Mes remerciements vont à notre rapporteure pour avis qui a agi avec célérité, mais le groupe de l'Union pour un mouvement populaire regrette que l'annonce tardive de la date d'ouverture de la session extraordinaire nous ait laissé aussi peu de temps pour étudier les implications de cet article. En ce jour de rentrée scolaire, plusieurs d'entre nous sont en outre retenus dans leurs circonscriptions, ce qui est bien compréhensible.
L'emploi des jeunes est un sujet de préoccupation légitime, mais les solutions proposées aujourd'hui ne sont pas à la mesure de l'enjeu. À l'heure actuelle, la majorité tente par tous les moyens de montrer qu'elle applique le programme du candidat Hollande. Comme bon nombre de mes concitoyens, j'ai été surpris d'entendre le Président de la République reconnaître il y a quelques jours, dans un élan de sincérité, que la France traversait « une crise d'une gravité exceptionnelle, une crise longue » : le président Sarkozy le disait, et depuis fort longtemps, mais le parti socialiste ne l'a jamais admis – il n'est pire sourd, on le sait, que celui qui ne veut pas entendre… On revient aujourd'hui à la raison, et après avoir détricoté la défiscalisation des heures supplémentaires et la TVA anti-délocalisations, le parti majoritaire commence à mesurer la difficulté de la tâche. Mais, depuis que la gauche a pris le pouvoir, bien des dépenses nouvelles ont été décidées sans que l'on sache comment elles seront financées ou compensées – ainsi des créations d'emplois, à budget constant, dans la gendarmerie, la police et l'éducation.
Pour ce qui est du dispositif des emplois d'avenir professeur, je présenterai un amendement de suppression de l'article, car l'identification d'un public cible – les étudiants boursiers, et en priorité ceux d'entre eux qui ont résidé en zone urbaine sensible ou étudié en ZEP – crée une rupture d'égalité au détriment d'autres publics tout aussi méritants. En clair, un jeune qui se destine à l'enseignement mais dont les parents auraient le malheur de gagner un peu trop d'argent pour qu'il puisse prétendre à une bourse serait automatiquement exclu du dispositif. Autrement dit, en prétendant relancer l'ascenseur social par le mérite, vous portez atteinte à notre modèle républicain. Le fonctionnement des IPES était tout autre.
En outre, les enseignements privé et agricole sont écartés du dispositif : seuls les établissements publics pourront bénéficier de l'aide de 75 % accordée par l'État. Voilà qui ressemble fort à une nouvelle revanche prise sur l'enseignement privé, ce qui ne nous surprend pas après la création, votée en juillet, de 1 000 postes supplémentaires dans l'enseignement public, et de 70 seulement dans le privé, au lieu des 200 qui auraient été nécessaires au minimum pour respecter l'équilibre en usage. De deux choses l'une : soit les besoins sont avérés, auquel cas tous les établissements assurant une mission d'enseignement devraient être éligibles, qu'ils soient publics ou privés sous contrat ; soit ils ne le sont pas et il faut trouver un autre moyen de favoriser l'accès des étudiants boursiers aux concours. On sait que, dans certaines disciplines, le nombre de postes offerts au concours est supérieur au nombre de candidats, ce qui complique évidemment l'équation. Le texte mentionnant par ailleurs les seuls établissements publics locaux d'enseignement, on peut s'interroger sur la priorité accordée à l'enseignement primaire réaffirmée sur tous les tons ; nous attendrons de savoir ce que nous réserve sur ce point la grande loi de refondation de l'école.
En outre, aucune sanction n'est prévue dans le cas où l'étudiant ne respecterait pas ses engagements. Le texte passe sous silence l'importante question du recouvrement des aides versées, bourse comprise, lorsque le bénéficiaire abandonne ses études ou refuse de se présenter au concours. Il faut donc équilibrer le dispositif pour éviter des effets d'aubaine.
N'oublions pas que des 105 000 aides éducateurs recrutés sous le gouvernement Jospin au titre des « emplois jeunes », 75 % se sont retrouvés au chômage à l'issue de leur contrat de cinq ans. Un quart d'entre eux seulement ont débuté une carrière d'enseignant ou ont été recrutés par les collectivités locales qui ont pérennisé leur emploi – à leurs frais, bien entendu.
Enfin, présenter un nouveau dispositif de recrutement sans formation clairement définie nous laisse pantois. Nous prendrons position au cours des semaines à venir sur les autres mesures annoncées en matière d'éducation, dont la création des écoles supérieures du professorat.