Intervention de Thierry Braillard

Séance en hémicycle du 2 avril 2013 à 21h30
Sécurisation de l'emploi — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThierry Braillard :

Le rapport sur le pacte de compétitivité pour l'industrie française rendu au Premier ministre le 5 novembre 2012 par M. Louis Gallois avait été reçu de manière quasi unanime par notre Assemblée. Il soulignait de façon pertinente les insuffisances du dialogue social dans les causes structurelles des difficultés qu'affronte la France en matière de compétitivité.

Dès lors, il devient évident que la démocratie sociale, que les réponses négociées aux préoccupations du monde du travail sont pour notre majorité des priorités.

Aussi, les radicaux ont décidé de soutenir la transposition de l'accord national interprofessionnel du 11 janvier 2013 réalisée par le présent projet de loi sur la sécurisation de l'emploi, qu'ils voteront tout en défendant leurs amendements, qui ne remettent pas en cause son équilibre.

Ils le feront parce que cela doit être l'occasion pour les entreprises de reprendre le chemin de la création d'activités et d'emplois ; parce que cela doit faciliter la relance de la croissance ; parce que cela doit sécuriser socialement les salariés tout au long de leur vie professionnelle.

Souvenons-nous : nous devons à l'inspiration du Conseil national de la résistance la mise en place de rapports sociaux qui ont lié l'amélioration de la condition des salariés et la mise en place d'une véritable législation du travail.

N'est-ce pas en 1950 que la loi sur les conventions collectives a été adoptée, permettant la négociation des salaires et imposant le dialogue dans les différentes branches ?

N'est-ce pas en 1968, le 26 mai, avec les accords de Grenelle, que l'acteur syndical est entré de plain-pied dans l'entreprise ?

N'est-ce pas en 1982, avec les lois présentées par Jean Auroux, qui nous a fait tout à l'heure l'honneur de sa présence, que de nouvelles relations du travail furent instaurées et le droit des travailleurs élargi ?

Ce qui nous est proposé aujourd'hui n'est donc pas nouveau : l'État a déjà admis par le passé que son rôle n'était pas d'imposer, mais plutôt d'oeuvrer à la construction de compromis, quitte à légiférer ensuite sur ces compromis pour leur donner tout le poids et la garantie de la loi.

Ce n'est donc pas nouveau, mais le contexte est nouveau.

En effet, ces dernières années, un climat de défiance s'était instauré entre le pouvoir et les différents syndicats. Je regrette vraiment, mes chers collègues de l'UMP, que M. Dominique Dord nous ait quittés. J'aurais aimé lui rappeler les propos tenus, non pas au meeting de Lyon mais à celui de Villepinte, par exemple, par l'ancien Président de la République Nicolas Sarkozy, qu'on veut faire apparaître comme le parangon de la démocratie sociale et qui pourtant à plusieurs reprises avait montré du dédain, voire de l'adversité politique envers le monde social. Et, en février 2012, en pleine campagne des présidentielles, il confirmait qu'il aurait recours au référendum au motif que « les blocages auxquels j'ai été confronté venaient de certains syndicats [...] qui ont intérêt à l'immobilisme, au conservatisme, par crainte d'un monde nouveau qui verrait diminuer leur influence » ! Voilà ce qu'était, lors de la précédente législature, la démocratie sociale.

Le candidat François Hollande annonçait, pour sa part, qu'il souhaitait rétablir en France un véritable dialogue social.

Une fois élu, il a d'abord concrétisé cet engagement en réunissant, dès le mois de juillet 2012, la grande conférence sociale. Il voulait à cette occasion rétablir un état d'esprit de confiance avec les acteurs sociaux, rétablir un état d'esprit de dialogue guidé par la conviction que les réformes les plus réussies sont les mieux préparées et les mieux concertées, enfin, rétablir un état d'esprit de responsabilité, compte tenu du contexte économique et social actuel.

Le Président Hollande a poursuivi dans cette voie avec le Premier ministre et vous-même, monsieur le ministre, en incitant les partenaires sociaux à trouver un accord sur la flexibilisation et la sécurisation de l'emploi.

Fruit de quatre mois de négociations, de concessions réciproques, d'efforts plus ou moins partagés, l'accord interprofessionnel du 11 janvier 2013 est bien destiné à améliorer la compétitivité des entreprises tout en sécurisant les emplois et les parcours professionnels. Et ce projet de loi retranscrit bien ce texte, lui donnant toute la force nécessaire et l'imposant dans la hiérarchie des normes.

Si M. Jean-François Copé disait, lors du lancement de la grande conférence sociale, que c'était uniquement du cinéma – je ne fais que le citer –, force est de constater que le Gouvernement a eu raison de faire confiance au dialogue social afin d'obtenir un accord exhaustif, globalement équilibré, un accord gagnant-gagnant pour les parties signataires.

Bien sûr, et je m'adresse là à mes amis du groupe GDR, les radicaux, vous le savez, ont le sens de la conciliation et du dialogue. Nous regrettons donc que deux des cinq syndicats représentatifs des salariés n'aient pas adopté ce texte, en prétextant une flexibilisation accrue sans contreparties suffisantes. Nous entendons leurs remarques.

Nous les entendons d'autant mieux que notre groupe, à l'initiative de notre collègue Jean-Noël Carpentier, a déposé à l'automne dernier une proposition de loi qui vise à étendre le pouvoir du juge saisi de la validité d'un plan de sauvegarde et de l'emploi, en lui permettant d'apprécier, outre la régularité de la procédure, la cause économique réelle et sérieuse. Il est des exemples récents où des licenciements économiques collectifs ont été prononcés sur une motivation qui aurait mérité un contrôle du juge a priori, et non pas a posteriori comme c'est le cas dans le droit en vigueur.

C'est la raison pour laquelle l'article 13 du projet de loi est une réponse qui va dans le bon sens. En effet, les partenaires sociaux ont souhaité créer deux nouvelles voies pour fixer la procédure de licenciement et le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi : la voie d'un accord majoritaire et celle d'un document unilatéral de l'employeur soumis à une homologation de l'administration.

Car le constat est là : notre pays a besoin de concilier le besoin de compétitivité de ses entreprises et la sécurisation de ses emplois. Notre pays a besoin de retrouver la croissance et de réduire le chômage, de donner une meilleure visibilité aux chefs d'entreprise, de donner de la sécurité aux salariés.

Est également transcrite, à l'article 5 du projet, la participation des salariés à la gouvernance des entreprises. Les conseils d'administration et de surveillance seront désormais ouverts aux salariés. C'est une évolution considérable qui permettra notamment de rééquilibrer le pouvoir dans l'entreprise entre le capital et le travail, car les salariés auront voix délibérative.

Ce projet, c'est également la création de nouveaux droits pour les salariés. Vous ne pouvez pas, mes chers collègues du groupe GDR, dire que ce texte n'en instaure pas.

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