Intervention de Jean-Marie Tetart

Réunion du 27 mars 2013 à 16h30
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Marie Tetart :

Votre programme, innover pour être plus compétitif et rester leader, nous convient parfaitement. Je salue, à travers vous, la longue série des succès d'Ariane 5, dont vous avez été chargé de commercialiser le système lanceur. À ce titre, vous connaissez toutes les contraintes techniques aussi bien que commerciales auxquelles ce secteur est soumis et on comprend donc que le choix se soit porté sur vous.

Nous nous sommes réjouis de la réussite de la réunion ministérielle de Naples, qui n'avait rien d'évident compte tenu des tensions qui s'exprimaient dans l'Hexagone comme au sein de l'Europe. Le cahier des charges d'Ariane 6, en matière de budget, de filières industrielles et d'assemblage, sera donc préparé au cours de la présente année, cependant qu'a été ouverte la possibilité d'évoluer vers Ariane 5-ME, ce dont je suis très satisfait en tant qu'élu des Mureaux. Toutefois, j'ai aussi remarqué la faiblesse de l'engagement financier allemand pour 2013. Qu'en sera-t-il pour les années suivantes ? Finalement, c'est la réunion ministérielle de 2014 qui sera déterminante. On sent bien que l'Allemagne est prête à prendre le lanceur « le moins-disant », ou « le mieux-disant », pour mettre ses satellites sur orbite, et que nos partenaires européens s'affranchissent du devoir de souveraineté que nous nous sommes imposé à nous-mêmes. Face aux pays émergents, qui sont capables de fabriquer, non pas Ariane 6, mais des lanceurs pour des charges utiles intermédiaires, est-il envisageable de se passer de l'Allemagne ou d'autres pays européens pour conserver à la fois notre souveraineté et notre compétitivité ?

Notre centre de Kourou a beau être le meilleur et le plus convoité, l'équateur fait le tour de la Terre et beaucoup d'endroits pourraient revendiquer le même atout. J'ai visité récemment la base d'Alcântara. Les Brésiliens, qui ont connu en 2003 un échec douloureux avec l'explosion de leur fusée nationale, y ont vendu un terrain aux Ukrainiens pour installer une base commune à partir de laquelle ils sauront, dans un an ou deux, lancer une fusée Cyclone de 4 ou 4,5 tonnes de charge utile. La concurrence est à nos portes ; demain, Alcântara fera partie de l'offre mieux-disante. Peut-on envisager avec le Brésil des synergies plutôt qu'une concurrence ?

Lancer des objets dans l'espace n'a d'intérêt que pour les données qu'on observe. Encore faut-il avoir la capacité de traiter et valoriser ces données. Le Brésil, qui lance des satellites avec Israël et avec la Chine, met gratuitement à disposition toutes les applications dans ses programmes de coopération avec le Gabon, le Cameroun et d'autres pays africains. Tandis que l'Allemagne se désintéresse des lanceurs au profit des stations orbitales, les Anglais, qui ont consenti un effort particulier à Naples en augmentant de 25 % leur contribution au programme commun, ont souhaité affecter celle-ci au traitement des données et à leur valorisation plutôt qu'aux lanceurs – en même temps, à leur habitude, ils ont obtenu une contrepartie : le siège de l'agence télécoms de l'Agence spatiale européenne leur a été attribué. Attention à ne pas nous retrouver dans la situation du vecteur qui laissera à d'autres la valorisation économique des données !

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