Monsieur Dosière, le Conseil constitutionnel n'échappe pas à l'obligation faite à chaque juge de s'interroger sur le contexte dans lequel il prend ses décisions et sur les conséquences qu'elles peuvent avoir. C'est pourquoi il a souvent formulé des réserves d'interprétation tout en repoussant aussi, dans certains cas, à certaines dates précises des abrogations. En effet, le juge constitutionnel ne peut se contenter de livrer, de manière désincarnée, une interprétation sèche de la Constitution.
Monsieur Daubresse, lorsque la loi sur le droit au logement opposable a été adoptée, beaucoup de juristes se sont demandé ce qu'était une loi opposable. L'expression ne relève-t-elle pas du pléonasme ? En outre, faute de politiques publiques, une loi ne risque-t-elle pas de se heurter à des logiques contradictoires ? Le Conseil constitutionnel, comme les juridictions administratives ou judiciaires, a pour mission de concilier des principes ou des droits d'égale importance – droit de propriété, accessibilité des droits, droit au logement –, mais peut-être ne faut-il pas surestimer les lois lorsqu'elles ne s'accompagnent pas de politiques publiques leur permettant d'atteindre leurs objectifs.
Monsieur Denaja, le juge constitutionnel n'établit pas de hiérarchie entre les normes, par exemple entre le corps de la Constitution, le Préambule de 1946, la Déclaration des droits de l'homme de 1789 et la Charte pour l'environnement de 2004, même si certains droits, plus précis que d'autres, sont moins sujets à interprétation. L'enjeu de la supraconstitutionnalité serait d'admettre que le Conseil constitutionnel peut lui-même juger des lois constitutionnelles. Pour l'heure, il a toujours considéré que cette prérogative n'appartenait qu'au constituant.
Sur le droit spécifique qui s'applique en Alsace-Moselle, je réserve ma réponse, puisque cette question sera nécessairement examinée par le Conseil constitutionnel.