Intervention de Gaby Charroux

Séance en hémicycle du 26 février 2013 à 15h00
Contrôle et simplification des normes applicables aux collectivités territoriales — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGaby Charroux :

Monsieur le président, mesdames les ministres, chers collègues, ce texte entend remédier à la multiplication des normes applicables aux collectivités territoriales, dénoncée sur tous les bancs. En effet, l'hypertrophie des normes crée de l'insécurité juridique et complique considérablement la tâche des élus, notamment dans les zones rurales.

Cependant, n'est-il pas nécessaire de nous interroger sur la cause de cette hypertrophie ? Lors de la précédente législature, ont été votés plusieurs projets de loi pléthoriques, fourre-tout, illisibles, censés pourtant « simplifier les normes ». Notre groupe disait déjà, à l'époque, que de tels véhicules législatifs avaient de grandes chances de complexifier encore plus le maquis de la réglementation.

Il est d'ailleurs pour le moins paradoxal que l'explosion des normes soit l'oeuvre du régime libéral que nous avons connu ces dernières décennies ! Le primat du juridique sur le politique et la montée en puissance d'institutions non démocratiques comme la Commission européenne sont sans doute les causes de ces phénomènes. Si l'on ne s'attaque pas aux racines de cette prolifération, on peut bien vouloir simplifier sans cesse, le risque est de ne poser qu'un pansement sur une jambe de bois.

Mais venons-en au coeur de cette proposition de loi. Son objectif est de faire le bilan de l'inflation législative et de mesurer l'impact de cette dernière sur les décisions des acteurs publics locaux, pour apporter des solutions. Nous ne pouvons que souscrire à cet objectif, tant les difficultés rencontrées par les élus locaux sont réelles. Mais, d'une façon générale, est-il opportun de légiférer en matière de collectivités territoriales, alors même que l'acte III de la décentralisation est déjà largement engagé ? Pour nos territoires, cette multiplication des textes concourt-elle à la simplification ?

Plusieurs dispositions de cette proposition de loi d'origine sénatoriale ont été supprimées par notre commission des lois, notamment l'article 18 qui mettait en danger les centres communaux d'action sociale. Nous nous félicitons de cette évolution.

L'amendement de l'UMP tendant à introduire un principe de proportionnalité pour les collectivités territoriales signale les difficultés des plus petites d'entre elles, qui sont réelles. Mais son adoption ne reviendrait qu'à contourner le problème et à créer de nouvelles sources d'inégalités, selon les richesses disponibles au sein des territoires.

Il ne faut pas se méprendre : le véritable débat, c'est celui des moyens financiers et non celui de la seule simplification des normes. À ce titre, lorsque la ministre, au cours de nos débats, affirme que « la maîtrise des dépenses est au coeur des préoccupations des élus, qui participent à l'effort de solidarité demandé à tous, à l'État comme aux collectivités territoriales et aux citoyens », faut-il rappeler que c'est précisément ce dogme ultralibéral, imposé par l'Europe, qui cause les difficultés dont nous parlons ? Faut-il rappeler qu'il existe des élus qui se battent au quotidien contre ces politiques d'austérité ? Faut-il rappeler que le Front de gauche, mais aussi de nombreux économistes et le mouvement social en contestent radicalement le bien-fondé ?

Suppression de la taxe professionnelle, suppression de dotations et de subventions, allégements fiscaux bénéficiant aux entreprises, compétences transférées et nouvelles attributions conférées aux collectivités sans les compensations financières exigées : ce sont là les causes véritables des difficultés de nos territoires.

Si nos plus petites collectivités ne disposent pas des outils d'ingénierie publique leur permettant d'appliquer les normes nationales, pourquoi les députés de l'UMP ont-ils chaudement applaudi, cinq ans durant, au non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux partant à la retraite ? Pourquoi ont-ils soutenu la réorganisation des services déconcentrés dans le cadre de la révision générale des politiques publiques ? Ces politiques sont précisément celles qui privent nos collectivités modestes de l'ingénierie de l'État. Cette proposition de loi propose en définitive de gérer la pénurie, en permettant aux collectivités d'abaisser leur niveau de normes et de réglementation, et de s'adapter à leur sous-dotation budgétaire.

Vous l'aurez compris, mes chers collègues, si notre groupe souscrit à une clarification rapide de l'arsenal normatif pesant sur les collectivités territoriales, ce n'est qu'à condition de ne pas s'engager dans la voie de la déréglementation ou de la dérégulation, en reléguant, par exemple, les objectifs d'accessibilité ou de sécurité, les normes sanitaires ou de protection de l'environnement. Aussi les députés du Front de gauche s'abstiendront-ils sur ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

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