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Intervention de Benoît Muracciole

Réunion du 13 mars 2013 à 9h30
Commission des affaires étrangères

Benoît Muracciole, président d'Action sécurité éthique républicaines :

Au sujet de la Chine, il convient de rappeler que si son budget militaire est d'environ 80 milliards d'euros pour 2013, celui des États-Unis dépasse les 2 milliards par jour.

Qu'en est-il des cinq membres permanents du Conseil de sécurité ? Le projet de traité a été soutenu à l'origine par deux d'entre eux : la Grande-Bretagne, puis la France en 2006. Les Russes ont reçu les ONG, ce qu'ils ne faisaient jamais auparavant : cela montre qu'ils se soucient désormais de leur image en la matière. En réalité, les Russes craignent de signer un traité dont ils n'auraient pas tout compris et qui les pénalise par rapport aux autres États. À notre sens, si la Chine, la France, la Grande-Bretagne et les États-Unis signent le traité, la Russie fera de même. Quant aux États-Unis, si on laisse de côté l'épisode malheureux de juillet 2012, leur président a été invité en 1999 à entamer des discussions sur un code de conduite international et les critères actuels sont presque tous déjà inclus dans leur législation. Leur seul problème est intérieur. La National Rifle Association, qui revendique plus de quatre millions de membres, en compte en réalité plutôt trois : sa communication est efficace et la confusion qu'elle a entretenue entre la détention intérieure et le contrôle du commerce des armes lui a permis de récolter de grosses sommes, mais elle perd beaucoup de terrain. De plus, ses adeptes gêneront d'autant moins les négociations à New York qu'ils sont focalisés sur la dimension intérieure depuis le massacre de Newtown. En somme, le contexte historique est plutôt favorable.

Des sanctions seront prévues pour les individus. Au niveau des États, la pression des pairs est efficace, même si elle l'est moins que l'on ne le voudrait. J'étais en Afrique du Sud lorsque la mobilisation de la société civile sud-africaine a permis, sans traité, de faire rebrousser chemin au bateau chinois chargé d'armes destinées à Robert Mugabe. Mais la ratification ne fera pas surgir du jour au lendemain un justicier héroïque : le processus dont nous parlons sera long.

En ce qui concerne la transparence, nous, ONG, avons suscité en 2006 la création à l'Assemblée nationale d'un groupe d'études que nous aimerions faire renaître. Nous comptons sur votre aide, car le dialogue entre parlements et gouvernements est essentiel. Au regard des outils analogues existant à l'étranger, la Commission interministérielle pour l'étude des exportations de matériels de guerre – la CIEEMG – fonctionne de manière satisfaisante ; mais, une fois son travail accompli, vient le moment de la décision politique, qui nous paraît parfois contestable. De ce point de vue, le Parlement pourrait contribuer à redresser la barre.

Vaut-il mieux un traité universel mais faible, ou un traité ferme mais peu fédérateur ? Nous en discutions il y a plus de vingt ans avec des ONG qui prônaient l'arrêt de la production, dont nous ne voyions pas bien l'intérêt. Car l'esprit, ici, n'est pas celui des conventions d'Ottawa ou d'Oslo : notre logique est inclusive. Nous avons besoin des principaux exportateurs d'armes au monde. Et comme le disait Barbara Frey, rapporteuse spéciale de l'ONU chargée de la question de la prévention des violations des droits de l'homme commises à l'aide d'armes de petit calibre et d'armes légères, un accord modeste au niveau onusien a un effet très important sur le terrain. L'un des chefs coutumiers de l'Ituri, au nord-est de la RDC, me confiait que la présence des armes donnait aux jeunes un sentiment de toute-puissance, de sorte que les problèmes de violence envers les femmes ou les enfants ne pouvaient plus être résolus comme ils l'étaient auparavant. A contrario, lorsque les armes se taisent, la parole émerge et il devient possible de résoudre les conflits. La position radicale qui consiste à réclamer l'arrêt de la production, ou à refuser le traité sous prétexte qu'il n'est pas parfait, peut faire plaisir à certaines ONG mais sera sans effet sur le respect des droits de l'homme et la protection des populations civiles sur le terrain.

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