Intervention de Véronique Descacq

Réunion du 19 mars 2013 à 17h00
Délégation de l'assemblée nationale aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes

Véronique Descacq, secrétaire général adjoint chargée de la protection sociale et économique à la CDFT :

Commençons par la négociation « QVTEP », qui a été mise entre parenthèses pendant la négociation sur la sécurisation des parcours professionnels. On attendait en effet de savoir ce qui serait décidé en matière de temps partiel. De fait, dans l'ANI qui est en cours de transposition législative, la question du temps partiel a été traitée sous l'angle de la « sécurisation des parcours professionnels ». Il reste à en discuter maintenant sous l'angle de l'« organisation du travail ». C'est ce que l'on fera dans la négociation sur l'égalité professionnelle, qui vient de repartir. J'en veux pour preuve le texte que quatre organisations syndicales (pas FO, mais CFDT, CGT, CGC et CFTC) ont signé sur le sujet.

Revenons à la négociation sur la sécurisation des parcours, à laquelle j'ai participé. La CFDT est tout à fait favorable à l'intégration des questions d'égalité professionnelle dans toutes les négociations. L'ANI est une excellente illustration de cette approche intégrée. C'était en effet la première fois que, dans une négociation interprofessionnelle, on traitait de façon aussi approfondie la question de la précarité, laquelle, on le sait bien, touche essentiellement les femmes, les femmes en retraite et les mères qui élèvent seules leurs enfants. De fait, un certain nombre de droits nouveaux, qui visent à lutter contre la précarité, auront un impact sur la situation des femmes.

Vous nous avez demandé si nous n'aurions pas préféré, à la taxation des contrats courts, une cotisation patronale progressive sur les CDD. Il se trouve que la CFDT souhaitait que l'on instaure une cotisation patronale sur tous les contrats courts, quelle que soit leur nature, CDD ou CDI – un CDI peut être rompu non seulement pendant la période d'essai, mais aussi au bout d'un an ou deux ans et chacun sait que dans ces cas-là, les indemnités de licenciement sont très modestes. Mais notre proposition n'a pas été retenue. Le MEDEF y était hostile, et ce n'était pas la proposition de Force ouvrière.

Les droits rechargeables à l'assurance chômage constituent un droit nouveau pour les salariés et plus particulièrement pour les femmes, qui sont les premières concernées par l'accumulation et l'enchaînement des contrats courts. Elles pourront désormais cumuler les droits correspondant aux périodes de travail successives, ce qui ne pourra qu'améliorer leur indemnisation en cas de chômage. Jusqu'à présent, l'absence de droits rechargeables dissuadait les seniors, hommes ou femmes, à reprendre un emploi. Par exemple, le fait de souscrire un CDD de quatre ou six mois avait pour conséquence de leur faire perdre 36 mois de droits à l'assurance chômage. Les femmes pourront aussi se fabriquer de nouveaux droits à la retraite, qui viendront compenser une carrière souvent accidentée.

Je souhaite maintenant dire un mot sur le compte personnel de formation, un droit universel que le salarié conservera tout au long de sa vie professionnelle. Par essence, il est plus particulièrement favorable aux salariés des TPE et PME, ceux qui sont les moins qualifiés et ont le plus de mal à accéder à l'emploi – parmi lesquels beaucoup de femmes. Comme son financement est mutualisé, les salariés peuvent en bénéficier sans passer par leur entreprise. Un tel dispositif offre aux salariés des TPE et PME un accès à la formation pratiquement égal à ceux des grandes entreprises.

Je m'arrêterai un peu plus longuement sur le temps partiel. La mesure phare de cet accord est celle qui instaure un seuil minimal de 24 heures hebdomadaires. Jusqu'à présent, il n'y avait pas de seuil de référence et les contrats à temps partiel pouvaient porter sur n'importe quelle durée. Maintenant ce n'est plus le cas, même si des dérogations sont possibles.

Pourquoi avoir instauré un tel seuil ? Pour dépasser le minimum de 20 heures, qui permet d'accéder aux droits sociaux – notamment, indemnités journalières et droits à la retraite.

Une dérogation est possible sans accord, mais à deux conditions : la demande écrite du salarié, et surtout, l'obligation, pour l'employeur, d'organiser le temps de travail sur des journées complètes de manière à ce que le salarié – en général une femme – puisse compléter son temps de travail avec un autre employeur. Ce n'est pas négligeable quand on sait qu'aujourd'hui certains temps partiels très courts s'échelonnent sur toute une semaine – deux heures le matin, deux heures en milieu d'après-midi, etc.

On peut toujours rêver d'un idéal qui serait l'instauration d'un seuil indépassable. Mais même avec cette dérogation, l'instauration des 24 heures hebdomadaires constitue une avancée tout à fait significative par rapport à ce qui existait jusqu'à présent.

D'autres possibilités de dérogation existent, mais elles sont strictement encadrées par des accords de branche étendus.

Je pense qu'il faut faire confiance à la négociation de branche non seulement pour encadrer ces dispositifs, mais encore pour les améliorer. D'ailleurs, le fait de conditionner l'abaissement du seuil de 24 heures à une négociation modifiera le rapport de forces et placera les partenaires sociaux, et en particulier les organisations syndicales, dans une situation plus favorable que précédemment.

Feront naturellement partie de ces négociations : la question de la cotisation vieillesse qui pourrait être calculée sur la base d'un salaire à temps plein ; la question des droits à formation ; la question de l'organisation du travail et des horaires. Pour moi, que l'on puisse encadrer l'organisation du travail et les horaires par des accords de branche constitue une véritable révolution par rapport à ce qui se passe aujourd'hui !

Il est très important que l'ANI ait traité du recours aux avenants temporaires. Nous sommes tous contre cette pratique illégale, mais massivement utilisée. Comme l'a fait remarquer Mme Baltazar, c'était une revendication du MEDEF qui voulait sécuriser juridiquement le recours aux avenants temporaires.

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