Intervention de Jean-Marc Germain

Réunion du 26 mars 2013 à 16h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Marc Germain, rapporteur :

Je suis très surpris de votre position, monsieur Chassaigne : la création d'un tel compte est un objectif de longue date de votre groupe politique, comme d'ailleurs du groupe socialiste.

L'instauration d'un financement obligatoire de la formation professionnelle par l'employeur en 1974 – le « 1 % formation » – a constitué un progrès, mais le système a vite atteint ses limites : les formations dispensées dans ce cadre bénéficiaient plutôt à ceux qui étaient déjà les plus formés. Avec le compte personnel de formation, nous passerons d'une obligation collective de dépenser pour la formation des salariés à une obligation individuelle de dépenser pour la formation de chacun. C'est un moyen d'établir une égalité non seulement formelle, mais réelle. C'est pourquoi nous sommes nombreux à le défendre, particulièrement à gauche.

Le droit individuel à la formation (DIF) était une première étape dans cette voie. Cependant, ce dispositif n'a été utilisé que par un salarié sur cinq, car il a souffert de ses contradictions internes : il devait favoriser la montée en qualification des salariés, mais il a été plafonné à 120 heures, ce qui est insuffisant pour une formation qualifiante. Il conviendra de porter ce droit individuel au-delà de ce plafond et de poser, à cet égard, la question d'une participation financière des entreprises.

À ce stade, l'accord du 11 janvier ne tranche pas la question et sanctuarise même le plafond de 120 heures. En revanche, le compte personnel de formation permettra de rassembler l'ensemble des contributions de l'État, des régions et des entreprises. En accumulant ainsi des droits, les intéressés pourront avoir accès à des formations qualifiantes.

Deuxièmement, les modalités d'utilisation du compte doivent encore être précisées par une loi, que je souhaite voir adoptée rapidement. Nous en avons déjà une vision assez claire et un principe ressort clairement des auditions que j'ai menées : c'est in fine le salarié qui devra décider de sa formation. L'expérience montre en effet qu'une formation qui est imposée à un salarié ou dans laquelle il ne s'implique pas se solde généralement par un échec. En revanche, un vrai débat demeure, y compris au sein du groupe SRC : certains plaident pour que le salarié ait l'entière liberté de choisir sa formation ; d'autres – c'est mon cas – pour qu'il exprime son choix parmi plusieurs formations figurant dans une sorte de catalogue national défini par les partenaires sociaux. Cela garantirait que la formation réponde aux besoins économiques de notre pays, ce qui est également dans l'intérêt des salariés : ils s'attendent en effet à ce que les formations qu'ils suivent leur permettent d'accéder à un emploi ou de progresser sur le plan professionnel.

Troisièmement, le service public de l'orientation mentionné à l'article 2 correspond à la mission de l'ensemble des organismes qui concourent à l'accompagnement des demandeurs d'emploi : Pôle emploi, les missions locales, mais aussi un certain nombre d'organismes paritaires. S'agissant de la loi de décentralisation, je plaide pour que l'on confie aux régions le soin d'organiser ce système d'orientation professionnelle. Celles-ci n'auront nullement vocation à se substituer aux organismes existants – auquel cas vous auriez raison, monsieur Chassaigne, de pointer du doigt un transfert de charge financière sur les budgets régionaux –, mais elles devront s'assurer que tout salarié et tout demandeur d'emploi peut bénéficier d'un accueil en la matière. En revanche, la gestion des droits au titre du compte personnel de formation devrait revenir aux partenaires sociaux au niveau interprofessionnel. Un accord pourrait se dessiner entre l'État, les régions et les partenaires sociaux sur un tel partage des rôles. Des précisions seront apportées progressivement dans le cadre des discussions qu'engagera le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.

J'émets un avis défavorable sur votre amendement, monsieur Chassaigne, et vous suggère de le retirer.

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