Je n'ai pas besoin de répondre à nos collègues de la majorité, dont les arguments n'ont fait que conforter les nôtres. Je me concentrerai donc sur les observations émises par l'opposition.
Il est vrai que l'on aurait pu, pour traiter le sujet, passer par la voie réglementaire. Mais nous avons déjà perdu dix-huit mois depuis la première proposition présentée par Victorin Lurel. Et l'on voit bien, par ailleurs, que l'on ne peut pas compter sur les chartes de bonne conduite – une seule a été signée jusqu'à présent en outre-mer. Si nous voulons agir vite, nous devons donc passer par la loi.
Certains ont craint de favoriser les produits importés de l'étranger. Mais le texte proposé est sans ambiguïté : il concerne toutes les denrées distribuées outre-mer, qu'elles soient produites localement, dans l'Hexagone ou à l'étranger – aux États-Unis ou ailleurs.
Je n'ignore pas que le problème de l'obésité est multifactoriel. C'est d'ailleurs pourquoi j'ai appelé, lors de mon exposé liminaire, à ce que des dispositions complémentaires soient prises.
Il me paraît important d'élaborer des textes spécifiques à l'outre-mer, à l'instar du projet de loi sur la régulation économique. Insérée dans un grand projet de loi de santé publique, une disposition comme celle que nous examinons aujourd'hui passerait presque inaperçue.
Véronique Louwagie s'est demandé s'il ne faudrait pas inciter les industriels à réduire progressivement la teneur en sucres de leurs produits plutôt que de modifier brusquement la composition de ces derniers. Or le délai prévu par le texte leur offre déjà cette possibilité. D'ailleurs, depuis 2011, certains industriels – notamment des producteurs locaux de yaourts – ont entrepris de réduire la teneur en sucres des denrées qu'ils commercialisent. Ils le font graduellement, de façon à ne pas perturber leurs consommateurs, mais le résultat est que les taux actuels, sans être encore identiques à ceux des produits distribués en métropole, tendent à s'en rapprocher. L'adoption de la proposition de loi permettrait d'achever le processus.
Je vous confirme, monsieur Issindou, que des produits identiques, élaborés le même jour et sur la même chaîne de production, peuvent se voir appliquer des dates limites de consommation différentes – jusqu'à soixante jours, contre trente en métropole – s'ils sont distribués en outre-mer. On aurait pourtant pu s'attendre à l'inverse, dans la mesure où les produits alimentaires, outre-mer, sont plus sensibles à certains aléas, comme la rupture de la chaîne du froid.
Les industriels rappellent que la détermination de la date limite de consommation est laissée à la liberté du producteur. Rien ne les empêche donc de fixer une date deux fois plus éloignée en outre-mer qu'en métropole. Je pense pour ma part qu'il s'agit d'une véritable inégalité sanitaire, aussi grave que celle résultant des différences en matière de taux de sucre : même si un produit conservé plus longtemps n'est pas impropre à la consommation, il aura certainement perdu certaines de ses qualités gustatives et organoleptiques. Entre trente et soixante jours après la fabrication, on ne peut plus parler de « produit frais ».
De telles pratiques existent depuis déjà longtemps et tendent à perdurer, malgré les constats dressés par la DGCCRF. Pour y mettre un terme, nous devons adopter la proposition de loi.
Je note au passage que l'opposition partage notre objectif de mettre fin à la différence de taux de sucre entre l'Hexagone et les territoires d'outre-mer.
Jean-Pierre Door a évoqué l'arrêté prévu à l'article 2. Je proposerai qu'il se borne à fixer la liste des produits concernés et qu'il soit pris conjointement par les ministres chargés de la santé et des outre-mer. En effet, il me paraît préférable de définir la teneur maximale en sucres à laquelle doivent être soumis les produits alimentaires distribués outre-mer mais non distribués en France hexagonale directement dans la loi. Je proposerai qu'elle soit ainsi définie en référence à la teneur la plus élevée constatée dans un groupe de produits comparables commercialisés en France métropolitaine. Si cette proposition est retenue, il ne sera en outre plus nécessaire de recueillir l'avis du Haut Conseil de santé publique.