Ma question s'adresse au ministre du redressement productif, et je veux y associer mes collègues Ségolène Neuville et Jacques Cresta.
Monsieur le ministre, je souhaite vous faire part du désarroi de nos entreprises de BTP en prise avec la concurrence européenne dont les coûts de main-d'oeuvre sont si bas qu'elles ne peuvent rivaliser. C'est vrai sur l'ensemble du territoire mais plus encore dans les départements frontaliers. Dans les Pyrénées-Orientales, le BTP, acteur économique représentant 10 % du chiffre d'affaires départemental, subit de plein fouet cette concurrence.
Quelques chiffres illustrent ce phénomène : de 10 800 salariés en 2008, le secteur est passé à 8 200 aujourd'hui. Trois cents détachements de salariés étrangers sont déclarés en 2012 mais on estime que le chiffre réel est deux ou trois fois plus élevé. Au troisième trimestre 2012, le nombre de demandeurs d'emploi dans le BTP a augmenté de 23,6 % par rapport à 2011. Le chiffre d'affaires dans le négoce de matériaux a baissé de 10 %. Le nombre de mises en chantier de logements entre 2011 et 2012 a diminué de 37 %. Les liquidations et redressements judiciaires ont augmenté de 12 % entre 2011 et 2012.
Le BTP est une activité de main-d'oeuvre : 50 à 60 % du chiffre d'affaires y sont consacrés.
Dans ces conditions, pour réduire les coûts comme les clients l'exigent, le seul levier reste l'aspect social. Les entreprises françaises se voient proposer régulièrement, et de plus en plus fréquemment, de la main-d'oeuvre de pays européens à des prix imbattables. Certaines recourent à de telles pratiques et réussissent ainsi à baisser leurs coûts et gonfler leur productivité. Les contrôles opérés ne décèlent pas d'illégalités car une vérification poussée par les services de l'État est quasiment impossible.
En effet il suffit aux prestataires étrangers de bien faire les formalités et de rémunérer le salarié au SMIC pour rendre le contrôle compliqué. Mais ces déclarations cachent souvent une minoration du nombre d'heures réalisées ou encore une sous-qualification du salarié. Par exemple, un maçon très qualifié payé au SMIC se retrouve loin des 1 900 euros prévus par la grille française de salaires.
Aujourd'hui les entreprises françaises employant des salariés français peinent à obtenir des marchés. Les écarts de prix avec certains concurrents avoisinent 30 voire 40 %.
Dans ces conditions, l'emploi de salariés du territoire devient difficile et bon nombre d'entreprises s'interrogent quant à l'utilisation d'une main-d'oeuvre de production venant des pays de l'Union européenne.
Sous l'effet de la seule baisse d'activité, nous planifions une perte de 40 000 emplois en France pour 2013. Mais si les entreprises décident de recourir à cette main-d'oeuvre de manière amplifiée, le nombre des licenciements pourrait exploser.
Monsieur le ministre, quelles mesures allez-vous prendre pour arrêter ce phénomène qui pénalise nos entreprises en même temps qu'il porte atteinte aux conditions d'emploi de l'ensemble des salariés ?