Intervention de général Bertrand Ract Madoux

Réunion du 24 juillet 2012 à 16h30
Commission de la défense nationale et des forces armées

général Bertrand Ract Madoux, chef d'état-major de l'armée de terre :

Monsieur Audibert-Troin, l'armée de terre accomplit ses missions au profit de la population puis repart, de sorte qu'elle n'en tire pour ainsi dire que peu profit dans les médias. Reste qu'elle est toujours disponible ; c'est dans cet esprit que nous nous efforçons d'améliorer ses capacités d'intervention.

Chacun, dans nos armées, adhère à l'idée d'une relance de l'Europe de la défense, comme il a approuvé la clarification des relations avec l'OTAN : en effet, depuis 1965, chaque réunion au sein de cette organisation à Bruxelles débutait par une explication de la position française ! Cela dit, le principal problème de la défense européenne est qu'une partie des pays européens fait confiance à l'OTAN et aux autres pays, réduisant en conséquence drastiquement leur effort en matière de défense. La première motivation de notre ministre est, je pense, de remobiliser ces pays.

La deuxième grande orientation consiste à réaliser des économies grâce à des mises en commun. Le drone watchkeeper intéresse l'armée de terre dans la mesure où, en plus de répondre précisément à ses besoins, son développement a déjà été financé par les Britanniques. Mes homologues britannique, allemand, italien et moi avons réfléchi, en petit comité, à des solutions en matière de mutualisation. Je pourrais ainsi évoquer les perspectives de mutualisation avec les Allemands dans la formation des équipages de lance-roquettes unitaire, ceux-ci étant en avance sur nous en ce domaine. Nous avons aussi évoqué la formation des équipages d'hélicoptères avec les Italiens.

Il faut néanmoins raison garder. En l'absence d'Europe politique, la coopération dans les domaines de la défense et du renseignement restera forcément limitée, chaque pays entendant préserver son autonomie de décision. La deuxième guerre d'Irak avait ainsi fissuré la solidarité européenne, notamment entre, d'un côté, les Britanniques et les Italiens et, de l'autre, les Français et les Allemands. De même, les Allemands ne se sont pas engagés en Libye ; mais une mutualisation excessive mène à la paralysie. Si elle est assez naturelle dans le transport aérien et maritime ou la formation, les Allemands étant par exemple intéressés par une coopération pour la formation de parachutistes, elle est plus difficile dans l'interopérabilité, celle-ci étant d'ailleurs facilitée par la détention de matériels communs ; mais cela suppose souvent des programmes définis dix ou quinze ans à l'avance, comme c'est le cas à Bourges avec les Britanniques avec le canon de 40 millimètres CTA. En tout état de cause, je veux tempérer les espérances en matière de coopération, qui à mon avis ne génère pas d'économies considérables, même si elle constitue souvent un signal fort. Le week-end dernier, à Coëtquidan, ont été récompensés, par un général allemand et en présence du ministre de la défense, cinq jeunes Allemands qui venaient d'achever leurs trois années de scolarité à Saint-Cyr après avoir préparé le concours pendant deux ans. De la même façon, quatre ou cinq officiers français de l'armée de Terre sont formés chaque année en Allemagne.

En cas de décès survenus au cours d'une même opération sur le territoire national, madame Poznanski-Benhamou, la mise en oeuvre des dispositions définies par les articles L.50 et 33 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre fait apparaître des disparités flagrantes selon qu'il s'agit d'un militaire ou d'un membre des forces de l'ordre. Les conséquences sur la pension des ayants cause sont de l'ordre de 50 %. Cette disparité fait l'objet d'une réflexion au sein du ministère.

La différence de traitement entre un soldat tué en opérations extérieures et un autre qui l'est au fin fond de la jungle guyanaise est très sensible, bien qu'il s'agisse dans les deux cas d'opérations de combat. Même si cette question ne constitue pas une revendication majeure, nous allons donc la suivre de près.

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