Intervention de Gilbert Collard

Séance en hémicycle du 21 février 2013 à 15h00
Prévention de et lutte contre la violence en milieu scolaire — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGilbert Collard :

L'école, c'est la guerre des boutons !

Cette proposition de loi correspond partiellement à une préoccupation déjà exprimée par Marine Le Pen, lors de sa campagne pour les élections régionales de 2004. Elle demandait la présence de portiques à l'entrée des écoles, la carte de lycéen infalsifiable et le renforcement d'une présence d'autorité, afin de faire régner l'ordre.

Le débat est simple et les idées échangées respectables. D'un côté, il y a Victor Hugo et son fameux : « Ouvrez une école, vous fermerez une prison. » C'était beau, c'était grand. C'était l'école d'autrefois. Aujourd'hui, on a l'impression – et c'est même une réalité – que l'école ne peut plus remplir cette fonction. Il y a aussi Gilbert Cesbron, pour qui, chaque fois qu'on loupe l'éducation d'un gosse, c'est un peu Mozart qu'on prend le risque d'assassiner.

C'est dire combien l'école est le moment et l'endroit où tout se joue. Et l'enjeu est là : peut-on continuer à accepter que, selon les termes mêmes du rapport, les incidents graves aient augmenté de 30 % en cinq ans ? On parle ici d'une aggravation de la violence verbale et physique mais aussi d'un climat de violence diffus qui détériore la qualité du travail du professeur, et contamine progressivement les esprits : un élève, puis deux, et parfois tous.

Que fait-on face à cette réalité ? Comment réagit-on et comment choisit-on entre deux discours qui se heurtent l'un à l'autre ? Pour les uns, responsabiliser, c'est stigmatiser. Mais pourquoi considérer qu'il est stigmatisant de responsabiliser une personne, quand le fait de se prendre en charge et d'assumer ceux avec qui l'on vit est au contraire un moyen de construire une dignité ?

Il ne s'agit pas de procéder à une responsabilisation autoritaire, massive. Mais tant qu'on ne fera pas d'effort pour responsabiliser un peu les familles, fût-ce à une dose infime, comment voulez-vous que la notion de responsabilité s'installe dans les familles ?

En prétendant que responsabiliser, c'est stigmatiser, vous faites un travail sur les mots qui est inconcevable ! Quand je dis à quelqu'un qu'il est responsable, je le construis ! Quand je dis à un père, à une mère, quelles que soient les difficultés qu'il rencontre dans son foyer et dont on doit tenir compte, qu'il est responsable de son enfant, quand je le préviens que l'on touchera à ses allocations familiales si son enfant continue à se mal comporter, je ne le stigmatise pas, je lui dis simplement : « Réveille-toi, attention, ce qui compte peut-être pour toi va être touché. Réagis ! ». Que pouvons-nous faire d'autre aujourd'hui ? Tout le discours que j'entends sur la refondation de l'école, c'est beau comme un poème de Prévert. Ce qu'il faut, ce n'est pas refonder l'école, c'est respecter l'école, et on n'a plus d'autre moyen aujourd'hui que d'introduire un peu d'autorité, un peu de responsabilité. Allez voir La journée de la jupe, ce film extraordinaire dont le personnage principal est incarné par Isabelle Adjani, qui nous décrit toute une réalité.

Mais que faisons-nous ? Jusqu'à quand allons-nous nous contenter d'espèces de solutions fragmentaires qui n'apportent rien ? L'avenir de nos enfants est en jeu, tout comme l'avenir de notre pays. Pour que l'école, et je reprends respectueusement vos propos, madame Bonneton, permette aux jeunes de s'y intégrer, de s'y épanouir, elle doit être un lieu pacifié. Et ce ne sont pas toutes les solutions que l'on propose aujourd'hui qui permettront à nos jeunes, dans les écoles où la violence s'exerce, où les professeurs se rendent avec la peur au ventre, de s'intégrer.

Je ne sais plus qui a dit qu'il ne faudrait pas de note brutale. À défaut de note brutale, essayons au moins d'introduire, si vous le voulez bien, un peu de responsabilité. Ce n'est pas de la brutalité.

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