Intervention de Erwann Binet

Réunion du 15 janvier 2013 à 16h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaErwann Binet, rapporteur :

Avis défavorable. Ces deux amendements, qui visent à réserver expressément le mariage aux personnes de sexe différent, sont contraires à l'esprit du projet défendu par le Gouvernement. MM. Breton et Bompard indiquent tous deux que l'altérité sexuelle dans le mariage est un principe fondamental de la Constitution française. Or, si cette question fait débat parmi les juristes, la décision relative à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) du 28 janvier 2011 a permis au Conseil constitutionnel de poser qu'il était loisible au législateur d'affirmer le caractère hétérosexuel du mariage, qui ne procède donc pas d'une exigence constitutionnelle. Le Conseil renvoie par ailleurs expressément à l'article 34 de la Constitution, confortant ainsi la compétence du législateur en cette matière.

En outre, depuis le début des années 1970, le Conseil constitutionnel a, au travers de la jurisprudence sur les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, systématiquement permis la promotion des droits et des libertés – liberté d'association, droits de la défense, liberté individuelle, liberté d'enseignement ou de conscience… L'affirmation du caractère hétérosexuel du mariage casserait cette logique jurisprudentielle du Conseil constitutionnel, et apparaît donc peu probable de la part de celui-ci.

Les orateurs ont jusque là évité les poncifs sur l'altérité sexuelle où le père – symbole de la sécurité, de la force et de l'autorité – s'occuperait du bricolage, et la mère – douce, aimante et tendre – serait chargée de la cuisine. Aucune étude menée sur le sujet n'a, du reste, porté de suspicion sur les familles homoparentales. La table ronde du 20 décembre dernier a formellement démontré que les enfants élevés en leur sein devenaient de jeunes adultes normaux, confirmant les résultats des centaines d'études internationales dont aucune ne conclut à l'existence chez eux d'une vulnérabilité plus grande que chez les autres enfants. La question avait, certes, fait débat lors de la table ronde réunissant pédopsychiatres et psychanalystes, mais le docteur Serge Hefez – responsable de l'unité de thérapie familiale dans le service de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris – a clairement affirmé que les difficultés de ces enfants étaient surtout imputables au regard que la société pose sur eux. Loin de faire obstacle à l'instauration du mariage pour tous, cet argument semble pourtant plutôt plaider en sa faveur.

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