Intervention de Édouard Fritch

Réunion du 15 janvier 2013 à 16h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉdouard Fritch :

La Polynésie française a une vision particulière sur ce texte qui mérite en effet le débat.

La Polynésie est une collectivité un peu à part puisqu'elle dispose de compétences spécifiques, se gouverne et s'administre librement même si les réformes du code civil y sont applicables sans que nos assemblées soient consultées.

Le législateur ne doit donc pas perdre de vue certaines spécificités. Comme d'autres collectivités d'outre-mer, la Polynésie française est imprégnée des valeurs du christianisme, les évangélistes ayant été les premiers véritables colonisateurs de notre archipel. Le 5 mars est ainsi un jour férié en commémoration du 5 mars 1797, jour de l'Arrivée de l'Évangile. La Polynésie est donc restée éloignée d'un certain nombre d'évolutions de la société française et, notamment, de l'émergence du militantisme public des mouvements homosexuels.

La plupart des homosexuels sont parfaitement intégrés au sein de notre culture traditionnelle et ils n'ont jamais milité en faveur de la reconnaissance d'un statut particulier. La revendication du mariage pour tous n'a donc pas véritablement trouvé d'échos chez nous.

J'ajoute que cette loi n'a pas fait l'objet d'un débat de fond qui aurait eu le mérite de préparer les esprits à une évolution non demandée par les Polynésiens et venue de l'extérieur. Comme telle, elle semble rompre l'équilibre ancestral de notre société, au risque de heurter profondément les consciences.

Si, de façon générale, les Polynésiens ne sont pas hostiles aux évolutions de la société, celles-ci doivent préalablement faire l'objet d'une acceptation commune, laquelle ne peut que résulter de l'apprentissage et du débat. Ainsi en a-t-il d'ailleurs été en 2001 lorsque la Polynésie française a adopté un texte autorisant l'interruption volontaire de grossesse, vingt-sept ans après la métropole et malgré l'avis contraire des églises.

L'évolution sociétale devant donc se faire à un rythme différent de celui de la métropole, il me semble prioritaire, avant même de vouloir étendre les dispositions relatives au mariage pour tous, de rendre applicable en Polynésie la totalité des dispositifs relatifs au PACS.

En effet, bien que la loi du 23 juin 2006 y soit applicable, la question de l'application effective du PACS continue de se poser car les articles 515-1 et suivants du code civil, qui définissent et règlent les modalités du PACS issu de la loi du 15 novembre 1999, n'ont toujours pas été étendus à notre territoire. Il n'est pas possible de s'y pacser faute de pouvoir enregistrer un PACS au greffe du tribunal de Papeete. La Polynésie demeure donc la seule collectivité sur l'ensemble du territoire national où il en est ainsi, alors même que le corpus règlementaire du PACS y est reconnu et que les taux de concubinage et de naissances hors mariage y sont élevés. En 1990, 59 % des enfants naissaient ainsi hors mariage contre 69 % en 1999 et 74 % en 2004. En outre, comme vous le savez, le PACS a beaucoup profité aux couples hétérosexuels. Je voterai donc en faveur des amendements de suppression de l'article 1er.

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