Je me demandais, en écoutant les différents orateurs, si nous habitions le même pays. L'Alsace-Lorraine aurait-elle pris son indépendance ?
J'ai beaucoup entendu parler des entreprises, alors que mon texte s'adresse aux millions de salariés qui éprouvent le plus grand mal à boucler leurs fins de mois : pour le coup, les banques se régalent avec les frais de découvert, qui atteignent des niveaux considérables.
Étant moi-même chef d'une petite entreprise, je connais les contraintes liées au paiement des cotisations et des salaires ; aussi mon amendement CE 2, qui n'a rien d'un poisson d'avril, propose-t-il de repousser l'application de la loi d'un an dans les très petites entreprises, en particulier de l'artisanat et du commerce. Le but de la proposition de loi n'est évidemment pas de mettre les entreprises en péril. Quant aux salariés en intérim, je rappelle qu'ils sont payés sous quinzaine: mon texte ne change rien à la loi.
La date de paiement des loyers, madame Bonneton, est fixée par un contrat librement négocié. Je propose seulement, pour ma part, que ce paiement ne puisse intervenir avant le 10 de chaque mois. Il arrive qu'il intervienne le 15 car, monsieur Piron, la négociation entre bailleurs et locataires peut en effet être civilisée ; mais force est de constater que, la plupart du temps, ce n'est pas le cas.
Enfin, dans le logement social conventionné, les loyers sont payés à terme échu. Un salarié locataire d'un tel logement est donc avantagé par rapport à un locataire du parc privé, qui acquitte son loyer sur le terme à échoir. Cette différence d'un mois crée une inégalité que la loi pourrait corriger.
On avait presque envie de sortir les mouchoirs en vous écoutant, monsieur Fasquelle ; mais l'effort demandé aux propriétaires, fussent-ils modestes, ne représente que cinq jours de trésorerie !
Je ne suis pas davantage convaincu par les objections formulées au sujet du paiement des salaires. Les situations, sur ce point, demeurent inéquitables. Dans le privé aussi, certains salariés sont payés avant la fin du mois, quand d'autres le sont le 10 du mois suivant. Un tel écart de quinze jours est-il admissible ? Il peut au surplus être source de difficultés pour un salarié qui passe d'une entreprise à une autre, où la date de versement n'est pas la même. Le législateur doit y mettre de l'ordre.
Gardons-nous, monsieur Fasquelle, de tout esprit partisan : compte tenu de la situation budgétaire dans laquelle l'ancienne majorité a laissé le pays, nous n'avions aucune marge de manoeuvre fiscale. La défiscalisation des heures supplémentaires avait un coût pour les finances publiques, contrairement à cette proposition de loi.
Enfin, j'ai toujours été surpris de constater, dans des affaires de divorce, lorsque se négocie la pension alimentaire, que les époux connaissent, presque à dix euros près, le niveau de leurs dépenses mensuelles. Pour ces personnes, un découvert de quelques dizaines d'euros peut déclencher un engrenage de découvert systématique, les frais bancaires s'accumulant chaque mois. C'est d'abord à cette majorité silencieuse que s'adresse ma proposition de loi.