Intervention de Bruno Sido

Réunion du 21 février 2013 à 14h30
Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques

Bruno Sido, président :

Après avoir parlé ce matin de sécurité numérique et de résistance des systèmes aux attaques, nous abordons cet après-midi un sujet tout aussi important, celui de la sûreté intrinsèque de ces systèmes. Nous examinerons successivement les questions de l'étendue de l'exposition aux risques de défaillance, de la fiabilité des appareils servant au diagnostic en matière de santé et de la capacité à certifier la validité des systèmes numériques.

Comme un certain nombre d'entre nous, j'ai grandi dans une société sans ordinateur. Notre premier contact avec l'informatique se faisait par l'initiation à des langages aux intitulés étranges, comme le cobol ou le fortran, qui permettaient de faire fonctionner un ordinateur dont les calculs se traduisaient par un amoncellement de cartes perforées.

C'est une banalité de pointer l'ampleur des progrès accomplis depuis, mais j'ai la conviction que la numérisation de la société en est au stade où, comme le nénuphar, elle ne remplit que la dixième partie du bassin, avant d'en occuper la moitié demain et la totalité après-demain.

L'aviation civile est un bon exemple de cette progression car elle emploie des logiciels dits critiques, c'est-à-dire qui ne doivent pas connaître de défaillance. Le Concorde a été, en 1969, le premier appareil à être équipé de commandes de vol électronique. Aujourd'hui, les commandes de vol d'un A380 comptent plus d'un million de lignes de codes. Demain, d'ici 2025, la navigation aérienne sera assurée par un système entièrement numérisé dont les codes compteront des millions de lignes. Au stade ultime de cette évolution, les avions de ligne seront devenus des objets numériques pouvant rectifier en permanence leur trajectoire en fonction de leurs perspectives d'atterrissage, de la météo et du trafic aérien. Cet exemple nous permet de mesurer l'ampleur du défi qui nous attend.

Produire des logiciels est une chose, vérifier leur validité en est une autre. Le logiciel de conception des trains d'atterrissage de l'A380 est six fois moins volumineux que ses logiciels de vérification. Les écoles françaises de mathématiques ont développé, à compter du milieu des années soixante-dix, des instruments comme l'analyse statique et la vérification formelle qui s'assurent de la validité de systèmes de plus en plus massifs à moindre coût. En dépit de l'excellence de nos chercheurs dans ce domaine et de l'intérêt de nos industriels pour ces questions, je ne suis pas sûr que les pouvoirs publics français aient conscience de l'importance de ce qui se profile. C'est pourquoi je souhaite que l'Office, dont c'est la vocation, soit saisi de ces questions.

La première table ronde de cet après-midi va nous conduire à nous pencher d'abord sur l'importance prise par les systèmes numériques dans les dispositifs de gestion courante. Cette dépendance fragilise de facto toute l'architecture sociale. La crainte cataclysmique du fameux bug de l'an 2000 est une anticipation, certes exagérée, de ce phénomène. La question est de savoir à quelle vitesse la réalité va finir par rattraper ce type d'appréhension. C'est une interrogation que je soumets à M. Gérard Berry.

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