Intervention de Michel Sapin

Séance en hémicycle du 2 avril 2013 à 15h00
Sécurisation de l'emploi — Présentation

Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social :

J'étais présent à l'Assemblée nationale au moment de l'adoption des lois Auroux en 1982 : je peux en témoigner. Peut-être certains se demandent-ils quelle est l'utilité d'un accord social quand on peut intervenir en légiférant. Ma réponse est la suivante : je suis intimement convaincu que le dialogue social donne une force différente, mais considérable, à la loi. En effet, l'accord social est le mieux à même de trouver le bon point d'équilibre : il fait des parties prenantes, non les exécutants d'une loi, mais les acteurs d'un changement désiré et décidé par eux-mêmes. Ce changement entrera donc plus sûrement et plus vite dans les faits. Les compromis auxquels l'accord social permet d'arriver sont durables, et résisteront au temps et aux alternances. En somme, l'accord social est utile tout simplement parce qu'il est légitime !

L'accord du 11 janvier n'est cependant pas parfait. C'est normal, compte tenu de son ampleur et de la complexité des sujets qui ont été traités dans des délais courts. Il faut dire aussi que certaines ambiguïtés ont été conservées, parfois à dessein, pour ne pas compromettre la signature de l'accord. De fait, on a ainsi renvoyé au Gouvernement et au Parlement le soin de les lever. Là où l'accord du 11 janvier laissait des ambiguïtés ou des incertitudes, là où il était silencieux, le Gouvernement a fait des choix clairs.

Le Conseil d'État a également joué son rôle en validant la pertinence juridique de la quasi-totalité des dispositions du projet, tout en alertant le Gouvernement sur les risques que pourraient faire courir certaines d'entre elles. Le Gouvernement, dans un souci de sécurité maximale pour les entreprises comme pour les salariés, a suivi ses recommandations. Un certain nombre de précisions ont donc été apportées sur la complémentaire santé, sur les modalités de désignation des salariés dans les conseils d'administration et sur les accords de mobilité. J'y reviendrai. Nous avons apporté ces précisions en toute transparence, dans le seul souci de retenir l'option la plus favorable à la sécurisation de l'emploi et des parcours professionnels et la plus conforme à l'intérêt général.

Vous êtes désormais, mesdames et messieurs les députés, saisis de ce projet de loi. La souveraineté nationale va maintenant s'exprimer dans sa plénitude. Elle n'est pas réduite, mais enrichie par le dialogue social. Elle n'est pas contrainte, mais guidée par cette démarche de loyauté et d'écoute. Elle est légitime par principe, mais le sera d'autant plus qu'elle aura à coeur de respecter l'accord signé. Son pouvoir n'est pas diminué, mais au contraire renforcé, car cette évolution de la société s'appuie sur les forces mêmes de la société.

Mesdames et messieurs les députés, vous avez abordé ce texte en commission de la bonne façon, en apportant des précisions utiles sans dénaturer le texte ni modifier son équilibre : je m'en réjouis. Je tiens à rendre hommage au rapporteur de ce projet de loi, Jean-Marc Germain, aux députés qui l'ont assisté dans cette tâche lourde, compte tenu de l'ampleur du texte, ainsi qu'à la commission des affaires sociales et à sa présidente, Catherine Lemorton. Je rends également hommage à la commission des lois, qui s'est emparée de l'article 5, à propos de la représentation des salariés dans les conseils d'administration : je remercie son président, Jean-Jacques Urvoas, et son rapporteur, Jean-Michel Clément. Je salue de même la délégation aux droits des femmes, sa présidente Catherine Coutelle et ses rapporteurs, Christophe Sirugue et Ségolène Neuville. Je remercie enfin l'ensemble des groupes politiques.

Au cours de l'examen de ce texte, quelque chose s'est produit. Les députés de chaque groupe politique ont auditionné l'ensemble des acteurs, ont discuté, ont confronté les positions, et sont allés au-delà des présupposés. Nous savons tous qu'il fut un temps, autrefois, où le patronat parlait seulement à la droite, et la CGT au seul parti communiste. Ce temps est révolu, et il faut s'en réjouir.

J'en viens maintenant au contenu du projet de loi. Pour l'examiner, une seule question vaut ; c'est la seule que se posent et que nous posent nos concitoyens : comment sécuriser l'emploi ? Le projet de loi apporte trois types de réponses à cette question. Il comporte des dispositions visant, premièrement, à faire reculer la précarité ; deuxièmement, à créer des droits nouveaux, individuels et collectifs, pour les salariés ; troisièmement, à développer des outils de préservation de l'emploi dans un contexte économique difficile.

Aujourd'hui, plus de huit embauches sur dix sont conclues au moyen d'un contrat précaire. Jamais cette proportion n'a été aussi élevée. Le nombre de CDD très courts, de moins d'un mois, a explosé. Il a doublé depuis dix ans.

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