Intervention de Dominique Dord

Séance en hémicycle du 2 avril 2013 à 21h30
Sécurisation de l'emploi — Motion de renvoi en commission

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDominique Dord :

Qu'a-t-il dit ? Qu'il avait la « boîte à outils ». Et qu'a-t-il pour vous, monsieur Sapin, dans sa boîte à outils ? Il a des emplois aidés. Ils seront peut-être mieux que les autres, je n'en sais rien, mais les emplois aidés, ce n'est pas vraiment nouveau et ça ne règle pas le problème ; c'est une manière d'accompagner les gens sur des voies de garage pendant quelque temps, mais ça ne réglera pas le problème du chômage.

Il a dit aussi qu'il y avait un pacte de compétitivité avec les entreprises, d'un montant de 20 milliards d'euros ; mais juste avant, il y a eu 20 milliards d'euros de prélèvements sur ces mêmes entreprises. Accorder 20 milliards d'allègement et faire 20 milliards de prélèvement, on ne peut pas dire que ce soit une réforme structurelle, franchement.

Ensuite, il s'est assez longuement étendu sur les investissements d'avenir, qu'il n'a pas lui-même conçus, puisqu'ils résultent des accords et des propositions que Nicolas Sarkozy avait faits avant lui. En dehors de cela, on attend toujours des mesures structurelles. Mes chers collègues, c'est quand même un peu court, tout cela !

Même si ce texte va franchement dans le bon sens, il ne réglera pas le problème du chômage en France. Ce n'était d'ailleurs pas la mission des partenaires sociaux. C'est à vous, monsieur le ministre, c'est au Gouvernement de prendre ses responsabilités, d'inventer, d'aller plus loin, de nous dire des choses plus fortes sur le chômage.

Si vous le permettez, je voudrais citer une mesure de ce texte que l'on pourrait presque considérer comme historique : il s'agit des accords de maintien de l'emploi, qui font tant râler nos collègues communistes. Cette mesure est très intéressante, puisqu'elle permet un aménagement dérogatoire de l'équilibre magique entre-temps de travail, salaire et emploi. C'est incroyable d'avoir introduit des accords dérogatoires sur ce sujet ; cela, c'est assez historique.

Mais, au fond, vous ne l'assumez pas, puisque vous n'avez introduit cette disposition qu'à l'article 12 du texte – les partenaires sociaux, eux-mêmes, l'avaient mise à l'article 18. Les neuf ou dix premiers articles du texte donnent des droits nouveaux aux salariés et on cache sous le tapis l'apport essentiel de cette négociation pour la période que nous traversons. Pour moi, ces accords dérogatoires sont une manière possible de répondre au déchaînement du chômage dans le pays.

M. Thouvenel, de la CFTC, a eu des mots très justes lorsque nous l'avons auditionné : il a indiqué que le maintien dans l'emploi était essentiel, et pas seulement pour le patronat ; que c'était l'intérêt supérieur commun. C'est cela, le coeur du réacteur, et on le cache sous le tapis, pour ne pas qu'il se voie trop !

En commission – j'y reviens, madame la présidente, puisque l'objet de mon intervention, c'est le renvoi en commission – nous avons passé plus de douze heures sur les neufs premiers articles, qui créent des droits, puis nous avons expédié en deux heures les dix derniers, qui sont beaucoup plus percutants pour répondre à la crise. Pourquoi cachez-vous cet article ? Parce qu'il est la preuve vivante que notre code du travail joue contre le maintien de l'emploi !

Vous vous rendez compte du sens de cet article ? Il signifie que lorsque les choses vont mal dans le pays ou dans une entreprise, on peut mettre de côté le code du travail – je comprends que ça vous rende furieux. C'est exactement le sens de cet article ! Alors que le code du travail est censé être le rempart ou le bouclier contre les difficultés du travail, désormais, quand les choses vont mal, on le met de côté. C'est quand même incroyable, et c'est cela, le sens de cet article !

Je comprends évidemment que, dans ces conditions, vous le mettiez de côté. C'est très français, du reste : on a eu des accords de ce type chez Renault et à la Société générale. En France, c'est seulement quand on est face au mur, voire dans le mur, que l'on se résout à sortir du carcan réglementaire dans lequel on est enfermé. C'est très français, et franchement, n'est pas Schröder qui veut… La capacité d'anticiper n'est pas toujours notre fort.

Je vais donc vous présenter – et je terminerai par là, madame la présidente – une motion de renvoi en commission, pour plusieurs raisons. D'abord, lorsque nous avons essayé, au cours des débats en commission, de connaître le contenu du décret, le rapporteur, nous a dit qu'il n'en savait rien et qu'il ne connaissait pas les dispositions précises – il a fait ce qu'il a pu, de manière tout à fait loyale, je le reconnais. Étant donné que beaucoup de choses sont renvoyées au décret, il est ennuyeux de légiférer sans savoir ce qu'il contiendra.

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