Intervention de Patrick Bernasconi

Réunion du 19 mars 2013 à 16h45
Commission des affaires sociales

Patrick Bernasconi, membre du bureau exécutif du MEDEF :

Je vous remercie de nous recevoir pour évoquer cet accord qualifié d'historique par de nombreux observateurs. Le caractère potentiellement historique de l'accord national interprofessionnel ne pourra néanmoins être apprécié qu'une fois qu'il aura été appliqué, à l'aune de ses effets sur les entreprises et sur l'emploi. En outre, il ne faut pas se tromper sur la nature de l'accord : il concerne, non pas la compétitivité-coût – objet du crédit d'impôt compétitivité emploi –, mais la compétitivité hors coût dont les effets ne se font sentir qu'à long terme.

Si le caractère historique du contenu de l'accord se révèlera à l'usage, ce qualificatif peut néanmoins s'appliquer au champ d'application de l'accord et au contexte dans lequel il s'inscrit. Il faut, en effet, remonter très loin dans le temps pour trouver un accord couvrant un aussi grand nombre de sujets. En outre, cet accord a suscité des attentes multiples non seulement en France, de la part des organisations syndicales comme des entreprises, mais aussi à l'étranger. De nombreux pays européens se sont en effet intéressés au contenu de l'accord. Au plan international, le FMI, l'OCDE ou encore les agences de notation l'ont aussi examiné avec une grande attention.

Pour le MEDEF, un véritable équilibre a été trouvé dans cet accord. Il n'y a pas de victoire des organisations patronales sur les organisations syndicales ou l'inverse. L'objectif était de parvenir à un accord, non pas donnant-donnant, mais gagnant-gagnant. Pour construire cet accord, chacun a fait son travail en s'inscrivant dans une logique qui tendait à renforcer le dialogue social dans l'entreprise. Nous y avons veillé chaque fois que cela était possible, comme de nombreuses dispositions de l'accord en témoignent.

Cela passe aussi par une meilleure information des institutions représentatives du personnel sur les orientations stratégiques de l'entreprise. Nous savons en effet qu'une information anticipée permettant un meilleur partage de ces orientations facilite la prise de décisions importantes et leur acceptation au sein de l'entreprise.

Pour nous, cet accord devait également définir un modèle de flexi-sécurité à la française. Nous souhaitions que, dans un contexte économique difficile, l'accord apporte aux entreprises des outils pour rebondir rapidement en cas de retour de la croissance.

L'accord comporte donc des éléments de flexibilité. Ils portent, en premier lieu, sur la vie courante de l'entreprise. Afin de permettre une adaptation de cette dernière au fil de l'eau, de nouveaux outils sont mis à disposition en matière de mobilité interne ou de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC).

Les mesures concernant les délais préfix permettent d'accélérer la prise de décisions et de sécuriser celles-ci. Ils constituent un gain de temps et une simplification bienvenus pour favoriser la croissance de nos entreprises.

Les éléments de flexibilité introduits par l'accord permettent aussi de faire face aux difficultés conjoncturelles : l'accès au chômage partiel est ainsi rendu plus facile et plus rapide – chômage partiel et activité partielle relèvent désormais d'un seul et même dispositif ; les accords de maintien dans l'emploi qui prennent la suite des accords compétitivité emploi, discutés avant l'élection du Président de la République, sont un outil supplémentaire.

L'accord permet enfin de résoudre les difficultés structurelles des entreprises en améliorant la gestion des plans de sauvegarde de l'emploi.

L'accord cherche donc à apporter des réponses point par point aux difficultés rencontrées par les entreprises, qu'elles soient structurelles ou conjoncturelles. Sur ces questions comme en matière de ressources humaines, il propose des solutions par le biais de dispositifs adaptés.

Par ailleurs, la lutte contre la précarité, dont la taxation des contrats courts est devenue la mesure symbolique, a fait l'objet d'un débat qui a suscité beaucoup d'incompréhension. La volonté de limiter l'utilisation excessive des contrats à durée déterminée a pour corollaire la demande d'un recours accru aux contrats à durée indéterminée. Afin de renforcer ces derniers, nous avons préconisé l'adoption de mesures permettant de vaincre la peur de l'embauche chez les entrepreneurs. Les chefs d'entreprise doivent être incités à recruter en contrat à durée indéterminée plutôt que déterminée. Les dispositifs de déjudiciarisation répondent à cet objectif. La conciliation prud'homale, la réforme des délais de prescription ou la prévalence du fond sur la forme sont autant de dispositions destinées à vaincre cette peur de l'embauche.

En contrepartie de cette flexibilité nouvelle, synonyme de mise en danger pour le salarié, les organisations syndicales ont revendiqué la sécurisation des parcours professionnels. Il était important de répondre à cette demande afin de faciliter l'acceptation de la flexibilité. Des droits nouveaux portables sont ainsi créés par l'accord : le compte personnel de formation – il s'agit d'un nouvel outil à disposition du salarié dès le début de sa carrière et à tout moment de sa vie professionnelle pour améliorer sa formation – et la couverture complémentaire santé qui garantit la portabilité de la prévoyance et de la santé.

Une meilleure information des salariés ainsi que des droits nouveaux portables qui améliorent leur employabilité et sécurisent leur parcours professionnel en cas de difficultés, compensent donc une plus grande flexibilité.

Nous sommes parvenus à un équilibre qui fut difficile à trouver – vous devez en avoir conscience. Il a été construit pas à pas, après de multiples réunions. Il vous appartient aujourd'hui de retranscrire dans la loi cet équilibre global. Si l'on souhaite que la méthode perdure, que le dialogue social engagé se poursuive demain avec la signature de nouveaux accords, il est important de respecter le travail des partenaires sociaux. Sachez que, sur le terrain, la première, et souvent la seule, question qui préoccupe les chefs d'entreprises, de PME comme de grandes entreprises, est de savoir si l'accord négocié sera transposé dans la loi. Leur vraie demande porte sur ce sujet. Voilà le message que je souhaitais vous faire passer.

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