Intervention de Patrick Roméo

Réunion du 26 février 2013 à 17h00
Délégation aux outre-mer

Patrick Roméo :

Je tiens à préciser que dans le code minier actuel – qui, de mon point de vue, est plutôt bien fait – le sous-sol, qui est un bien commun, appartient à l'État. Nous sommes rémunérés pour l'extraire et le commercialiser. Différents modes de rémunération sont possibles. Dans certains systèmes, on extrait, on commercialise et on verse des royalties à l'État sur chaque baril vendu. Dans d'autres, l'État se paye en nature et récupère un pourcentage de la production qu'il vend pour son compte. Le sous-sol étant le bien commun de la Nation, il est fondamental que celle-ci gère son bien et décide de ses conditions d'exploitation.

Sur la fiscalité, je n'ai aucun commentaire. C'est la prérogative de l'État et du Parlement. En revanche, et quel que soit le modèle choisi, cette fiscalité doit être équitable, aussi bien pour la Nation que pour la personne qui a investi dans l'aventure sans en connaître l'aboutissement, tout en en assumant les risques. En l'occurrence, je dois être sûr d'être raisonnablement rémunéré, compte tenu des moyens que j'ai mobilisés et de la compétence et de l'expertise que j'ai apportées à la France, et dont elle ne dispose pas.

Je suis absolument d'accord sur le fait que l'opérateur et le consortium doivent assumer leurs responsabilités. Nous assumerons les nôtres, mais nous devons être rémunérés pour cela. Je dépense x milliards pour produire, j'ai un risque de x milliards en cas d'incident, et il faut que je gagne ma vie entre le moment où j'investis et le moment où je produis. Sinon, pourquoi investir ?

Pour moi, c'est une question d'équité : toutes les parties – l'État, l'investisseur et le public – doivent être satisfaites.

Autre point : j'ai toujours grand plaisir à parler de mon métier et de mon activité. Je l'ai fait en Guyane, et je le referai. L'information du public est essentielle, parce qu'il n'y a rien de pire que l'ignorance. Tous ceux que nous accueillons sur le Stena Icemax, quel que soit leur profil, y découvrent quelque chose qu'ils ne connaissaient pas. Mais comme on ne peut pas amener toute la Nation sur le Stena Icemax, il faut amener le Stena Icemax à la population. De la même manière, il faut lui parler de notre projet, dont la vertu fait ma fierté. Je suis en effet très fier d'être un Français qui mobilise des capitaux étrangers pour la France. J'espère simplement qu'en retour, la France sera reconnaissante et ne verra pas dans cette démarche une intention cachée de piller le bien commun. Ce serait assez attristant.

L'information du public doit être assurée dans un cadre pragmatique. Elle ne doit pas durer trop longtemps : au bout d'un certain temps, il faut passer à la phase de réalisation. Nous devons savoir quel type d'information communiquer. Par exemple, si nous expliquons à tous les citoyens français comment se fait un forage, nous risquons d'en ennuyer beaucoup !

Si le public a confiance dans les experts qui lui exposent leur technique, il se contentera de développements assez généraux. Sinon, il exigera d'eux des précisions, et, à chaque fois que j'utiliserai un produit, je devrai le faire analyser par un grand nombre d'organismes d'État indépendants. Dès lors, l'information deviendra pénalisante.

Ce pays souffre de désindustrialisation. Il faut éviter que l'information du public ne freine l'industrialisation. Cela suppose de trouver le bon équilibre. Je fais bien sûr tout à fait confiance à la représentation nationale pour y parvenir. Mais, pour ma part, je ne ferai jamais de commentaire sur la fiscalité. Si celle-ci n'est pas équitable, nous n'investirons pas, et ce serait dommage. Si elle est équitable, nous investirons avec beaucoup de plaisir – dans la mesure où nous trouvons un projet intéressant.

Je ne pense pas qu'il y ait un problème d'alignement de nos objectifs respectifs. Jamais personne n'a prospéré dans le cadre de contrats inéquitables. Et jamais personne n'a développé d'industrie contre la population. D'où l'importance de l'information et de l'acceptabilité du projet.

Nous faut-il un code minier spécifique à l'activité off-shore ? J'aurais tendance à penser que oui, tout simplement parce qu'il est difficile de mettre au point un système qui soit applicable à toutes les activités. Encore une fois, l'acceptabilité fiscale sur un projet off-shore n'est pas la même que pour une mine de nickel, où l'on est certain que le nickel est présent. Dans un projet off-shore, il faut prendre en compte le risque financier et l'amplitude des incidents qui peuvent survenir.

Enfin, monsieur le président, vous m'avez interrogé sur les observateurs indépendants. Comme leur nom l'indique, ils ne relèvent d'aucune instance : leur curriculum vitae ont été étudiés, scrutés, analysés, par les organisations environnementales. Ils ont été choisis par le WWF, et ce n'est pas nous qui les avons formés. Je ne les soupçonnerai jamais de ne pas être indépendants. En revanche, comme nous sommes obligés, de par la loi, de rémunérer ces observateurs ou ces cabinets indépendants, on nous soupçonne toujours d'influencer leurs résultats. Et il est extrêmement difficile de faire cesser de telles remarques.

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