Intervention de Pascal Popelin

Réunion du 20 mars 2013 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Popelin, rapporteur :

Vendredi 15 mars 2013, le Sénat a adopté, en deuxième lecture, ces deux projets de loi relatifs aux élections locales, qui nous ont déjà occupés de longues heures. C'est une différence importante avec ce qui s'était passé lors de la première lecture, à l'issue de laquelle la Haute assemblée avait rejeté le projet de loi ordinaire, qui comporte les éléments essentiels de la réforme, n'adoptant que le projet de loi organique, lequel se limite à des mesures de coordination.

Après ces votes de nos collègues sénateurs, seize articles du projet de loi ordinaire et cinq articles du projet de loi organique ont été adoptés conformes par les deux assemblées. Parmi les dispositions concernées figurent la concomitance et le report à 2015 des élections départementales et régionales, l'abrogation du conseiller territorial, la nouvelle dénomination de « conseil départemental » au lieu de « conseil général », la nouvelle répartition par arrondissement des conseillers de Paris et l'inscription dans la loi de l'ordre du tableau des conseillers municipaux.

Pour autant, de nombreuses dispositions restent en discussion, puisque trente-huit articles du projet de loi et trois articles du projet de loi organique sont encore en navette.

Sur le volet « élections départementales », la situation est relativement simple, le Sénat ayant supprimé les articles 2, 3, 5 et 8 à 12, relatifs à un des éléments majeurs de la réforme : l'instauration d'un scrutin binominal paritaire. Sans surprise, je vous proposerai de les rétablir dans la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale en première lecture – à une différence près : je ne vous proposerai pas d'abaisser à 10 % des inscrits le seuil à partir duquel il est possible de se présenter au second tour, puisqu'un large accord, approuvé par le Gouvernement, est intervenu au Sénat pour maintenir celui de 12,5 % des inscrits.

En revanche, ce qui peut paraître paradoxal dans la mesure où il a rejeté le mode de scrutin concerné, le Sénat a adopté l'article 23, qui fixe les règles applicables au futur redécoupage cantonal, tout en lui apportant plusieurs modifications.

La plus importante consiste à porter de 20 % à 30 % l'écart maximal autorisé par rapport à la moyenne des populations des cantons d'un même département. J'avais longuement défendu le maintien d'un écart de 20 % au plus mais, compte tenu du large accord intervenu au Sénat et de la position défendue ici par nombre de nos collègues, je ne demanderai pas qu'on y revienne.

En revanche, je vous propose de revenir sur deux autres modifications, plus limitées, apportées aux règles de redécoupage cantonal. La première introduit une complication excessive en matière d'unicité territoriale des communes. La seconde est la fausse bonne idée, issue d'un amendement de M. Jean-Jacques Hyest, qui découpe chaque canton en sections cantonales. Le Sénat semble d'ailleurs l'avoir votée « à l'insu de son plein gré ».

J'en viens aux élections municipales et intercommunales. Pour le seuil séparant les deux régimes électoraux municipaux, le Sénat a rétabli le chiffre de 1 000 habitants prévu par le projet de loi initial. Il a aussi supprimé, en deux temps, les dispositions visant à diminuer de deux unités l'effectif des conseils municipaux des communes les moins peuplées.

Pour le reste, il a maintenu, moyennant quelques modifications rédactionnelles, l'essentiel des dispositions que nous avions adoptées pour moderniser ce mode de scrutin, notamment le principe de l'obligation de dépôt des candidatures. Cependant, il a jugé prématurée l'application de la réforme en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, alors que nous avions cherché à en étendre le bénéfice à leurs communes, tout en conservant les particularités en partie liées à leur insularité.

Sur le statut des élus, le Sénat a durci, peut-être à l'excès, le régime des inéligibilités que nous avions systématisé. En revanche, il a supprimé la nécessaire mise en conformité du régime des incompatibilités entre un emploi salarié et un mandat intercommunal. Je vous proposerai de la rétablir, car on doit privilégier l'incompatibilité plutôt que l'inéligibilité, qui constitue une restriction majeure à l'exercice de la citoyenneté dans une démocratie.

Le Sénat a aussi validé, moyennant quelques modifications rédactionnelles, la suppression de la faculté de reverser l'écrêtement des indemnités des élus.

Sur les élections intercommunales, le Sénat a profondément modifié le dispositif que nous avions adopté.

En premier lieu, il a retenu l'appellation de « conseillers communautaires » pour les futurs élus au suffrage universel appelés à siéger au sein des organes délibérants des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Vous connaissez mes réticences à l'égard de l'adjectif « communautaire » qui, impropre et ambigu, ne parle pas aux citoyens. La preuve en est que les appellations retenues par les EPCI – « Grand Lyon », « Lille Métropole », « Montpellier Agglomération » – mettent l'accent, non sur la notion de communauté, mais sur le caractère intercommunal et métropolitain. Je vous proposerai donc de revenir à la dénomination « conseiller intercommunal ».

Le Sénat a ensuite adopté un dispositif de fléchage des élus intercommunaux semblable à celui qu'il avait voté en commission en première lecture. Celui-ci permettra un fléchage alternatif au moyen d'une liste intercommunale séparée, en lieu et place du dispositif prévu par le Gouvernement, aux termes duquel les premiers de la liste municipale avaient vocation à siéger au conseil intercommunal, puis assoupli par nos soins, pour autoriser des remplacements. Je me rallie, bon gré mal gré, à la position défendue par les associations d'élus des EPCI, pourvu qu'on améliore la rédaction actuelle.

Enfin, le Sénat a décidé que les représentants intercommunaux seraient désignés par le conseil municipal, et non plus élus, dans les cas où il apparaîtrait qu'une section électorale n'est appelée à ne se voir attribuer aucun siège ou si un élu désigné dans l'ordre du tableau dans une commune peu peuplée venait à démissionner. La pratique républicaine veut au contraire qu'on remplace un élu du suffrage universel direct par un autre élu au suffrage universel direct. Aussi, comme en première lecture, je vous proposerai de supprimer le sectionnement, et non pas l'élection, s'il rend difficile une telle élection des conseillers intercommunaux.

Le Sénat a également supprimé certaines dispositions sur lesquelles nous avions travaillé en commun, comme l'élection des représentants intercommunaux au sein des syndicats d'agglomération nouvelle, ou l'introduction de la parité au sein du bureau des EPCI. Je vous proposerai de les rétablir.

Enfin, il a adopté un amendement mettant en place un nouveau mode de scrutin pour les élections régionales, à savoir une élection au scrutin proportionnel dans le cadre du département, au lieu des actuelles listes régionales découpées en sections départementales. Je vous propose de ne pas conserver cette réforme improvisée, qui repose sur un dispositif incomplet – il ne prévoit pas le nombre de sièges par département – et sans lien avec l'objet du texte. Le but du projet de loi n'est pas de modifier le mode de scrutin régional à l'oeuvre depuis 2004, même si cette tentation a pu effleurer tel ou tel d'entre nous.

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