Intervention de Eduardo Rihan Cypel

Réunion du 21 février 2013 à 9h00
Commission de la défense nationale et des forces armées

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaEduardo Rihan Cypel, député :

Peut-être serai-je amené à répéter certains aspects des interventions précédentes : c'est le signe que nous sommes d'accord sur les problématiques et les enjeux fondamentaux en matière de cybersécurité.

Depuis que je travaille à ces sujets, c'est-à-dire depuis mon élection en juin dernier, j'ai pu mesurer leur importance dans l'organisation de l'ensemble de la société. L'accélération de la révolution amorcée il y a une trentaine d'années a provoqué des bouleversements sociaux considérables. Tout est intégré aujourd'hui, ce qui pose avec force la question de la sécurité des réseaux et de l'acheminement de l'information, mais aussi celle de la sécurité de l'information elle-même.

De la protection du simple citoyen à la sécurité nationale et internationale, les enjeux sont multiples. Les spécialistes en ont une conscience claire : pour eux, ces enjeux ne sont pas seulement virtuels, ils sont aussi d'ordre physique et matériel. Les attaques contre nos systèmes d'information peuvent mettre à bas les circuits numériques pour nous empêcher de communiquer, pour récolter des informations dans le cadre de l'intelligence économique, pour déstabiliser les réseaux ; mais il est également possible, par exemple, d'ouvrir les vannes d'un barrage après avoir pris le contrôle de son système informatique, ou de s'emparer d'un système de contrôle de transports ferroviaires pour provoquer des accidents.

On se souvient du virus Stuxnet, qui a provoqué la désynchronisation des centrifugeuses iraniennes destinées à l'enrichissement de l'uranium et la destruction de 20 à 30 % de ces équipements. La dernière attaque de grande ampleur est celle qui a été menée l'été dernier contre la compagnie pétrolière saoudienne Aramco, infectant 30 000 ordinateurs de l'entreprise. On le voit, les cyberattaques peuvent quasiment provoquer un choc pétrolier.

Le cyberterrorisme prendra très probablement de l'importance dans les années à venir. Nous devons nous préparer à y faire face en mobilisant tous les efforts de la nation. Le Livre blanc de 2008 avait identifié ces sujets comme majeurs, les plaçant presque au même niveau que la dissuasion nucléaire et les forces balistiques conventionnelles. Cela représentait une prise de conscience importante.

Aujourd'hui, nous devons tenir trois enjeux principaux.

D'abord la sécurité nationale. Si l'ANSSI est au coeur de ce combat pour ce qui est de la protection de l'appareil d'État et des grandes entreprises, il reste du travail à accomplir dans tous les segments de la société française : je pense par exemple aux PME exposées au risque d'espionnage économique mais aussi aux particuliers confrontés à la cybercriminalité – près 10 millions de Français ont été victimes de cyberescroqueries l'année dernière pour un coût total estimé à 2,5 milliards d'euros –, notamment par défaut de sécurisation de leurs données bancaires et personnelles. Même si des progrès existent, la prise de conscience est encore insuffisante pour permettre une mobilisation nationale. Je souscris à l'idée selon laquelle la sécurité numérique est un enjeu d'indépendance nationale. La France doit prendre cette question à bras-le-corps.

Les travaux préparatoires au prochain Livre blanc accordent une importance centrale à la cybersécurité. Si je suis confiant de ce point de vue, je pense aussi que la formation est insuffisante.

Le deuxième enjeu est donc celui de la formation. Nous devons créer des filières universitaires qui nous permettront d'accroître le nombre d'ingénieurs dans ce domaine.

Le troisième enjeu est économique. Les questions de sécurité représentent une opportunité formidable pour créer de nouvelles filières économiques et industrielles. Les entreprises qui évoluent dans le secteur présentent des taux de croissance à deux chiffres. Nous avons des atouts – Cassidian, Thales et beaucoup d'autres –, mais il faut encore nous mobiliser car le travail ne fait que commencer.

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