Nous sommes de plus en plus circonspects quant au retour à un mode de scrutin majoritaire. En effet, sur le fond, nos réticences se fondent moins sur le caractère binominal du scrutin, qui permet tout de même de remplir le grand objectif de la parité, que sur le fait qu'il s'agisse d'un scrutin majoritaire. Vous le savez : nous aurions préféré un scrutin semblable à celui utilisé pour les élections régionales, lesquelles, à notre satisfaction, sont de nouveau organisées selon un scrutin proportionnel à deux tours avec prime majoritaire.
S'agissant des élections départementales, deux choix s'offraient au Gouvernement s'il souhaitait instaurer la parité intégrale : le scrutin de liste proportionnel ou le scrutin binominal. Malgré la bonne tenue de nos débats lors de ces deux lectures, nous avons le regret de constater que notre proposition, partagée par nombre de groupes de notre assemblée, n'a pas été retenue. Pourtant, le scrutin de liste proportionnel à deux tours est connu et reconnu par les citoyens : il a l'avantage d'être utilisé lors des élections municipales et régionales et le mérite d'être totalement paritaire, grâce à l'obligation d'observer une alternance stricte entre les hommes et les femmes dans la constitution des listes. Ce mode de scrutin nous aurait également évité le douloureux – quoique nécessaire – redécoupage des cantons, tant les disparités de population sont, dans certains cas, criantes. Dès lors, pourquoi l'élection départementale serait-elle la seule à ignorer la proportionnelle, alors que ce mode de scrutin sera partiellement introduit aux élections législatives ? Nous avons donc voté contre le retour au scrutin majoritaire et nous avons soutenu, avec des députés d'autres groupes, le scrutin proportionnel.
Pour le reste, certaines mesures contenues dans le projet de loi vont dans le bon sens. Il en est ainsi de l'abaissement, adopté pour la deuxième fois par notre assemblée, du seuil de recours au scrutin avec représentation proportionnelle aux communes de plus de 500 habitants. Nous ne partageons pas l'avis de notre collègue Sauvadet sur ce point. Cet abaissement de seuil permettra de constituer des majorités autour de projets, ainsi que d'assurer la parité et la représentation de l'opposition dans de nombreuses municipalités. Ce choix permettra à 7 000 conseils municipaux supplémentaires de disposer d'une représentation de la minorité et d'une composition paritaire. Seront en effet élues 32 000 conseillères municipales de plus qu'aux précédentes élections : ce n'est pas rien.
En ce qui concerne l'intercommunalité, saluons une avancée due à la navette parlementaire : l'adoption d'un dispositif de fléchage au moyen d'une liste intercommunale distincte de la liste communale. Mais, par cohérence, nous devons aller plus loin dans cette logique visant à faire clairement émerger l'échelon intercommunal, en ouvrant la possibilité d'un ordonnancement différent d'une liste à l'autre tout en conservant, bien sûr, la parité.
Surtout, nous aurions aimé aller plus loin en ce qui concerne les communautés d'agglomération et les métropoles, avec l'adoption d'un scrutin universel direct. Alors que l'intercommunalité prend de plus en plus d'importance et gère des budgets parfois très importants, pourquoi ne pas saisir cette occasion dès maintenant, sans attendre 2020 ? Il nous paraît en effet essentiel de faire émerger au plus tôt le couple intercommunalité-région afin de conjuguer cohérence et efficacité de l'action territoriale.
Nous approuvons également la volonté de repousser à 2015 les élections départementales et régionales. Au-delà des nécessités du redécoupage de la carte cantonale, la succession de cinq élections en 2014 ne serait bonne ni pour les électeurs, ni pour les communes chargées de les organiser, ni pour la démocratie. Communes, intercommunalités, départements, régions et Europe ont besoin d'avoir chacun un temps de débat propre. Les enjeux, les projets, les candidats y sont différents.
Nous regrettons également le fait que notre assemblée n'ait pas jugé utile d'interdire la présentation de binômes familiaux. Espérons que les Français n'auront pas l'occasion de nous le reprocher avec trop de véhémence lorsqu'ils seront inévitablement confrontés à ce genre de situation.
Nous regrettons enfin un recul par rapport au texte gouvernemental : celui sur le seuil d'admission au second tour, rehaussé de 10 % à 12,5 % des inscrits. Cette mesure, réintroduite par le Sénat et maintenue par notre assemblée, nous paraît aller à l'encontre du pluralisme politique.
Finalement, malgré les quelques avancées que présentent ces projets de loi, mais compte tenu du retour au scrutin majoritaire pour l'élection du conseil départemental – qui est au coeur de ce projet de loi et qui porte selon nous atteinte au pluralisme démocratique –, le groupe écologiste a décidé de s'abstenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)