Intervention de Anne-Yvonne Le Dain

Réunion du 15 janvier 2013 à 16h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAnne-Yvonne Le Dain :

Je m'étonne de la violence des mots utilisés. Vous sacralisez le mariage, alors que depuis 1792, il s'agit d'un acte civil, détaché des convictions personnelles et religieuses. Vous proposez ainsi de créer une union civile qui donnerait les mêmes droits et les mêmes possibilités que le mariage, sans en porter le nom ; il s'agit donc d'une bataille de mots.

En tant que représentants du peuple, nous avons été des porteurs de paroles, et si nous avons été élus, c'est que nous avons convaincu par des paroles ; la loi, de son côté, relève d'une parole écrite. Pendant plusieurs siècles, elle a acté la différence entre les sexes en faisant du mariage la consécration d'une alliance entre un homme et une femme, et rien ne l'empêche aujourd'hui, tout en reconnaissant aux deux sexes des droits égaux, de les considérer différents dans les faits.

Lier la PMA et la GPA, comme vous le faites constamment, est intenable et pernicieux. La PMA relève du droit d'une femme à utiliser son propre corps pour enfanter ; la GPA renvoie – dans vos fantasmes – à l'autorisation que la société donnerait à un homme d'utiliser le corps d'une femme à son propre bénéfice. Il n'y a aucune équivalence entre les deux, et la PMA n'est en rien une porte ouverte à la GPA.

Lorsque vous évoquez la notion de droit aux origines, vous usez à nouveau de mots durs et forts. Faut-il donc croire qu'un enfant qui naît de la rencontre improbable – parfois violente – entre deux gamètes porterait inexorablement la tache de ce péché originel ?

Nous ouvrons aujourd'hui le mariage, de manière raisonnable et responsable, à tous ceux qui souhaitent en bénéficier, quel que soit leur sexe et quelles que soient leurs pratiques affectives et sexuelles. C'est en tant que femme, mère, fille, cousine, voisine, électrice et élue que je m'exprime ici pour saluer la reconnaissance par la loi de la liberté de chacun à disposer de son corps, dans l'alliance qui lui plaît.

Quant au terme d'« union civile », il renvoie à l'union libre que pratiquent aujourd'hui bien des couples, homosexuels comme hétérosexuels. Il est temps que cette égalité des pratiques puisse aller jusqu'au mariage, qui consacre une relation devant la loi et devant le monde. Notre société y est prête, elle le souhaite, et c'est là que nous nous dirigeons. Cette loi est simple et ne mérite pas la dramatisation à laquelle vous vous livrez.

Nous donnons à des faits et à des réalités sociales la consistance de la loi. L'homosexualité est une réalité sociale qui doit être reconnue comme telle. C'est ainsi que, dans une démocratie apaisée, nous offrirons à toutes les personnes qui le souhaitent la possibilité de s'unir en fonction de leurs goûts, avec les mêmes mots pour le dire – car nous savons fort bien, lorsque l'on fait de la politique, combien les mots ont un sens.

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