Monsieur le président, mesdames les ministres, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la présente proposition de loi, soumise aujourd'hui à votre vote, ambitionnait initialement de simplifier les normes applicables aux collectivités territoriales.
Déposé en août 2011 sur le bureau du Sénat par notre collègue Éric Doligé, le texte s'inspirait largement des conclusions du rapport qu'il avait remis trois mois auparavant et qui présentait pas moins de 268 propositions pour simplifier le droit applicable aux collectivités territoriales.
Ce texte s'inscrit dans une prise de conscience amorcée en 1991, sous l'impulsion d'un rapport au vitriol du Conseil d'État, qui fustigeait la « prolifération des textes », l'« instabilité des règles » et la « dégradation de la norme ».
Depuis, un intense travail de réflexion a été mené et des études en tous genres ont été produites, dont plusieurs par nos collègues ici présents ; le législateur a pris sa part de responsabilité dans cette évolution bienvenue de notre rapport au droit en général et à la norme en particulier.
Il était temps : la charge humaine et budgétaire que nos quatre cent mille normes font peser sur nos collectivités, et singulièrement sur les plus petites d'entre elles, est aujourd'hui insoutenable, spécialement à l'heure de la sobriété budgétaire et alors que la puissance publique se doit d'être réactive.
Ce constat est aujourd'hui partagé sur tous les bancs, comme l'a mis en évidence le travail réalisé aussi bien en commission des lois qu'en séance publique jeudi dernier. La proposition de loi de nos collègues Jean-Pierre Sueur et Jacqueline Gourault, adoptée par le Sénat en première lecture le 28 janvier dernier, participe également de ce mouvement partagé en faveur de la simplification du droit en général et des normes en particulier.
Éric Doligé a souhaité s'attaquer à ce problème. On comprend qu'il ait voulu agir en urgence tant le phénomène de production législative s'est accéléré sous les dernières législatures. Pierre Mazeaud, ancien président du Conseil constitutionnel, ne disait pas autre chose lorsqu'il évoquait la « mauvaise santé législative » lors de ses voeux en 2005.
Le temps de la médecine douce est terminé : le problème appelle une approche d'ensemble. Tel est le sens du message du Président de la République lors des États généraux de la démocratie territoriale. La majorité, pleinement consciente de cette nécessité eu égard à ses responsabilités territoriales, a entrepris ce travail dans un esprit dénué de postures partisanes qui sont un luxe que personne ne serait plus en droit de se permettre.
Il convient toutefois d'aborder ce chantier en nous appliquant dès maintenant nos propres conseils, à savoir une certaine sobriété en matière de production législative et l'inscription de cette initiative au sein d'un mouvement d'ensemble lisible et cohérent.
Cette proposition, aussi bien en commission qu'en séance, a ainsi été circonscrite aux objets les plus urgents, et qui n'ont pas vocation à être inclus dans d'autres textes, qu'il s'agisse de la proposition de loi de M. Sueur et Mme Gourault ou, surtout, des deux grands textes fondamentaux qui viendront marquer de leur empreinte un progrès certain pour nos territoires : le futur projet de loi relatif à l'urbanisme et au logement ainsi que celui relatif à la décentralisation et à la réforme de l'action publique. Onze articles ont par conséquent été supprimés.
Désormais expressément dédiée à la simplification du fonctionnement des collectivités territoriales, comme son nouveau titre l'indique, la proposition de loi marque de réelles avancées pour nos institutions territoriales, dont les missions essentielles sont ailleurs que dans le décryptage législatif et réglementaire. La dématérialisation des actes administratifs est ainsi encouragée tout en conservant l'égal accès des citoyens à l'information d'intérêt public, le champ des délégations que les assemblées locales peuvent accorder aux exécutifs est étendu aux demandes de subventions auprès de l'État et d'autres collectivités, certaines procédures en matière de comptabilité publique sont simplifiées.
Plusieurs articles ont fait l'objet de débats plus intenses, en particulier le premier, instaurant un principe de proportionnalité des normes et celui de leur adaptation à la taille des collectivités. Si l'intention était louable, les débats ont permis de souligner le caractère inopérant d'un tel principe, les outils à notre disposition ouvrant déjà cette voie, à charge pour le législateur d'en prévoir la déclinaison au cas par cas.
La majorité a également marqué son refus de fragiliser le maillage territorial des centres communaux d'action sociale par la suppression de l'article 18. Les discussions amorcées par le Gouvernement sur le sujet de l'action sociale des petites communes devraient permettre d'aboutir à une action plus mesurée.
Je tiens à saluer l'esprit de dialogue du Gouvernement qui s'est montré attentif aux préoccupations exprimées, notamment à propos des dispositions en matière d'urbanisme et de celles concernant la remise à jour de l'article 75 du code civil – nous étions tous d'accord pour supprimer la lecture de l'article 220 dudit code… (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
Je salue également le travail constructif permis par M. le rapporteur ainsi que les échanges que nous avons pu avoir, et je voudrais vous inviter à la sagesse.
Nous prenons conscience des dangers inhérents à l'excès de normes, dans ce domaine comme dans d'autres, et de la nécessité de trouver un équilibre sous le regard vigilant des territoires de France.
« La vie, c'est comme une bicyclette, il faut avancer pour ne pas perdre l'équilibre. » Ces mots d'Einstein résonnent comme une leçon de sagesse que nous devons suivre.
Alors, mes chers collègues, je vous dis : « Avançons ! » et je vous appelle à voter ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et UMP.)