ces situations, pour être correctement traitées, exigent en effet la présence d'adultes qualifiés au sein des établissements.
Chacun sait que les actes de violence ont souvent pour cause des difficultés psychologiques, des troubles familiaux, des problèmes sociaux, qui exigent avant tout une meilleure prise en charge des enfants concernés, auteurs comme victimes de violences. Les familles ont besoin d'être aidées et non d'être sanctionnées.
La droite s'est posée, lors du débat sur le mariage pour tous, en grand défenseur de la famille. Sans revenir sur le paradoxe qu'il y a à défendre la famille tout en refusant à certains le droit à une vie de famille, vous êtes-vous interrogés sur les conséquences des politiques conduites les années précédentes, en matière de droit du travail par exemple ?
La casse du droit du travail a ouvert la voie à la multiplication des situations de précarité, au travail le dimanche, à la généralisation des horaires décalés. Pensez-vous que cette précarité favorise la vie familiale et l'éducation des enfants ? Croyez-vous que les effets délétères des politiques de précarité vous autorisent aujourd'hui à proposer de sanctionner des familles délibérément fragilisées ?
Depuis l'automne, le Gouvernement a pris ses responsabilités dans certains domaines. Il a mis en oeuvre des mesures qui vont dans le bon sens avec, par exemple, le recrutement de 500 assistants de prévention et de sécurité, ou encore la mise en chantier des modules de formation visant à apprendre aux enseignants à gérer les conflits. Il a confié en septembre dernier à Éric Debarbieux la délégation ministérielle chargée de la prévention et de la sécurité en milieu scolaire. Comme l'a souligné la ministre, c'est la première fois que le mot « violence » figure dans l'organigramme du ministère.
Ce travail est tout le contraire de l'agitation médiatique dans laquelle la droite se complaît. Nous soutenons donc ces initiatives et sommes convaincus de deux choses.
La première est qu'il n'y aura pas de réponse à la violence scolaire sans que les équipes éducatives reçoivent les moyens de prendre en charge les incidents de manière efficace et utile. Il faut aussi donner plus de place aux associations éducatives et pédagogiques, et développer les structures d'accueil. Un meilleur encadrement, c'est une meilleure connaissance des élèves, de leurs difficultés personnelles, familiales et sociales.
La seconde, c'est qu'il faut refonder l'école sur un contrat de confiance. Ces derniers temps, les mobilisations ont montré qu'il fallait rétablir l'écoute, le dialogue, la confiance dans les enseignants, dans les personnels, dans le potentiel des élèves. La confiance est une clef du pacte républicain et démocratique.
De nombreux observateurs l'ont remarqué : là où les collégiens et les lycéens prennent davantage en charge la vie scolaire, la violence recule ; là où les élèves de terminale sont responsabilisés et accueillent les élèves de seconde, les établissements sont plus apaisés.
La question de la violence scolaire n'est pas absente des préoccupations de la gauche, bien au contraire, mais elle ne peut être appréhendée isolément, dans une optique punitive des familles en difficulté.
Le traitement de la violence scolaire exige de la fermeté ; l'arsenal législatif et réglementaire existe. Il exige aussi et surtout la poursuite d'un travail de fond visant à mettre l'accent sur la prévention, la qualité de l'encadrement et l'identification précise et individualisée des causes des comportements violents. Ceux-ci peuvent avoir des origines très diverses, qui vont des violences intrafamiliales aux situations d'échec scolaire ; ils peuvent se nourrir d'un mal-être ou encore d'un sentiment d'impunité, qui pousse l'enfant à monter d'un cran dans la violence.
Tisser des liens de proximité avec ces enfants est l'unique moyen de prendre en charge les difficultés qu'ils posent aux autres élèves, comme aux enseignants et à l'équipe éducative. C'est aussi le moyen de s'assurer que ces élèves retrouveront le chemin d'une scolarité synonyme d'apprentissage et d'émancipation.
Refonder l'école sur le modèle de l'école républicaine, c'est-à-dire sur le modèle de l'élève qui n'a que l'école pour apprendre et à qui l'école doit donner les moyens de se construire, telle est l'ambition qui devrait aujourd'hui nous réunir. Nous rejetterons, vous l'avez compris, cette proposition de loi.