Intervention de Jean-Marie Tetart

Séance en hémicycle du 11 mars 2013 à 21h45
Tarification progressive de l'énergie — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Marie Tetart :

Madame la présidente, madame la ministre, monsieur le rapporteur, c'est la troisième et dernière lecture : comme cela a été laborieux !

Que d'énergie dépensée pour passer d'un dispositif qui devait à la fois changer radicalement la consommation dans les bâtiments d'habitation et pourfendre la précarité énergétique, à un simple exercice de sensibilisation et de pédagogie à l'égard de nos compatriotes !

On pourrait s'en amuser, si le texte de loi ne lançait pas, par ailleurs, un gigantesque mitage éolien imposé aux territoires et s'il ne proposait aussi des expérimentations dans le domaine de la tarification de l'eau. En tout cas, le système qui va être voté, s'il devient un jour opérationnel, aboutira à montrer des évidences.

Il montrera que, si la précarité énergétique touche les plus démunis, ce n'est pas parce qu'ils ont moins de ressources à consacrer à l'énergie, mais parce que, comme l'a montré récemment une étude du CRÉDOC, ils occupent les logements les moins bien isolés, parce qu'ils vivent plutôt en zones périurbaines ou rurales, parce que leurs déplacements consomment une part importante de leur budget et parce que dans ces zones, on dépend davantage du pétrole pour se chauffer ou se déplacer.

Plus qu'une précarité énergétique liée à l'habitation, c'est une précarité énergétique résidentielle qu'il faut évaluer, en retenant le « coût résidentiel », qui intègre le coût du logement et de ses charges et le coût des déplacements qui s'imposent au ménage. C'est ce coût résidentiel, recommandé par le CRÉDOC, qui devient pertinent pour bâtir des politiques adaptées à la réduction des inégalités économiques et territoriales. C'est ce que nous avons essayé de vous dire, à longueur d'amendements et d'interventions. Votre dispositif introduit de nouvelles inégalités sociales et territoriales. Le bonus-malus n'apportera aucune solution à ceux qui sont les plus fortement touchés par ce coût résidentiel.

Votre dispositif, qui n'est plus qu'un outil de sensibilisation, comme vous le soulignez désormais, est coûteux et complexe. La seule et vraie voie à suivre prioritairement en matière de réduction des consommations d'énergie résidentielle, c'est de lancer un vaste programme d'isolation des bâtiments d'habitation. C'est un programme d'utilité nationale, créateur d'emplois pérennes et non délocalisables, et qui soutiendra sur tout le territoire national les petites entreprises du bâtiment.

Mais que de chemin il reste à faire ! Vous proposez bien le développement d'une aide à la maîtrise d'ouvrage : je l'appuierai sans réserve si elle sait réunir les compétences déjà existantes des divers agences et organismes. Il est tellement urgent de rendre fiable le diagnostic de performance énergétique ! Quoique totalement erratique, il sert aujourd'hui de référence pour les mutations et les locations.

L'évolution des modalités régissant la prise de décision des copropriétés n'est pas moins urgente. La reconnaissance et la montée en régime d'une grande cause nationale, celle de l'isolation des bâtiments d'habitation, aurait dû mobiliser toutes les énergies. Il nous tarde tant de savoir comment vous financerez cette grande cause nationale et quelles seront les mobilisations exceptionnelles de financement et les dispositions fiscales qui seront adaptées. Faire de l'isolation des résidences la priorité absolue, c'est le moyen le moins coûteux et le plus pérenne de réduire la précarité énergétique et de donner du sens au développement des énergies alternatives.

Donner du sens aux énergies alternatives, ce n'est pas les imposer aux maires et aux populations comme vous voulez le faire. Par l'encouragement inconditionnel qu'il veut donner au mode éolien, votre projet organise et impose un mitage éolien du territoire, au nom du miracle attendu de la révolution des emplois verts. Le lobby industriel éolien ne s'y trompe pas : il envoie déjà ses prospecteurs dans les campagnes pour séduire propriétaires et exploitants et faire signer des promesses de réservations de terrains.

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