Monsieur le directeur général, dans votre message sur le site de l'OMC, vous écrivez : « L'ouverture des marchés et la réduction des obstacles au commerce ont été, restent et resteront essentielles, j'en suis convaincu, pour promouvoir la croissance et le développement, élever le niveau de vie et lutter contre la pauvreté. » Il y a quelques mois, alors que vous nous receviez, avec quelques-uns de mes collègues, à Genève, à la question de savoir s'il était envisageable d'instaurer, dans les échanges mondiaux, des normes éthiques, sociales et environnementales, vous m'aviez répondu que ce n'était pas votre mandat, lequel consiste à limiter ou détruire les obstacles au commerce mondial et à généraliser le libre-échange. Mais le modèle de développement qui est en train de s'imposer au niveau mondial ne revient-il pas, finalement, à s'en remettre, pour l'organisation du monde, aux marchands ? Or, leur but n'est pas l'avènement d'une société humaine équilibrée, mais le profit.
Notre planète compte encore 900 millions de personnes mal nourries. Dans les pays du Sud, le libre-échange a consisté à ouvrir les marchés locaux aux importations, longtemps subventionnées, notamment par les Européens, et à limiter les exportations. Les pays africains n'y ont pas trouvé leur compte : ils ont perdu en autonomie alimentaire et leurs marchés locaux ont été désorganisés. Le droit des peuples à la sécurité et la souveraineté alimentaires ne devrait-il pas primer les règles du libre-échange ?
Dans le même ordre d'idée, la protection de l'environnement et le réchauffement climatique étant des enjeux majeurs, ne devrait-on pas, au lieu d'encourager les échanges, limiter les échanges inutiles et prôner une forme de « relocalisation » à l'échelle des continents ?
Les dirigeants libéraux de l'Union européenne s'abritent constamment derrière l'OMC pour repousser toute idée de taxe carbone aux frontières de l'Union et toute tentative pour protéger telle ou telle production. La nouvelle politique agricole commune, qui sera essentiellement fondée sur une distribution d'aides à l'hectare, ne suffira pas. Aujourd'hui, les éleveurs meurent dans notre pays alors que les céréaliers gagnent bien leur vie. Pourquoi l'Union refuse-t-elle cette politique contracyclique pourtant en vigueur aux États-Unis ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen, du groupe écologiste et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.)