Intervention de Antoine Durrleman

Réunion du 25 juillet 2012 à 8h45
Commission des affaires sociales

Antoine Durrleman, président de la sixième chambre de la Cour des comptes :

Il nous a été demandé si, dans la branche famille, la réorganisation du réseau des caisses d'allocations familiales avait interféré avec les difficultés que nous avons rencontrées : sur le plan comptable, les opérations de reprise des comptes ont été effectuées dans de bonnes conditions. La Caisse nationale d'allocations familiales et la branche famille ont donc bien fait les choses. En revanche, certaines réorganisations internes ont posé des difficultés, les équipes ayant été mobilisées par ces opérations de réorganisation. Et ce sont les prestations les plus compliquées, c'est-à-dire les allocations de logement familiales et le RSA, qui ont prioritairement souffert des difficultés rencontrées. La caisse nationale a certes réagi mais tardivement, en mettant en place des plans de maîtrise des risques. Ceux-ci ont été mis en oeuvre à partir de 2011 et certains d'entre eux produiront leurs effets en 2012 tandis que d'autres doivent encore être mis en application. Globalement, si l'on fait une comparaison avec d'autres branches, la question de la fiabilité des comptes est restée secondaire pour la branche famille. Ainsi, les conventions d'objectifs et de gestion de l'activité de recouvrement et de la branche maladie ont fait de la fiabilité des comptes un objectif prioritaire, à la différence de la convention passée avec la branche famille. Cette convention arrive à échéance, et nous espérons que la question de la fiabilité des comptes sera centrale dans la prochaine convention et que la caisse nationale pilotera beaucoup plus fermement les dispositifs de contrôle interne des caisses.

Pour ce qui est de la branche vieillesse, nous avons constaté des difficultés de liquidation de pensions de retraite. En effet, lorsque l'on recourt à la liquidation en l'état, c'est-à-dire à la liquidation des pensions de retraite en fonction des éléments dont on dispose à l'âge de la liquidation, les informations complémentaires dont on peut disposer après cette liquidation, temporaire en principe, ne sont pas systématiquement prises en compte par une nouvelle liquidation. Si nous avons attiré l'attention de la Caisse nationale d'assurance vieillesse sur ce point depuis 2008, celle-ci n'a cependant pas réagi à nos observations, si bien que nous le pointons assez sévèrement dans notre rapport de certification.

En ce qui concerne la branche maladie, le contrôle des prestations liquidées par les mutuelles nous a permis de constater un certain progrès : la Cour insistait en effet depuis plusieurs années sur cet aspect dans son rapport de certification. En 2011, ce progrès n'est pas encore totalement abouti. De nouveaux dispositifs, qui, selon nous, vont dans le bon sens, devraient être mis en place en 2012.

Nous sommes confrontés à deux difficultés en ce qui concerne la branche des accidents du travail et de maladies professionnelles (AT-MP) : la première concerne le contrôle interne, qui fait l'objet d'efforts importants tant de la part de la Caisse nationale d'assurance maladie que de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS). La seconde est liée à un défaut de provisionnement. En la matière, la décision dépend moins du producteur direct des comptes qu'est la Caisse nationale d'assurance maladie que de ses autorités de tutelle dès lors que le passage de ces provisions a, en l'état actuel des normes comptables, un effet de plusieurs centaines de millions d'euros sur le résultat même de la branche.

La réforme de la tarification est en cours et montera en charge jusqu'en 2014. Si elle n'a pas, en tant que telle, une incidence sur la fiabilité des comptes, on peut cependant espérer qu'elle tarira des sources de contentieux importantes dans l'ancien régime de tarification.

En matière d'assurance-maladie, nous avons analysé la question de la tarification à l'activité et celle de la convergence entre secteur public et privé dans notre rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale de l'an dernier. Nous en avons conclu qu'une véritable convergence impliquait des arbitrages très lourds qui n'avaient pas été rendus et qu'il fallait que les périmètres pris en compte soient les mêmes pour le secteur public et le secteur privé. Nous avons également indiqué dans notre rapport qu'en l'état actuel des choses, l'objectif de convergence fixé par le législateur à 2018 nous paraissait absolument insusceptible d'être atteint.

Point capital, la coordination entre médecine de ville et établissements hospitaliers englobe également la prise en charge médicosociale et le retour à domicile. Ayant motivé la création des agences régionales de santé, elle doit constituer leur priorité. Nous avons commencé à éclairer ce point dans le cadre de nos travaux : ainsi, cette année, nous avons notamment étudié les activités de soins de suite et de réadaptation et nous vous présenterons sur le sujet un certain nombre d'observations dans le cadre du prochain rapport sur l'application des lois de financement de la Sécurité sociale. Faut-il aller jusqu'à des transferts de sous-objectif à sous-objectif de l'ONDAM ? En effet, des questions de périmètre se posent entre l'objectif assigné aux soins de ville d'une part, et les différents objectifs assignés aux établissements de santé, d'autre part.

La dépendance est un point sur lequel la Cour est revenue à plusieurs reprises, soulignant à chaque fois l'extraordinaire enchevêtrement des compétences et l'extraordinaire sédimentation des dispositifs. Sa recommandation principale est d'en simplifier l'accès. De ce point de vue, l'action sociale des CARSAT est une question importante que nous n'avons pas étudiée dans la période récente, sachant qu'il appartient à chaque conseil d'administration de définir sa politique d'action sociale dans le cadre des marges de manoeuvre qui lui sont laissées par la CNAV.

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