Intervention de Pierre Ducret

Réunion du 27 février 2013 à 9h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Pierre Ducret, membre du comité de direction du groupe Caisse des Dépôts :

L'objectif de rénovation de 500 000 logements par an devrait concerner 120 000 logements sociaux et 380 000 logements privés. Je considère que la rénovation du logement social est financée. En tablant sur un coût légèrement inférieur à 20 000 euros par logement, le besoin de financement annuel pour la rénovation du logement privé est de l'ordre de 7,2 milliards d'euros.

Nous disposons d'un milliard d'euros dans le budget de l'État, auquel il faut ajouter des financements provenant des collectivités locales, du FEDER, et des ressources ponctuellement issues de l'ANAH, fléchées sur la précarité énergétique – grâce aux investissements d'avenir et aux ventes de quotas de CO2. Pour les cinq prochaines années, les ressources publiques doivent donc s'élever à environ 1,5 milliard par an. Par ailleurs, en prenant en compte l'hypothèse de croissance des tarifs de l'énergie retenue par la Commission de régulation de l'énergie, les économies d'énergies peuvent dégager un financement de 4 milliards d'euros sur une durée de douze ans – montant sur lequel peuvent intervenir des tiers investisseurs.

Le besoin d'autofinancement s'élève donc à un peu moins de 2 milliards d'euros, ce qui n'est pas excessif au regard des dépenses autofinancées par les ménages pour des travaux de rénovation. Sur la base de ces ordres de grandeur, l'opération semble finançable.

Il est malheureusement difficile de répondre aux questions relatives aux certificats d'économies d'énergie car les données les concernant ne sont pas connues. On sait seulement que plusieurs centaines de millions d'euros par an permettent aux bénéficiaires de collecter une prime finale d'un montant représentant 5 à 10 % des travaux. Les CEE, qui ont des effets très positifs, ne sont pas à proprement parler un système de financement mais plutôt une prime : une récompense pour les bénéficiaires et une incitation pour les énergéticiens. L'évaluation de la Cour des comptes permettra de mesurer la part qu'il faut réserver à ce dispositif, et celle qu'il faudrait donner, au moment de la transposition de la directive, à un autre mode de financement de la rénovation thermique – ni l'Allemagne, qui a dix ans d'avance sur nous, ni le Royaume-Uni ne disposent de CEE. Cette analyse permettra de savoir dans quelle mesure les énergéticiens peuvent participer à ce financement, comme ils le font en Allemagne.

En effet, pour financer sur douze ans des opérations qui se rémunèrent sur des économies d'énergie, il faut pouvoir immobiliser des fonds propres et servir un taux d'intérêt très faible. Il serait évidemment préférable que cette dette soit privée – les fonds des énergéticiens ont cet avantage –, et que l'opération soit neutre pour les finances publiques. L'enjeu est stratégique pour le plan de financement global de la rénovation thermique.

L'organisation de l'intervention des acteurs publics et privés dans l'expertise, le diagnostic, et l'information constituent un sujet majeur qui porte le nom de « guichet unique ». Les différents échelons de collectivités locales sont concernés, mais les opérations de financement nécessaires ne sont envisageables qu'au niveau régional.

Les contraintes des pouvoirs publics, les conditions de transposition de la directive, le niveau de mobilisation des réseaux bancaires conditionnent la forme que prendra le fonds auquel nous réfléchissons. Nous sommes ouverts sur le sujet. En tout état de cause, il faut injecter des fonds à long terme dès le départ – cela relève de la BEI –, immobiliser des fonds propres et organiser la liquidité du système afin de déboucher sur le marché obligataire.

M. Arnaud Leroy, la BPI est entièrement tournée vers le financement des entreprises en crédits et en fonds propres. Elle contribuera à la rénovation thermique du bâtiment en finançant les entreprises concernées. Son intervention pourrait permettre d'éviter les errements que nous avons connus avec les énergies renouvelables car, si la filière est brillante, elle est aussi en cours de construction. Si les fonds propres et le crédit manquent pour soutenir son développement, la demande risque de s'adresser à d'autres – je pense à un grand pays voisin très performant dans ce secteur.

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