Intervention de Marie-Françoise Leflon

Réunion du 13 mars 2013 à 9h00
Commission des affaires sociales

Marie-Françoise Leflon, secrétaire nationale de la CFE-CGC :

Les raisons pour lesquelles nos collègues n'ont pas signé l'accord leur appartiennent ; nous essayons, pour notre part, de vous convaincre du bien-fondé de nos positions. Ce contexte nous amène à faire de nos relations avec les autres syndicats un éclairage particulier. Pourtant, en 2011, c'est tous ensemble que nous avons négocié l'accord relatif à l'UNEDIC ou les accords pour l'emploi des jeunes, sans problèmes de représentativité ni de majorité de signatures. Nous nous connaissons bien et sommes capables de travailler ensemble. Aussi ne critiquons-nous pas les positions de nos collègues qui n'ont pas signé l'accord.

Dans le cas présent, nous faisions face à une difficulté particulière, la feuille de route nous imposant de lutter contre la précarité, de renforcer le dialogue social et de sécuriser les procédures de licenciement. Si la croissance économique était au rendez-vous et le niveau du chômage, moindre, si nous ne devions pas travailler vite afin de pallier les difficultés tant conjoncturelles que structurelles des entreprises, nous aurions pu adopter une autre démarche, laissant aux autres partenaires sociaux le temps d'évoluer, pour parvenir, au bout d'un an de réflexion, à un compromis commun. Mais dans la situation économique tendue que nous connaissons, il nous fallait trouver, avec le MEDEF, la CGPME et l'UPA, des solutions urgentes. C'est pourquoi, même imparfait, cet accord pragmatique devait être signé, afin de donner lieu le plus vite possible à des effets concrets.

Certains de ces effets seront rapides, d'autres moins, car les branches s'empareront de l'accord pour en adapter les grands axes à leur situation qu'elles connaissent mieux que quiconque. Le respect des entreprises et des salariés exige, après l'étape de la vision interprofessionnelle, de passer le relais aux branches et de leur laisser le temps de bien appréhender chaque sujet : le temps partiel, les contrats intérimaires, etc. Rien ne se fera sur le terrain sans la signature d'un accord.

Au-delà de la professionnalisation, certes nécessaire, des élus – qui pourront au demeurant faire appel à des experts –, la base de données leur fournira des possibilités nouvelles, devenant l'outil de partage des informations entre l'entreprise et les salariés. Quand le chef d'entreprise affirmera subir une baisse de compétitivité ou ne pas retrouver un coefficient d'exploitation normal, le salarié pourra le faire vérifier par son expert-comptable. La force de cet accord réside dans le dialogue social et dans cette base de données.

Les mots et les articles ont un sens précis. S'agissant de la mobilité, nous avons d'abord discuté de kilomètres et de délais de déplacement ; si nous avons décidé d'abandonner ces notions, c'est que celle de « conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale » nous est apparue plus à même d'assurer, au sein de l'entreprise, une définition judicieuse de la distance. Nous travaillons d'ailleurs actuellement, avec toutes les organisations syndicales, sur la qualité de vie au travail ; ce concept obéit donc à une vraie logique et possède une véritable transversalité. En l'absence d'un accord, c'est la loi existante sur la mobilité qui s'appliquera, les plans de départ volontaire, de mobilité et de compétitivité faisant déjà partie des pratiques. Il faudrait en revanche éviter de créer un effet d'aubaine, en rappelant que ce principe de mobilité interne caractérise des mesures « ne comportant pas de réduction d'effectifs » ; ces termes, plutôt que « sans projet de licenciement », sont fondamentaux. Cette phase de mobilité au moment de la modernisation de l'outil ne doit pas impliquer de licenciements, c'est pourquoi la CFE CGC, rejointe et soutenue par ses collègues, a insisté qu'en cas de refus du salarié, il s'agirait d'un licenciement économique individuel ouvrant le droit au contrat de sécurisation professionnelle (CSP), contrairement aux dispositions du projet initial tout comme aux accords de maintien dans l'emploi.

Nous touchons là au véritable avantage du dialogue social. Lorsque des organisations syndicales décident de réformer, cette prise des responsabilités demande du courage ; mais elles gagnent toujours plus que ne leur aurait apporté une simple loi ou le refus de négocier. Cet accord a été nourri de l'ensemble de nos contributions. Certes, le MEDEF a proposé un texte initial, mais sa première version a été rejetée en bloc. Lors de la négociation sur l'Association pour l'emploi des cadres (APEC), les cinq organisations syndicales avaient soumis à la discussion leur propre texte, considérant que celui du MEDEF était trop éloigné de leurs aspirations. Dans le cas présent, nous avons décidé de retravailler la seconde version du MEDEF. Nos contre-propositions l'ont profondément modifiée : l'article définitif sur les accords de maintien dans l'emploi ne ressemble absolument pas à sa version initiale. C'est donc aux organisations syndicales de remodeler le texte comme elles le souhaitent.

En matière de droits rechargeables, le déficit de l'UNEDIC a été évoqué dès la dernière négociation de la convention, lorsque nous avons mis en place la filière de quatre mois – qui s'est révélé un formidable soutien dans la crise économique de 2008-2010. Nous nous plaçons dans la logique de cette avancée des droits, en toute responsabilité. Tous négociateurs au sein de l'UNEDIC, nous savons que son déficit s'élèvera à 18 milliards d'euros fin 2013 ; le groupe paritaire déjà en place doit travailler sur la mise en oeuvre du dispositif des droits rechargeables sans perdre ces chiffres de vue.

S'agissant du contrat unique, le rapport Cahuc est régulièrement ressorti des tiroirs. À l'époque de la croissance économique, un tel contrat était inutile ; aujourd'hui, le CDI doit rester la norme. La feuille de route initiale visait d'ailleurs à redonner au CDI sa véritable logique, et c'est ce que nous avons cherché à faire à travers cet accord.

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