Intervention de Jean-Marc Michel

Réunion du 20 février 2013 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Jean-Marc Michel, co-préfigurateur du projet de l'Agence nationale de la biodiversité :

Sur le volet social, la situation de tous les agents et salariés des opérateurs techniques que nous souhaitons rassembler dans l'Agence de la biodiversité sera examinée. Nous envisageons de reproduire un dispositif que nous avons mis en place à la direction générale de l'aménagement, du logement et de la nature pour le parc national des Calanques, qui est un établissement public à caractère administratif accueillant des agents salariés par un GIP ou une association de droit de privé. Le Conseil d'État nous a conseillé sur le dispositif, le décret a été publié au Journal officiel, et nous avons le premier semestre 2013 pour régler individuellement le cas des trente-sept agents qui rejoindront le parc national des Calanques. À une autre échelle puisque 4 000 agents étaient concernés, Voies navigables de France est un établissement public où se sont retrouvés des agents des services publics de l'État et des agents d'un autre établissement public. La solution que nous avons trouvée existe dans la loi relative à la fonction publique et dans le code du travail. Là encore, c'est avec l'aide du Conseil d'État que nous l'avons trouvée. Si notre mission de préfiguration est complétée, la résolution de cette question constituera une étape dans le trimestre qui vient. Nous proposerons des solutions adaptées qui existent aux quelque 400 agents des structures qui sont appelées à être consolidées par regroupement dans l'Agence.

Pour gagner en efficience, nous envisageons effectivement de réduire le nombre de petits opérateurs fragiles qui ne se parlent pas toujours entre eux et ne sont pas forcément perçus, malgré la richesse de leurs propositions, par les opérateurs de terrain, les collectivités ou les branches professionnelles. Le redéploiement du 1,5 milliard d'euros de dépenses annuelles, publiques ou privées, en matière d'environnement interviendra forcément.

S'agissant de la fiscalité, alors que nous honorions la commande en remettant notre rapport le 31 janvier, s'ouvrait, le 30 janvier, le premier atelier de travail du comité pour la fiscalité écologique, présidé par Christian de Perthuis, économiste à Paris-Dauphine. Dans ce premier rapport, nous avons énuméré des propositions qui nous ont été faites. Depuis lors, d'autres sont arrivées, notamment pour trouver des moyens nouveaux à disposition des espaces maritimes et ultramarins. Oui, madame la députée Chantal Berthelot, nous ambitionnons de mettre cette agence à la disposition de tous les territoires, qu'ils soient métropolitains ou ultramarins. Au cours de nos six semaines de préfiguration, nous n'avons pas eu les contacts suffisants avec les autorités d'outre-mer, en particulier celles du Pacifique, dont les champs de compétence sont différents de ceux des départements et territoires d'outre-mer. Nous souhaitons approfondir maintenant ce sujet de la fiscalité car en dépendent les moyens affectés à certaines activités. L'ADEME en est un très bon exemple, avec la taxe générale sur les activités polluantes.

Les branches professionnelles que nous avons rencontrées sont très demandeuses vis-à-vis d'opérateurs techniques susceptibles de les aider à résoudre des problèmes. Les producteurs de granulats que M. Yves Albarello a cités sont des professionnels qui ont bien dix ans d'avance car ils ont fait de la biodiversité un facteur de développement d'entreprise. La convention nationale de l'Union des producteurs de granulats distribue des prix de la sécurité, de la qualité des produits, de la qualité de relation avec le voisinage et de la biodiversité. C'est dire si l'intégration de la biodiversité dans le développement d'entreprise et de branche professionnelle est réussie ! Il est temps de faire en sorte que les 11 000 entreprises de jardinerie et de paysagisme, qui sont de formidables liens avec la société civile, soient aussi porteuses de messages sur la biodiversité. Ce n'est pas très compliqué si on négocie une convention de partenariat avec cette branche professionnelle. On peut faire à peu près la même chose avec des entreprises qui ont besoin d'espace pour leurs installations, en travaillant avec elles sur la mise en oeuvre de la réglementation en vigueur.

Avec les collectivités, qu'elles soient maître d'ouvrage ou autorité administrative, qu'elles organisent l'utilisation de l'espace ou attribuent des budgets, l'Agence peut tout à fait nouer des partenariats et se mettre à leur service sous la forme d'un centre de ressources regroupant des bases de données accessibles, ce qui n'existe pas aujourd'hui en matière de biodiversité, puisque la plupart des données sont couchées sur des carnets d'amateurs. La prestation de l'Agence auprès des collectivités n'implique pas d'installer une forme de tutelle. Mais si elle peut faciliter la compréhension par un maître d'ouvrage, public ou privé, de la conduite des séquences « éviter, réduire, compenser », cela ne peut qu'en être mieux. Au cours de nos auditions, nous avons reçu un grand nombre d'appels à l'aide sur le sujet des mesures compensatoires au service de la biodiversité. Quoi de mieux et de plus opérationnel que de rassembler les informations sur divers milieux naturels pour savoir par quel type d'intervention de génie écologique compenser tel type de zone humide, par exemple ? Installer un opérateur technique dans une mission de rassemblement de données me semble tout à fait opportun, j'allais même dire très urgent.

Notre mission ne s'arrêtera sans doute pas là. La prochaine séquence, si j'en juge par les débats qui ont eu lieu hier devant le conseil national de la transition écologique, c'est l'approfondissement des hypothèses d'écriture des articles de loi qui traduirait le contenu de notre rapport. Puisque l'Agence de la biodiversité est susceptible d'être portée par la loi-cadre relative à la biodiversité, il faut lui donner une configuration, en termes de périmètre, d'organisation et de moyens, qui trouve sa traduction dans des articles de loi. Tout ne figurera pas dans cette loi-cadre puisque les mesures fiscales, quand elles auront évolué, devront trouver leur place dans un projet de loi de finances.

Notre deuxième chantier sera de démontrer que l'Agence de la biodiversité permet de gagner en moyens et en efficacité environnementale.

Le troisième chantier sera de veiller à ce que le sujet des acteurs territoriaux par rapport à l'Agence soit abordé lors des débats locaux de préparation de la loi-cadre relative à la biodiversité, de manière à évacuer complètement la crainte de recentralisation que vous avez évoquée. Restera aussi à définir le périmètre des institutions qui rejoindraient l'Agence sous forme d'intégration et celles qui, en gardant leur statut d'établissement public, y seraient rattachées. Nous en profiterons pour examiner les possibilités d'associer d'autres intervenants à l'activité de l'Agence sous forme de GIP, de manière à avoir les trois cercles concentriques de rayonnement de l'Agence de la biodiversité.

Deux questions ont été posées sur l'ONCFS et sur l'ONEMA. Sachez que nous ne proposons pas le transfert à l'Agence de la biodiversité de l'exercice de la police de l'environnement, ni de la police administrative qui est déjà dans les services déconcentrés, ni de la police judiciaire qui est détenue par ces deux établissements publics. Ceux-ci sont donc appelés à garder et leur autonomie et le cadre principal de leur mission. L'ONCFS compte aujourd'hui 1 650 agents, dont 1 330 sur le terrain. Nous ne proposons pas de modification pour ce qui concerne les métiers principaux qui seront conservés dans ces établissements. Néanmoins, quand un établissement public comme celui-ci affiche comme axe stratégique numéro un l'action en faveur de la biodiversité et qu'il y consacre 40 % de ses moyens, on est en droit de s'interroger sur la pertinence à maintenir une superposition. D'ailleurs, vous l'avez fait. C'est un sujet qu'on ne peut pas évacuer comme cela et nous y travaillerons dans les mois qui viennent. J'ai rencontré le directeur et le président de l'Office pour voir avec eux quelles contributions, hors missions d'intérêt cynégétique, pourraient être apportées au profit de la biodiversité, comment leurs capacités de recherche et développement ainsi que leur expertise pourraient être mises à disposition de l'Agence de la biodiversité. Nous n'avons pas encore abouti à des qualifications précises, mais nous y travaillons. Il ne s'agit pas d'engager un démantèlement de l'établissement public mais une collaboration en cohérence pour plus d'efficience.

On a peu parlé des milieux marins et océaniques, et pourtant la disproportion des moyens par rapport aux enjeux constitue un lourd sujet. Autant sur l'espace terrestre, nous avons un devoir de cohérence et d'évitement de superpositions, autant sur les milieux marins, nous ne mettons pas les moyens.

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