Intervention de Richard Ferrand

Séance en hémicycle du 28 mars 2013 à 21h45
Recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRichard Ferrand :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la proposition de loi à l'ordre du jour se propose de fixer des limites à la recherche scientifique sur les cellules souches embryonnaires, sans en entraver le mouvement. Tel est l'esprit de l'autorisation encadrée, qui succède à l'interdiction avec dérogations, et rend donc nécessaire la nouvelle rédaction de l'article L. 2151-5 du code de la santé publique.

Une meilleure connaissance des cellules embryonnaires ouvrira à la recherche médicale des horizons nouveaux, dans un cadre législatif qui doit concilier éthique et progrès humain. Les chercheurs ont beaucoup à apprendre de ces cellules, dont le potentiel de différenciation est incomparable et spontané, puisqu'elles sont en pleine vigueur juvénile et recèlent de nombreux secrets. On mesure d'ores et déjà combien les cellules du cordon ombilical ont, entre autres, apporté une contribution majeure au progrès des greffes de moelle.

Au commencement, chacun de nous n'est que ce minuscule zygote qui a scellé la rencontre de l'ovule et du spermatozoïde. Cette cellule unique, apparemment fragile, n'est frêle qu'en apparence, puisqu'elle a reçu toute l'information génétique de notre espèce. Le zygote peut devenir un embryon, un foetus, un nouveau-né, un enfant, un adulte, et dans le meilleur des cas, un vieillard. Un jour, qui n'aura pas été choisi, chacun d'entre nous rendra d'ailleurs cette vie qui lui a été donnée.

L'enjeu est bien de faire évoluer notre législation pour libérer les possibilités de recherche en France, comme cela est d'ores et déjà le cas dans de nombreux pays étrangers.

Cette liberté nouvelle ne peut s'entendre que dans un cadre garantissant les exigences éthiques. C'est pourquoi les quatre conditions cumulatives permettant le protocole de recherche conduit sur un embryon humain apportent la sécurité requise. Ainsi, outre que la pertinence scientifique de la recherche aura été établie, celle-ci devra s'inscrire dans une finalité médicale. La nécessité de recourir aux embryons ou cellules souches embryonnaires aura dû être démontrée et devra respecter les principes éthiques.

Liberté scientifique, sécurité juridique et responsabilité éthique constituent le trépied de l'avancée progressiste de cette proposition de loi. Cette avancée permet d'espérer des progrès sur les maladies de l'immunité, les cancers, mais aussi des découvertes qui ne sont pas nécessairement programmées à l'avance, mais que le cheminement scientifique trouve régulièrement sur sa route.

Plus concrètement, cette évolution législative va permettre à nos chercheurs d'avancer autant que leurs collègues étrangers, là où le cadre national actuel bride bien des programmes et des protocoles de recherche. Or, dans la recherche médicale, la France peut s'enorgueillir d'avoir compté et de compter d'éminentes personnalités ayant fait bénéficier l'humanité tout entière de leur travail et ayant conforté ainsi nos universités, nos laboratoires, et même nos filières pharmaceutiques.

Pour toutes ces raisons, cette proposition de loi comprenant un article unique illustre qu'il n'est pas toujours nécessaire d'être long pour être pertinent. Ce texte est un petit pas législatif, mais un grand pas pour le progrès scientifique.

Comme vous tous, mes chers collègues, j'ai reçu de nombreux courriers et lu quelques articles et déclarations stigmatisant cette proposition de loi comme attentatoire à la dignité et au respect de la vie.

Très simplement, je n'arrive pas à comprendre en quoi la conservation ad æternam d'embryons ou leur destruction après un certain délai serait plus respectueuse que leur utilisation à des fins de recherche. Que la vie, comprise dans ses toutes premières origines, soit mise au service de la santé humaine, dans un cadre strictement fixé, me paraît au contraire relever d'un impératif moral.

Au nom de quelle considération éthique devrait-on empêcher l'esprit humain de progresser, la recherche médicale de sauver des malades ou d'alléger des souffrances ? L'interdit signe le plus souvent une défiance dans le sens commun des responsabilités, là où, au contraire, les libertés bien encadrées témoignent d'une confiance dans l'éthique de nos chercheurs.

Inutile à ce stade d'évoquer une nouvelle fois les cellules IPS, dont on connaît l'intérêt réel, mais limité, dans les enjeux qui nous préoccupent.

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