Intervention de Jean-Marc Germain

Réunion du 27 mars 2013 à 9h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Marc Germain, rapporteur :

La question soulevée par ces amendements est revenue avec force au cours des auditions que j'ai menées. Les positions ne recoupent d'ailleurs pas le clivage entre organisations syndicales et employeurs.

Plusieurs questions se posent : à quel moment l'existence d'un motif économique doit-elle être contrôlée ? Est-ce à l'administration de le faire ? Si l'administration réalise ce contrôle, comme vous le proposez, elle en ôte la possibilité au juge judiciaire, à un moment ultérieur où le salarié peut contester son licenciement. Nous sommes donc confrontés à un dilemme.

Certaines organisations syndicales non signataires de l'accord du 11 janvier préfèrent que l'administration ne se prononce pas sur l'existence d'un motif économique réel et sérieux. En effet, si elle valide la justification de l'employeur, les salariés seront moins bien protégés et risqueront de ne pas obtenir d'indemnisation – ou d'obtenir une indemnisation moindre – s'ils contestent leur licenciement devant le juge. Actuellement, l'administration ne se prononçant pas sur la validité du motif économique, le juge administratif ne le fera pas davantage et le juge judiciaire pourra, le cas échéant, constater l'absence de cause réelle et sérieuse au licenciement et décider une indemnisation du salarié équivalente à au moins douze mois de son salaire.

D'autres plaident au contraire pour une intervention de l'administration en amont : dans les cas où le motif économique fait défaut de manière évidente, elle pourrait alors bloquer la procédure de licenciement.

D'autre part, la question de la fraude à la loi a fait l'objet d'un débat entre les juristes que j'ai auditionnés. Pour certains, l'administration pourrait refuser d'homologuer le document unilatéral élaboré par un employeur au motif que celui-ci s'est placé à tort dans le cadre de l'article 1233-3 du code du travail, ce qui constitue une tentative de fraude à la loi. L'administration effectuerait ainsi un contrôle de l'erreur manifeste, ce qui lui permettrait d'interrompre certaines procédures, par exemple des licenciements pour d'autres motifs déguisés en licenciements économiques, lesquels peuvent être révélés par un rapport d'expert.

De plus, même dans le cas où l'administration déciderait d'homologuer le document, cela laisserait néanmoins une marge d'appréciation au juge : le fait qu'elle ne se soit pas prononcée dans le cadre du contrôle de l'erreur manifeste ou de la fraude à la loi n'empêcherait nullement ce dernier de constater l'absence de cause réelle et sérieuse au licenciement et de décider une indemnisation des salariés. En revanche, si nous adoptions votre amendement, monsieur Carpentier, nous le priverions de cette possibilité, du fait de la séparation des ordres de juridiction.

Avis défavorable sur ces trois amendements.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion