Intervention de Alain Tourret

Réunion du 15 janvier 2013 à 16h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Tourret :

Nous sommes à la croisée des chemins. Il y a eu le mariage, puis le PACS – auquel toute l'opposition de l'époque, sauf une députée, s'était opposée ! Aujourd'hui, vous estimez qu'il manque au PACS la solennité de l'union et une sécurité juridique au stade de la dissolution. Vous nous proposez donc l'alliance civile, sorte d'OVNI, prétendue solution alternative qui, en réalité, n'est satisfaisante ni au regard de l'amour que peuvent se porter des personnes du même sexe, ni au regard de leur profond désir de fonder une famille. Vous auriez pu proposer d'améliorer le PACS, qui l'a déjà été depuis son adoption et mérite de l'être à nouveau sur plusieurs points ; c'est ce que je tenterai pour ma part, par voie d'amendements, à ce texte, qui offre, à mes yeux, un cadre approprié à cette démarche. Mais votre alliance civile ne résout aucun des problèmes que rencontrent les couples homosexuels. Au contraire, le projet du Gouvernement est cohérent et répond à la très grande majorité des demandes qui ont été formulées, en se conformant à une sorte de modèle européen que l'on peut dégager de l'observation des pays ayant ouvert le mariage aux couples de même sexe.

Si ce projet vous met si mal à l'aise, c'est, au fond, en raison du mot même de « mariage ». Avant 1792, le mariage était un sacrement chrétien, ce qui permettait aux représentants de l'Église catholique d'être officiers d'état civil et interdisait aux protestants et aux juifs de se marier. Certes, quelques pressions ont légèrement modifié cette institution vers 1780. Mais la conservation du mot en 1792, puis par Bonaparte – qui négociait avec l'Église à propos du Concordat – a créé une ambiguïté dont nous avons hérité. Le même mot recouvre ainsi deux acceptions radicalement différentes : le sacrement, dont il éveille en nous la réminiscence pour des raisons historiques, et le mariage civil. Ce qui vous gêne dans le mariage homosexuel, c'est en définitive la possibilité d'un mariage uniquement civil, puisqu'il ne peut être suivi d'une cérémonie religieuse, à la différence du mariage hétérosexuel.

À ce terme, vous préférez donc celui d'alliance – qui rappelle sans doute à Charles de Courson le doux souvenir de la Sainte-Alliance conclue le 26 septembre 1815 par trois monarchies européennes, et qui constitua la plus importante force contre-révolutionnaire du xixe siècle, réprimant les aspirations nationales de tous les pays d'Europe, dont la France !

Je considère comme vous qu'il faut améliorer le PACS. Mais vous devriez franchir avec nous une étape supplémentaire, celle qui mène au mariage que nous vous proposons.

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