Intervention de Michel Sapin

Séance en hémicycle du 2 avril 2013 à 15h00
Sécurisation de l'emploi — Présentation

Michel Sapin, ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social :

C'est ce que j'appelle la « préférence française pour le licenciement ».

Le sens de ce projet de loi, c'est de changer cette donne de courte vue qui ne sert personne : ni les entreprises, ni les travailleurs ! Ce texte donne les moyens d'agir ensemble. Il offre des alternatives au licenciement. Ce sont les accords de maintien de l'emploi, l'activité partielle, la mobilité interne et externe.

Voilà jetées les bases du nouveau modèle français, un modèle capable de rechercher plus de compétitivité en combattant l'insécurité juridique et la peur d'embaucher, mais qui le fait non pas en précarisant davantage, mais en anticipant davantage, en sécurisant davantage les parcours professionnels, tout en apportant des garanties collectives nouvelles.

À ceux qui rêvent, et il en existe, d'un big bang social, d'un « grand soir » de la flexibilité, je réponds que la réalité s'est dérobée sous leurs pieds ce soir du 11 janvier 2013. Ils croient incarner la modernité, ils sont en vérité terriblement archaïques, si loin de ce que les acteurs économiques et sociaux eux-mêmes sont capables de construire ensemble. Ils croyaient que notre pays ne pouvait pas se réformer par le dialogue. Ils avaient tort. Leurs appels à une « hyper-flexibilité » du marché du travail ont été défaits par les acteurs eux-mêmes, patronat et syndicats, tout simplement parce que ceux qui voulaient ce big bang de la flexibilité n'ont pas compris ce qu'est la réalité des entreprises aujourd'hui.

Les entreprises ne cherchent pas la flexibilité à tout prix, elles ont avant tout besoin de stabilité juridique. Elles ne cherchent pas tant à licencier facilement qu'à gérer leurs talents et leurs compétences avec des capacités d'adaptation et de mobilité. Elles ne cherchent pas une main-d'oeuvre taillable et corvéable à merci, mais comprennent l'intérêt d'avoir des salariés mieux formés et mieux protégés. C'est tout cela que nous dit, aussi, l'accord du 11 janvier.

Notre société est, me semble-t-il, fatiguée de la défiance. Avec cet accord, nous ouvrons, je l'espère, un cycle de confiance ! C'est de cela que la société a besoin, et non d'une flexibilisation sans contreparties, qui noierait les travailleurs dans la précarité. Ce que nous recherchons, c'est un véritable accord de société.

Que l'on ne se méprenne pas sur le sens des dispositions dont nous parlons : il ne s'agit pas d'un échange entre la flexibilité pour les entreprises et la sécurité pour les salariés, ni de l'inverse : la flexibilité pour les salariés et la sécurité pour les entreprises. Ce serait une vision réductrice et erronée. Ici, chacun peut gagner sur les deux tableaux. Le texte apporte aux salariés davantage de protection de leur emploi ou de leur parcours, tout en leur donnant des marges d'évolution nouvelles. L'accord donne aux entreprises des marges d'adaptation accrues – chômage partiel, maintien de l'emploi – et apporte aux salariés plus de sécurité juridique sur les délais et les procédures. Il y a, pour tous, à la fois plus de capacité d'adaptation et plus de sécurité.

Je suis foncièrement convaincu que ceux qui prônent la flexibilité poussée à l'extrême n'ont pas compris ce qu'est la France d'aujourd'hui, un pays qui a patiemment construit son modèle social.

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