Intervention de Nicole Maestracci

Réunion du 20 février 2013 à 9h15
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Nicole Maestracci :

Le Conseil a fait de l'accessibilité, de la clarté et de la lisibilité de la loi un objectif de valeur constitutionnelle, tout en précisant que ces critères ne pouvaient être invoqués par le justiciable dans le cadre d'une QPC. Il est essentiel que les justiciables comprennent les décisions judiciaires. La tradition française considère que leur brièveté contribue à leur clarté, mais d'autres juridictions européennes développent davantage le raisonnement. Sur l'amélioration de la clarté de la loi, qui va de pair avec son accessibilité, le Conseil constitutionnel sera peut-être amené à faire évoluer sa jurisprudence.

En ce qui concerne le lien entre conventionalité et constitutionnalité, le Conseil n'a pas fait évoluer la jurisprudence de 1975 sur la loi autorisant l'interruption volontaire de grossesse. Il considère qu'il appartient à la Cour de cassation et au Conseil d'État d'appliquer les conventions, sans s'instaurer, malgré le souhait de certains constitutionnalistes, juge de la conventionalité. Il veille toutefois à ce que ses décisions soient cohérentes avec les principes dégagés par la Cour européenne des droits de l'homme.

Madame Capdevielle, dans le cas de la garde à vue, on peut comprendre que le Conseil constitutionnel ait imposé un délai au Parlement pour légiférer, le risque juridique posant un problème considérable. La Cour de cassation a décidé en assemblée plénière de ne pas reporter l'application de sa décision de s'en remettre à la Convention européenne des droits de l'homme. Par conséquent, les juridictions se sont trouvées dans une situation compliquée, pendant une période assez longue. Dans d'autres cas, pour réduire la période de vide juridique, le Conseil a utilisé la technique de la réserve d'interprétation, mais celle-ci a suscité des critiques, le juge constitutionnel se voyant reprocher de se substituer au législateur.

Celui-ci est-il bridé par un trop grand nombre de principes constitutionnels ? C'est à lui qu'il appartient de répondre à cette question. Je considère cependant que ces principes font partie de l'identité d'un pays, et que chacun doit s'y retrouver.

Le Conseil a pour vocation d'arbitrer, au regard des principes constitutionnels, entre ces logiques contradictoires que sont la gestion des contraintes et la protection des libertés. Sa compétence consiste à garantir les droits et libertés en les rappelant aux autres instances, sans s'immiscer dans leurs responsabilités et leurs pouvoirs. Il évite, je l'ai dit, toute contradiction entre ses propres décisions et celles de la Cour européenne des droits de l'homme et de la Cour de justice de l'Union européenne.

Jusqu'à présent, il s'est toujours abstenu d'émettre un avis sur le référendum, au motif que celui-ci relevait d'une forme de démocratie directe, mais les nouvelles dispositions constitutionnelles modifient la donne. Il est encore trop tôt pour se prononcer sur la manière dont il appréhendera cette nouvelle prérogative. Je réserve donc ma réponse sur ce point.

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